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Réflexions provisoires sur le “renouveau“ en poésie arabe (2/2)

I/ La question du « nouveau » et de « l’ancien » en littérature arabe contemporaine

La question du « nouveau » et de « l’ancien » en littérature arabe a occupé la majeure partie des débats littéraires, particulièrement belliqueux cette fois-ci, dès le début du XXème siècle. Des échanges véhéments, sans doute car le « nouveau » chez certains écrivains ne désigne plus seulement la créativité ou ce qui diffère de l’ancien, mais aussi ce qui ressemble à l’Autre.

La querelle entre les deux géants de la littérature Mostapha Sâdiq Arrâfi’î (m. 1937) et Taha Hussein (m. 1973) en est la parfaite illustration à partir des années 1920. T. Hussein est l’auteur de À propos de la poésie Jahiliyya. Ouvrage dans lequel il prétend que la majeure partie de la poésie pré-islamique a été écrite après la venue de l’islam et pas avant. Ces poèmes, dans leur grande majorité selon lui, n’appartiennent pas aux poètes de la Jahiliyya.

Par conséquent, avance t-il, cette poésie là ne doit plus nous inspirer pour comprendre le Coran (il faut avoir à l’esprit que tous les ouvrages classiques qui traitent de la question de l’inimitabilité du Coran s’appuyaient sur la poésie Jahiliyya, c’est le cas par exemple d’Al-Bâqillânî (m. 402h) dans son « I’jâz al-corane »). C’est un scandale. Boulversé, son jeune élève Mahmoud Châkir (m. 1997) dût démissionner de ses études et quitta définitivement l’université.

Il lui reproche de répéter sans esprit critique les thèses des orientalistes et sans les citer, à savoir la thèse de l’orientaliste D.S. Margoliouth, d’autant plus que la question de la poésie apocryphe n’est pas nouvelle, elle fut traitée très tôt dans l’ouvrage d’Al-Jumahî (m. 232h). T. Hussein sera trainé en justice, auditionné par des membres de la classe politique et réfuté par des savants comme Chaykh Al-Azhar et hommes de lettres. Pour ne pas m’éloigner de ma problématique, en quoi la question du nouveau et de l’ancien concerne cet ouvrage ?

Eh bien, c’est T. Hussein lui-même qui présente la littérature arabe sous le prisme du nouveau et de l’ancien. Dans son À propos de la poésie Jahiliyya, il est question d’une part des « partisans du nouveau » dont la « raison se délecte dans le doute », « sceptiques et dubitatifs » dont il fait fièrement partie et  « partisans de l’ancien », « non habitués au doute dans la recherche scientifique » et « naïfs » de l’autre. Au deuxième chapitre, où il présente sa « méthode de recherche », il est question de « Descartes » et du « doute ». Cette question du nouveau et de l’ancien traverse la majeur partie des écrits du « Doyen de la littérature », mais cette fois-ci en rapport avec la littérature greco-latine et française pour l’essentiel. Dans ses écrits, comme Le discours du mercredi, il se positionne très souvent par rapport à la littérature française.

Le géant de la littérature arabe Mustapha Sâdiq Arrâfi’î s’en prendra avec véhémence aux écrits et au style de son homologue et contemporain T. Hussein, à travers de nombreux articles rassemblés dans son ouvrage intitulé « Sous l’étendard du Coran », sous-titré « La bataille entre l’ancien et le nouveau ». Il lui reproche de vouloir « avilir » la langue et la littérature arabe au profit de la littérature étrangère et de toucher aux fondement du Coran et de la religion.

Il écrit à son propos que « le professeur d’université imite les destructeurs parmi les grands esprits européens » et qu’il « s’attache exclusivement à la littérature étrangère » et ce au nom de la « nouveauté ». Pour lui, « le fond du problème ne réside pas dans le clivage ancien/nouveau mais dans la préférence d’une langue étrangère au détriment d’une autre ». L’une des réponses de T. Hussein à ces accusations est que le « style de M. Râfi’î est très ancien, et ne convient plus à notre époque (..), nous sommes au 14ème  siècle de l’hégire », écrit-il dans le deuxième volume du Discours du mercredi. Il est important de rapporter ici ces débats car la poésie est naturellement une partie intégrante de la littérature, d’autant plus qu’il s’agit ici des deux voix les plus influentes de la littérature à cette époque. 

II/ L’appel au « renouveau » de la poésie arabe

Qu’en est-il de ce clivage dans la pratique même de la poésie ? A la fin du XIXème et au début du XXème siècle apparaissent des figures qui revivifient la poésie arabe dans sa forme « classique », comme Mahmoud Sâmî al-Bârûdî, Hâfiz Ibrâhîm (m. 1932) et Ahmed Chawqî (m. 1932). C’est « l’école de la revivification » qui apporte un nouveau souffle à la poésie après des siècles de « sclérose » pendant l’ère Ottomane. Samî al-Bârûdî (m. 1904), par exemple, a réussi à faire renaître la poésie dite « classique » de ses cendres, après de longues lectures des poésies des périodes Jahiliyya, Islamique, Omayyade et Abbasside. Il influencera les générations suivantes, à commencer par Hâfiz Ibrâhîm et Ahmed Chawqî, et indirectement, les écoles qui suivront. Fidèle à la langue arabe, ses poèmes jugés de grande qualité sont aussitôt intégrés dans l’ouvrage de référence du Chaykh Hussein Al-Marsafî (m. 1889) dans sa « Al-wasîla al-adabiya » (un ouvrage volumineux et de référence qui traite de grammaire et de Balâgha). 

Dans cette école appelée parfois « néoclassique », la question du renouveau ne s’est pas posée, au moins théoriquement, en tant que projet. Je n’ai pas trouvé cette question chez les poètes de ce mouvement, mais ceci ne signifie pas qu’ils n’ont pas fait preuve de créativité, Ahmed Chawqî, « le prince des poètes », en est l’illustration. Le premier poète, me semble-t-il, chez qui cette question figure expressément comme volonté ferme est Khalîl Mutrân (m. 1949), influencé sans aucun doute par Sami al-Bârûdî dans sa fidélité à la musicalité et à la métrique classiques, mais le sera autant, sinon plus, par le romantisme français.

C’est à ma connaissance le premier poète de notre époque qui appellera au renouveau de la poésie arabe en s’inspirant du romantisme, dans sa version française, après son séjour en France. C’est ce poète qui a ouvert la voie aux transformations qui vont suivre en poésie. Le renouvellement proposé par Khalîl Mutrân et sa poésie rencontreront un franc succès car il est resté dans le même temps fidèle à la structure traditionnelle de la poésie et la langue arabes, si bien qu’aujourd’hui il est considéré comme faisant partie des classiques.

Son romantisme, dans le contenu, se caractérise naturellement par l’expression sincère de la sensibilité, la liberté par rapport au despotisme (de l’empire Ottoman notamment), la souffrance et la nature. Il a aussi été soucieux de respecter, dans la forme, l’unité du sujet traité dans ses poèmes, c’est-à-dire que les vers doivent désormais s’inscrire dans un ensemble cohérent et systémique (c’est à partir du début de ce siècle que l’on commence à reprocher à la poésie classique de faire succéder vers et thèmes relativement indépendants les uns des autres dans un même poème, un défaut selon les contemporains).

Ce souci de la sincérité, l’expression des sentiments les plus intimes du poète et l’unité du thème traité vont inspirer des poètes et critiques littéraires comme Chukrî, Al-Mâzinî et Al-Aqqâd (m. 1964) à partir des années 1920. Ces poètes forment ce que l’on appelle « l’école du Diwan » s’inspirant cette fois-ci sensiblement du romantisme Anglais, une école qui s’en prendra violemment au classicisme de l’école de la revivification. Si Mutrân n’a pas introduit de réelle modification dans la structure de la métrique, c’est avec ce nouveau courant qu’on constatera les premières modifications dans la forme et le style de la poésie arabe, puisqu’ils s’autoriseront la variation des rimes en poésie arabe.

Le changement des rimes dans un même poème est présent en poésie européenne, et est considéré comme un défaut par les « anciens ». Al-Mâzinî, lecteur assidu du romantisme Anglais, critiquera avec véhémence le style plutôt classique de Hâfiz Ibrâhîm, de même que Al-’Aqqâd s’en prendra avec autant de sévérité à Ahmed Chawqî, lui reprochant le manque de sincérité dans les sujets traités dans sa poésie, l’absence du « moi » dans ses poèmes et sa fidélité aux « carcans » du classicisme de la poésie arabe. Leur principale critique est qu’ils « ne se distinguent pas assez des anciens ».

Ils préfèreront l’expression de sentiments tels que la déréliction, la mélancolie, la détresse, l’angoisse, la souffrance, le pessimisme, la perplexité dans un monde étrange et énigmatique…on n’est pas loin de ce qu’on avait appelé en France « le mal du siècle » ou « le vague des passions » selon l’expression de Chateaubriand.

Le romantisme Anglais cette fois-ci, bien plus que le romantisme Français, sera leur principale source d’inspiration dans les thématiques traitées, leur donnant le droit de s’appeler « la nouvelle école » et « le nouveau mouvement » (selon l’expression de Aqqâd), rompant dans une certaine mesure avec « l’ancienne poésie ». On voit donc bien que la question du renouveau se présente cette fois-ci dans le rapport à l’Autre, à la littérature occidentale en l’occurrence. À y regarder de plus près, la « nouveauté » n’est plus exactement ce qui diffère de l’ancien, elle vise autant la rupture avec l’ancien que l’imitation de l’Autre. Et cette compréhension de la dialectique ancien/nouveau est, sans jeu de mots, tout à fait nouvelle !

III/ Existe-t-il un romantisme en poésie arabe ?

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Les ouvrages d’histoire et de critique littéraires sont unanimes : Kh. Mutrân, l’école du Diwân et l’école Apollo se sont de façon très significative inspirés du romantisme européen (Français et Anglais pour l’essentiel). En quoi consiste par exemple le romantisme Français pour qu’il suscite autant d’intérêt et au point de vilipender « l’ancienne poésie » arabe ?  Qu’en est-il de son contenu, de ses thématiques?

Pour Bernard Valette (2009, p. 138), le romantisme exprime en France le « mal du siècle », « une rupture radicale contre le classicisme », le tumulte de la passion contre la raison, un mélange de tristesse, d’insatisfaction, d’aspiration à un idéal diffus, c’est un ensemble d’attentes déçues ou d’angoisses de plusieurs générations hantées par le traumatisme de la Révolution.

Pour Alain Couprie (2011, p. 69), le « moi », déçu par l’existence et la société, se cherche des points d’ancrage dans la valorisation du sentiment, le rapport à la nature où chaque paysage est un état d’âme, la recherche de la plénitude et l’exploration de l’intériorité. Qu’en est-il de sa langue ? Le romantisme vise aussi à se libérer de toute forme de contrainte, y compris sur le plan du langage. Dans son Essai sur les classiques et les romantiques, Cyprien Desmarais (1824) se demande « comment la langue et le génie de la langue resteront-ils stationnaires, lorsque les mœurs, la politique et tout l’ordre social, à qui la langue sert d’expression, se portent en avant ? ».

La préface de Cromwell de Victor Hugo est l’un des manifestes les plus populaires du romantisme en France. Il écrit à propos de la langue : « c’est en vain que l’on voudrait pétrifier la mobile physionomie de notre idiome sous une forme donnée (…). Les langues ne s’arrêtent plus. Le jour où elles se fixent, c’est qu’elles meurent ». Il remet en cause le vers trop rigide, assouplit l’alexandrin, et comme il l’écrit dans ses Contemplations en répondant aux accusations, « j’ai jeté le vers noble aux chiens noirs de la prose », « disloqué ce grand niais d’alexandrin », et « mis un bonnet rouge au vieux dictionnaire », c’est-à-dire dire qu’il a en quelque sorte démocratisé la poésie contre les carcans de la langue noble du classicisme. La poésie classique, comme le notait déjà Madame de Staël dans son De l’Allemagne, est « celle des anciens ». Et le classicisme de façon générale, comme le note Stendhal dans le chapitre 3 de son Racine et Shakespeare à propos des peuples, est celui « qui donnait le plus grand plaisir à leurs arrières grands-pères ». Le clivage entre anciens et modernes, présent sous forme de querelle, est donc assez clair.

Une fois les grandes lignes du romantisme Français présentées, je voudrais soumettre aux lecteurs quelques questions très simples : est-ce que la culture poétique arabe a ignoré la nature, l’affirmation de l’individualité du poète et l’expression des sentiments les plus intimes au point de devoir se tourner de cette façon vers le romantisme Français ?  Peut-on dire que la métrique d’Al-Khalîl, avec toute sa variété, était un obstacle pour exprimer ces états d’âme ? Est-ce que le XIXeme siècle européen présentait exactement les mêmes caractéristiques que celui des pays arabes ? Les arabes ont-ils connu le même « traumatisme de la Révolution » ?

Plus grave à mes yeux, est-ce que la langue arabe présente les mêmes obstacles ou « contraintes » ou « carcans » que la langue française ou anglaise?! Les arabes ont-ils connu la même « querelle des anciens et des modernes » (Boileau versus Perrault) pour devoir reproduire ce clivage de façon aussi artificielle en littérature arabe, comme l’a fait T. Hussein ? La littérature arabe présentait-elle en elle-même les germes de cette opposition entre classiques et modernes, romantiques en l’occurrence, ou bien cette opposition a t-elle été dictée de l’extérieur ? Autant de questions qu’on peut se poser.

IV/ Renouveau ou course à l’échalote ?

Ce souci de vouloir s’inspirer à tout prix de la littérature occidentale, un souci érigé en credo, plongera de nombreux poètes arabes dans une course interminable à l’imitation de la littérature étrangère, et en altérant considérablement la critique littéraire arabe, devenue incompréhensible pour les spécialistes eux-mêmes ! C’est que la question du renouveau devient peu à peu un projet, alors qu’il se vivait autrefois dans la spontanéité.

Le renouveau dans la poésie dite « classique », avant d’être un discours, était un acte ! On est désormais face à une course à l’échalote qui consiste à départager qui réussira mieux que d’autre à renouveler en s’affranchissant de « l’ancienne poésie », de ses techniques surtout jugées extrêmement contraignantes. Comme si les anciens, particulièrement créatifs comme je l’ai montré plus haut, n’étaient pas soumis aux même règles de la langue arabe et la métrique d’Al-Khalîl.

L’un des « partisans du nouveau », comme T. Hussein par exemple, véhicule l’idée que la poésie arabe présente des obstacles au développement de l’épopée et du drame, contrairement à la prose, beaucoup moins contraignante. Le plus étrange dans cette course est que chaque mouvement accusera ensuite ses successeurs parmi les nouvelles générations de trahir les règles de la poésie arabe, et de sortir de la communauté des poètes.

C’est ainsi que Al-’Aqqâd, après avoir critiqué pendant de longues années le « conservatisme » de l’école de la revivification, s’en prendra aux jeunes poètes de la « versification libre » (« la poésie libre ») qui émerge à partir des années 1950. C’est que la poésie libre s’est affranchie de façon non négligeable de la métrique classique et des rimes, mais tout en préservant une certaine musicalité.

Pour Al-’Aqqâd, la versification libre veut se libérer de la poésie-même : « De quoi veut se libérer la poésie libre ? Des mètres et des rimes ? Eh bien cela signifie que la poésie veut en finir avec elle-même », assène-t-il. De même que celle-ci s’en prendra à son tour au style de la « poésie en prose » qui apparaît peu après sous l’influence de la poésie occidentale également, au motif que l’on s’éloigne de la nature de la poésie au profit de la prose. C’est aussi le cas de la poétesse iraquienne Nazik El-Malâika, précurseur de la poésie libre, qui s’est montrée très sceptique face à la poésie en prose. Pour Nazik, le souhait d’en finir avec les rimes dans la poésie arabe provient de la poésie occidentale, depuis au moins le théâtre de Shakespeare.

Elle ajoute que généralement, ceux qui appellent à mettre fin aux rimes sont des poètes qui commettent trop de fautes en langue arabe, cherchant la facilité. C’est aussi la position du poète Abdelmo’ti Hijâzî, victime autrefois du boycott d’Al-’Aqqâd à cause de sa versification libre, qui écrit dans un entretien que « la poésie en prose arabe n’a apporté aucune créativité, elle est en réalité une autre forme d’imitation ». C’est aussi le cas du poète Mahmoud Darwish qui a exprimé ses réserves et son « malaise » face à la nouvelle poésie ambiante. Salah Abdessabour a même regretté vers la fin de sa vie d’avoir contribué à promouvoir cette nouvelle littérature qui n’a de poésie que le nom.

Ce  qui est regrettable c’est que la poésie en prose arabe s’est avérée d’un degré infiniment plus médiocre et superficiel (songeons à Adonis) que la poésie en prose européenne (songeons à Baudelaire). Ceci sans doute à cause de son manque d’authenticité. À cet égard, cette critique de la poésie en prose de la plume de Charles Dantzig (2005, p. 665) est, hélas, davantage applicable à la poésie arabe qu’à la poésie française : « certains poèmes en prose sont des paresses de poètes qui ne sont pas allés au bout du travail de réduction en cristaux qu’est la poésie ou une inaptitude de prosateurs qui pensent dissimuler le descriptif en le plaçant dans la brume (…). Et comme si la prose n’était pas assez chic, qu’il fallût lui mettre du fard aux paupières (…). Ce sont souvent des contes pas finis, des nouvelles mal foutues, du journal intime déchiqueté, ou de recension de rêves, et d’un art bien pauvre. On croit regarder les restes d’un pique-nique laissé sur l’herbe par le talent qui est parti, sifflotant, cueillir des cerises ».

Quelle position adopter face à cette évolution peu flatteuse de la poésie arabe ? Ou plutôt, quelles leçons devrions-nous en tirer ? Eh bien, j’ai été frappé par la lucidité du critique littéraire libanais Jihâd Fâdil. Pour finir, je lui laisse la parole que je restitue à partir de son excellent ouvrage, dont la lecture est plus douce que le miel ! « Qadâyâ Achi’r Al-hadîth, 1984» (Questions de la poésie moderne). « Il n’y a de poésie arabe que dans le cadre de la poétique de la langue arabe, et il n’y a de modernité que dans la réalité locale du poète, et de sa relation avec sa tradition, son histoire et sa terre » (p. 16). « La modernité ne signifie pas implanter par la force un genre littéraire ou poétique étranger » (p. 17). « Le renouveau est un saut dans la poésie arabe, non pas dans l’inconnu, c’est une renaissance du passé, pas son déracinement » (p. 25). « Le renouveau est une faculté, pas un souhait ou une envie (…), le renouveau est l’acte de renouveler, c’est la réalisation du renouveau dans le réel poétique» (p. 26). « Qui d’entre nous, jeunes poètes, a lu le Coran ou l’a appris par cœur ? Comment un poète arabe peut-il s’adonner à la poésie sans avoir lu le Coran ? (…) musulmans ou chrétiens. Car le Coran demeure encore la voie indispensable pour quiconque souhaite maîtriser la langue arabe ou entrer dans le monde de la littérature » (p. 30-31). « Comment un poète ou un écrivain souhaite renouveler dans l’usage de la langue alors qu’il ne maîtrise même pas les secrets de la langue ? » (p. 32). « Le révolutionnaire est celui qui au nom de l’amour pour sa tradition renouvelle pour que sa tradition reste vivante et fraîche. Quant au dissident, c’est celui qui déclare la mort de sa civilisation et sa tradition en se précipitant vers les librairies parisiennes pour chercher un poète français moderne afin de l’imiter au nom de la modernité » (p. 39). « Qu’est ce que la modernité sans spécificité ni couleur locale ? » (p. 44). « Pas de modernité sans esprit, ni identité » (p. 76). « Le vrai poète est celui qui ouvre son cœur et son esprit vers son histoire et sa culture en souhaitant leur ajouter de sa personne, et non pas en finir avec elles. C’est celui qui se considère comme le prolongement de la grandeur de la poésie arabe, non pas son rejet (…) est-ce que le poète renouvelle à partir de rien ? » (p. 47). « La tradition du renouveau en Occident est que le rénovateur montre et prouve d’abord sa capacité à maîtriser l’ancien style qu’il souhaite dépasser. Picasso avant d’adopter la méthode abstraite, il a dessiné dans un premier temps selon la voie classique et a montré qu’il était compétent dans ce domaine » (p. 48).

« Le véritable révolutionnaire ne vilipende pas l’ancien, pour lui le début de la modernité n’est pas seulement la compréhension de l’ancien, mais la parfaite maitrise de ses fondements » (p. 75). « Le poète anglais « Eliot » avait une connaissance profonde et large de sa tradition poétique, et dans le même temps très amoureux et respectueux de ses qualités. Les critiques littéraires anglais n’acceptent aucun nouveau critique s’il n’a pas présenté une étude originale sur Shakespeare et sur la tradition, prouvant sa maîtrise du métier » (p. 79). Je laisse au lecteur le soin de faire le parallèle avec le champ théologique. Comprenne qui pourra…

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