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Qui veut s’abonner à Al-Qaïda Magazine ?

Intox. Un mystérieux document, consultable depuis une semaine sur Internet, est présenté comme la nouvelle publication médiatique du groupe Al-Qaïda. Rédigé en anglais, ce magazine en ligne serait destiné à radicaliser les musulmans occidentaux. Décryptage sur les tenants et aboutissants d’une grossière tentative de désinformation.

Al-Qaïda ne connaît pas la crise. Mardi 29 juin, un périodique de 67 pages a été gracieusement mis en ligne. Son titre : Inspire. La couverture indique que le magazine serait publié, via la groupe media Al-Malahem, par « Al-Qaïda dans la pénisule arabique », l’organisation issue de la fusion des mouvances saoudiennes et yéménites du réseau terroriste. S’adressant explicitement au « lectorat musulman anglophone dispersé de la Oumma », l’éditorialiste anonyme prétend vouloir, à la fois, lutter contre « la déconstruction moderne du Djihad » et faire du musulman « un djihadiste dans la voie d’Allah ».

On y trouve également, en exclusivité mondiale, des « messages retranscrits » des fugitifs permanents du gotha terroriste : ainsi, Oussama Ben Laden aurait confié aux bons soins de la rédaction des journalistes djihadistes un texte intitulé « La manière de sauver la Terre » tandis que le numéro deux d’Al-Qaïda, Ayman al-Zawhiri, se contente, plus sobrement, d’adresser son « message au peuple du Yémen ».

Problème  : le PDF est illisible. Seules les trois premières pages, comprenant la couverture, la table de matières et l’édito, sont visibles. Si l’hypothèse d’un virus informatique ayant corrompu le document n’est pas à exclure, certains informaticiens penchent plutôt pour l’explication d’une mise en ligne volontairement incomplète, dès l’origine, du magazine.

American Pravda

Présenté comme authentique par les autorités américaines, le document a dès lors été considéré comme fiable par la plupart des médias occidentaux : CNN, Fox News, le New York Times, le Washington Post, ainsi que, pour la France, le Figaro et Slate.fr, tous n’ont émis aucun doute, se contentant de rapporter la parole officielle, sans s’interroger sur la source originelle de l’information. Tout au plus, l’Associated Press évoqua l’identité du groupe d’experts, dénommé SITE, qui aurait repéré le document en circulation sur les forums djihadistes.

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Qu’est-ce que SITE ? Il s’agit d’une organisation, fondée en 2002 et se présentant comme un centre d’analyse de la menace terroriste islamiste. La structure est dirigée par Rita Katz, Américano-Israélienne d’origine irakienne, qui dit vouloir consacrer tout son temps à traquer les malfrats islamofascistes grâce à Internet. Son objectivité sur le sujet peut prêter à caution. Le père de cette analyste avait été condamné à mort par la justice irakienne pour espionnage au profit d’Israël. Par la suite, la jeune femme s’est exilée à Tel Aviv où elle a décidé de s’engager dans l’armée israélienne. Partie en 1997 aux Etats-Unis, elle se consacre depuis à décrypter la menace terroriste au moyen d’une veille permanente sur le web. En 2007, son groupe connut son heure de gloire pour avoir divulgué en premier une vidéo attribué à un étrange Ben Laden, la barbe teintée. C’est encore Rita Katz qui dévoila, au printemps dernier, une autre vidéo censée démontrer le lien entre la mouvance talibane du Pakistan et l’attentat manqué de Times Square.

Proche des responsables du contre-terrorisme de l’administration Bush, Rita Katz continue aujourd’hui d’instrumentaliser la peur des islamistes, et celle des musulmans qui pourraient le devenir, par la mise en valeur de ce pseudo-magazine. Un article de ce périodique, intitulé « Comment faire une bombe dans la cuisine de sa maman », illustre pourtant, à lui seul, la farce de cette opération de propagande.

Avis aux petits entrepreneurs : en temps de guerre, la désinformation, s’appuyant sur les autorités politiques et des médias peu scrupuleux, est un business florissant.

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