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Que dit vraiment le Coran : Guerre & paix, violence, terrorisme (suite)

La Colombe à l’épée.

“ Le Coran, plus que notre passé, est notre avenir. ”

Bien que nous n’ayons pas pour habitude de rédiger court, l’on nous excusera de la longueur inhabituelle de cet article, mais le sujet, d’importance, ne pouvait faire l’objet d’une brève de minbar. Malgré tout, le présent travail est composé de deux parties distinctes qui peuvent être lues séparément.

Ceci, à vrai dire, fait suite à notre précédent propos « Guerre & paix, violence, terrorisme » et, à nouveau, l’on m’excusera à présent de l’emploi du « Je » ; mais c’est que j’ai été aimablement sommé de m’expliquer. J’aurais, en quelque sorte, commis un crime de lèse-Coran en lisant un verset du Livre à l’envers. Comment ai-je pu soutenir la lecture  : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force. Dieu est avec vous, et il ne laissera pas vaines vos œuvres.” S47.V35 alors que Ibn Kathîr, Az-Zamakhsharî, Al Qurtubî, Ibn ‘Âshûr, et tant d’autres éminents commentateurs à travers les siècles affirment et confirment que ce verset est constamment compris, expliqué et traduit, comme signifiant : “ Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force. Dieu est avec vous, et il ne laissera pas vaines vos œuvres.”  ?

Qu’il n’y ait pas de méprise, l’on ne m’a pas reproché d’être un anti-jihâdiste, un colombophile à la solde des Faucons. Je qualifierais précisément ma faute : « Comment, moi, humble fiente de pigeon, aurais-je pu roucouler sur un autre ton à l’ombre protectrice et tutélaire des statues pétrifiées de nos Ulémas ? Eux, qui depuis mille ans montent la garde aux portes du temple de l’ijtihâd ! » Sur ce dernier point, je préciserais ceci : ces nobles chercheurs ne se savaient être qu’un des maillons pensants de la chaîne de Vérité, et le véritable manque de respect à leur égard est de les avoir statufiés.

Qu’ai-je donc à penser et dire différemment, alors que notre science est de répéter leurs dires ?! Quelle faiblesse que de réfléchir, alors même que le copié /collé nous épargne à présent de longues années d’apprentissage. Un chat armé d’une souris ne devient-il pas ainsi aisément un tigre de science ?! Comment donc, dans ces conditions, oser penser et oser dire ?!

Ceci dit, j’accueille pleinement et positivement ces remarques car, de mon point de vue, elles témoignent d’une certaine existence du dialogue, d’un débat intellectuel en islam.

Mais avant d’en répondre, je poserais quelques questions :

1- Si vraiment le Coran dit que lorsque les musulmans sont en position de force ils ne doivent pas incliner à la paix, alors c’est la guerre ? Dans ce cas, parce que je suis croyant, je me rangerais du coté de l’Empire. Je justifierais alors les politiques expansionnistes Califales qui au nom de l’Islam tant de sang versèrent, et de ceux qui tant veulent encore en verser.

2- Cependant, crime de lèse-Islam à présent ; puis-je me demander si Dieu aurait ordonné à un peuple, les musulmans, de combattre tous les autres sur cette Terre jusqu’à la fin des temps et jusqu’à qu’ils se convertissent tous ? La question n’est donc pas de savoir si je suis un pacifiste, une colombe égarée, mais bel et bien d’imaginer que Dieu nous aurait investi de cette divine mission.

-3 Mais alors comment comprendre que Dieu nous ait dit : “ Si ton Seigneur l’avait voulu, tous les hommes sur Terre eussent été croyants. Alors, sache donc que tu n’as pas à contraindre les gens afin qu’ils croient.” ? S10.V99.

4- Mais alors que signifie : “ Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force…” ?

Il ne s’agirait donc pas d’un combat pour répandre l’Islam mais pour conquérir des territoires ? Lorsqu’un musulman lit ce verset que pense-t-il ? Se dit-il que voilà un conseil fort sage et stratégique, et qu’il convient de se tenir à couvert en attendant d’avoir retrouvé nos forces pour aller bouter l’infidèle ? Le bouter d’où ? De la Terre ? Par Dieu ! Nous avons combattu l’infidèle durant des siècles et à présent nous en serions réduits à visionner « Rambo en Afghanistan » ! Que les hérauts du jihâd sonnent leurs funestes trompettes, que les chantres de l’Islam triomphaliste et conquérant affûtent leur siwâk et pourfendent le mécréant, nous avons trouvé en ce verset une preuve étincelante !

5- Mais encore, dès lors que nous posséderons l’arme atomique, devrons-nous déclencher le méga prosélytisme nucléaire ? Un Hiroshima de la foi pour accomplir le dessein divin ! Et n’objectons pas que Dieu n’a pas voulu que tous les hommes croient….ce serait contradictoire…tout du moins avec nos projets…

6- Ou alors, n’ai-je rien compris ? Nous sommes en position de faiblesse et nous devrions attendre notre heure ? La thèse du complot islamique est donc fondée ! Mais alors, sous nos doctes turbans il y a-t-il des champs de mines, des idées au phosphore, des paroles irradiantes ? Sous nos costumes-cravates d’intellectuels se dissimulerait-il un treillis kaki ? Dans ce cas, un terroriste serait-il le fils d’un théologien ayant anticipé et les kamikazes seulement des impatients ? 

7- Face à la lecture de ce verset que vous défendez, que nous proposez-vous ? Une lecture historisante le cantonnant à un contexte de révélation ? Mais je ne suis pas d’accord : tout verset du Coran est un message universel et intemporel, et un milliard de musulmans pensent comme moi.

8- Ou alors, un moratoire ? En attendant quoi ? Que nous soyons en position de force ?

9- Les Imâms, les Savants, les Théologiens, les Intellectuels, n’auraient-ils donc aucune responsabilité ? Mais nous, les musulmans ordinaires, disons que leur lecture les engage et nous engage. Nous disons que le cas présent cet engagement, on l‘aura compris, mène droit à la confrontation et maintient un esprit de dominateur ; Or, il n’y pas de pires tyrans que ceux qui ont été frustrés de leur faiblesse.

10- Quel choix face à cette théologie de guerre ? Le silence ? La discrétion ? L’expectative ? Le double discours ? L’autruchisme ? Soyons responsables, par Dieu ! Osons affronter la réalité de notre héritage.

11- Croyons-nous que l’on puisse prétendre penser l’islam sans réformer les visions du passé ? Que faut-il donc attendre ? Un miracle ? Ou bien que nous abandonnions une partie de notre Coran, contraints et forcés ?

Beaucoup de questions pour une seule réponse : Il y a urgence à relancer la réflexion et le dialogue, à cesser de nous empêtrer en certains acquis séculiers assenés comme des vérités révélées. Chaque musulman est en réalité un acteur de sa religion, il la construit ou la détruit. Chaque musulman est un acteur de ce monde, il le construit ou le détruit. 

A ma modeste contribution, le cas de ce verset litigieux devrait nous permettre de mesurer concrètement le chemin et les enjeux d’une lecture juste du Coran, tout comme il nous aidera à comprendre comment l’on peut trahir ou servir le Texte. Il me semble que réside là la clef essentielle du devenir des musulmans, établir une juste relation, de cœur et de raison, à leur Livre.

Partie I : Que dit donc réellement ce verset  ?

Je présenterais ma démonstration en cinq points en espérant arriver à en rendre digeste la nécessaire technicité… c’est à ce prix que l’on peut espérer comprendre certaines difficultés du Coran.

Nous rappelons en note ces cinq axes de notre méthodologie exégétique,[1] cette étude les mettra concrètement en œuvre. De même, nous reporterons en note les transcriptions des originaux et certaines précisions grammaticales.

Ainsi donc, nous avons :

“Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”S47.V35.
Versus
“ Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force…” S47.V35.

1- Etude du texte :

Cette première étape de la démarche exégétique est primordiale, mais elle est aussi la plus ingrate, ce dont je m’excuse. Bien évidemment nous parlons du texte arabe et, pour simplifier, il est possible de ne s’intéresser qu’au segment souligné dans le texte du verset, véritable objet du litige :

فَلَا تَهِنُوا وَتَدْعُوا إِلَى السَّلْمِ وَأَنْتُمُ الْأَعْلَوْنَ وَاللَّهُ مَعَكُمْ وَلَنْ يَتِرَكُمْ أَعْمَالَكُم.ْ

Ce segment se lit : « fa tahinû wa tad‘û ilâ-s-silm ».

C’est ce passage qui, nous dit-on, est compris par tous les ulémas et traduit par tous les traducteurs comme signifiant : “Ne faiblissez pas [fa lâ tahinû], et n’appelez pas [wa tad‘û] à la paix.” Rapidement, mentionnons que « silm » signifie « paix ».

– Le premier verbe « tahinû », « faiblir », est incontestablement marqué par la négation «  lâ », lâ tahinû , ce qui signifie sans aucun doute : « ne faiblissez pas ».[2]

– Le deuxième verbe «  tad‘û  », « appeler », n’est précédé que de la préposition de liaison « wa », et il n’est marqué directement par aucune négation ou autres prépositions grammaticales. Cependant, ce verbe d’après sa graphie « تَدْعُوا », «  tad‘û  », semble conjugué sur le même mode que le verbe « tahinû »[3] et là réside précisément la difficulté principale de ce verset. En effet, à cause de l’absence de préposition devant ce verbe «  tad‘û  » la phrase ne se comprend pas directement et, conséquemment, sept hypothèses de lecture au minimum, et non pas une seule comme on le prétend, peuvent être proposées afin d’en préciser la structure grammaticale et le sens  :

a)- La première hypothèse postule que la négation marquant le premier verbe, « tahinû », gouverne aussi en sous-entendue le verbe « tad‘û ». On lirait alors comme ceci : « fa lâ tahinû wa [] tad‘û » ce qui se comprend : “Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix”, le [] sous-entendu négativant alors le verbe « appeler ». Cette possibilité est grammaticalement correcte, mais, il resterait à prouver que cette négation, un ordre pouvant devenir un interdit, soit réellement sous-entendue. Prétendre qu’un verbe, un mot, une préposition, sont sous-entendus en un texte doit reposer sur des éléments probants, et ce, d’autant plus, lorsqu’il s’agit de la « Parole » de Dieu.

Ce cas de figure est pourtant le plus fréquemment retenu, et l’on cite généralement l’avis de Az-Zamakhsharî, philologue de la fin du IVème siècle de l’Hégire, mutazilite, mais unanimement reconnu pour sa haute compétence en la matière. Effectivement, il mentionne cette possibilité comme grammaticalement probable et valide cette lecture, mais sans pour autant fournir de preuves à cette hypothèse.

b)- La deuxième hypothèse suppose que le verbe « tad‘û » est au subjonctif et que la particule gouvernant ce subjonctif, elle aussi sous-entendue, serait « in ».[4] Dans ce cas l’on comprend alors : “ Ne faiblissez pas, et si vous appelez à la paix quand vous êtes en position de force [sachez que] Dieu est avec vous…” La possibilité de faire la paix est ici clairement indiquée.[5]

Comme précédemment, cette deuxième possibilité grammaticale est tout aussi correcte, et le même Az-Zamakhsharî la signale clairement en son tafsîr. Mais, curieusement, lorsqu’on fait mention de cet auteur de référence cette citation est tronquée[6] ! J’ajouterais que d’autres prépositions régissent le subjonctif : ainsi si l’on suppose que la préposition sous-entendue serait « li », ce que rien selon cette logique n’interdit, on obtient alors : “Ne faiblissez pas, afin que vous puissiez appeler à la paix lorsque vous êtes en position de force…” D’autres possibilités seraient tout aussi théoriquement envisageables en fonction des prépositions choisies.

c)- La troisième hypothèse de lecture est citée par Tabari, le grand commentateur de la fin du IIIème siècle de l’Hégire, respecté spécialiste de la langue coranique. Après avoir rappelé la première hypothèse, il mentionne que le verbe «  tad‘û  » pourrait tout aussi bien être au subjonctif.[7] On supposer en cas que la préposition sous-entendue étant alors généralement « an ». D’autres exemples coraniques de cette particularité sont bien connus comme par exemple en : S42.V35. L’on doit alors comprendre ainsi : “ Ne faiblissez pas, et que vous appeliez à la paix quand vous êtes en position de force [sachez que] Dieu est avec vous …” Le sens au final est identique à la lecture précédente.

d)- La quatrième hypothèse est aussi citée par Tabari. Il mentionne ainsi l’avis de Ibn Zayd, commentateur du Coran de la génération dite des Suivants, qui explique le verset en spécifiant que le premier verbe est une négation : « ne faiblis pas », et le second une affirmation : « appelle à la paix  ». On notera que Ibn Zayd estime que ces deux verbes, semblant pourtant à la deuxième personne du pluriel ( ne faiblissez pas….appelez…), doivent être compris à la deuxième personne du singulier, le sujet étant ici le Prophète SBSL. Le phénomène est connu, le Coran représente un état de la langue arabe bien antérieur aux normalisations grammaticales du IIème siècle, et le texte coranique comporte de nombreuses particularités grammaticales, accord des verbes, des temps, des pronoms, etc. qui au regard du canon de la langue arabe postérieur seraient des ‘incorrections’. Selon l’avis de Ibn Zayd ont lit alors : “Ne faiblis pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”

e)- La cinquième hypothèse est due aussi à Tabari. Il s’agit en fait d’un autre cas de ce que Tabari nomme subjonctif de substitution et il paraphrase le verset comme suit : « Ne soyez pas faibles à leur égard, et vous les appelez (ou tu les appelle) à la paix et à la conciliation. »[8] Signalons qu’une particularité orthographique de la langue arabe empêche de savoir si Tabari a voulu dire « appelez-les » ou « appelle-les », cette dernière possibilité étant directement liée à celle évoquée par Ibn Zayd.[9] A la note 8 nous montrons qu’au final le verbe appeler est en ce cas l’équivalent d’un impératif faible. On traduit alors selon l’accord retenu le verset de deux manières :

“ Ne faiblissez pas, et appelez à la paix…” et c’est cette solution qui semble avoir été retenue par le Professeur Hamidullah ainsi que par M. Gloton.[10]

“ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix…” et il s’agit là de la traduction que j’ai personnellement retenue.

Concernant cette dernière possibilité de traduction et afin que les arabisants n’en perdent pas immédiatement leur latin et leur sang-froid, nous aurons parfaitement noté le changement de pronom personnel. Mais, pour ne pas alourdir l’exposé, nous expliciterons ce fait à l’avant dernier point de la partie III.

Les quatre dernières propositions offertes par l’éminent Tabari pourraient nous suffire comme justification. Ceux qui voudront arrêter là leur lecture le peuvent, l’argument d’autorité satisfaisant généralement les chercheurs. Mais, face en réalité à plusieurs possibilités, sur quels critères placer à la plus haute marche du podium la bonne solution ?

A vrai dire, l’argument d’autorité et méthodologiquement faible, si ce n’est nul, et ce que je ne reconnais pas aux autres je ne peux l’accepter pour moi-même. Ainsi, il conviendra d’expliquer par quels critères rigoureux et concordants l’on peut prouver la validité d’un choix. C’est donc là l’objet de la suite de notre méthodologie exégétique.

En toute rigueur, au terme de cette première étape essentielle nous pouvons faire le bilan suivant : Sept propositions de compréhension et donc de traduction sont à retenir :

1 – “Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force…”

2 – “ Ne faiblissez pas, et si vous appelez à la paix quand vous êtes en position de force…”

3- “Ne faiblissez pas, afin que vous puissiez appeler à la paix lorsque vous êtes en position de force…”

4 – “ Ne faiblissez pas, et que vous appeliez à la paix quand vous êtes en position de force…”

5 – “ Ne faiblis pas et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”

6 – “Ne faiblissez pas, et appelez à la paix quand vous êtes en position de force…”

7 – “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”

Ainsi : Il n’existe pas, comme on le prétend, une seule lecture possible mais bien sept. Grammaticalement toutes ces hypothèses ont la même valeur théorique. De plus, et en résumé, cette première approche ne produit au final que deux sens, mais opposés ou contradictoires : Appeler à la paix ou pas ? On notera qu’une seule possibilité sur sept s’oppose ici au principe de paix

Cependant, nous avons fait remarquer que l’on ne disposait pas d’éléments permettant d’affirmer que telle ou telle préposition était sous-entendue pour expliquer la forme et le statut apparents de notre verbe « tad‘û  », « appeler ». Ainsi, les trois dernières propositions (5-6-7) sont-elles largement préférables puisqu’elles ne font pas recours à ce procédé, elle ne se permettent pas de supputer sur un éventuel sous-entendu de Dieu. Nous développerons cette idée au dernier point de la deuxième partie.

Malgré tout, il convient encore de rechercher en poursuivant nos étapes exégétiques quels autres éléments de compréhension nous permettront de départager ces deux possibilités théoriquement envisageables.

2 – Etude des « circonstances de révélation » :

 Il n’est connu aucune « circonstance de révélation » authentifié pour ce verset, ni pour aucun autre de cette sourate. Cela rend au demeurant la datation de cette sourate difficile. Elle apparaît toutefois sans aucun doute Médinoise, sa thématique en atteste : dogme, eschatologie mais aussi combat et, dit-on, une problématique liée aux hypocrites. De plus, le style et le rythme la rendent proche des sourates de la dernière période Mecquoise. Une hypothèse classique en ferait une révélation située après la bataille de Badr, en l’an 2 Hégire, mais sans réellement disposer d’éléments pour l’affirmer. Au final, il est raisonnable de situer cette sourate dans les premières années de l’Hégire.

Nous ne pourrons donc pas nous aider de l’étude de « circonstances de révélation » pour résoudre notre problème.

3- Indications prophétiques, la Sunna :

Bien qu’il n’y ait pas de « circonstances de révélations » authentifiées connues, nous pouvons rechercher dans la Sunna un exemple prophétique qui nous permettrait de fixer une orientation aux possibles interprétations exégétiques pour l’instant encore en présence. De nombreux exemples tirés de la Sunna prouvent que le Prophète SBSL fut toujours à la recherche de la paix et de la conciliation. Nous n’en citerons qu’un, parfaitement adapté au propos de ce verset :

Deux ans après la signature du traité de Hudaybyya (An 6), qui en apparence avait semblé être un affaiblissement, les musulmans purent réunir une armée considérable pour l’époque, et que l’on dit composée de 10.000 hommes. Ainsi, lorsque le Prophète SBSL marcha à la tête de cette armée pour conquérir la Mecque, et s’il avait appliqué la lecture proposée classiquement pour notre verset, il aurait du écraser ses ennemis de 20 ans du fait de sa supériorité numérique. Or, il profita de l’impression causée par sa « position de force » pour négocier sans combat une reddition accordant « paix » et protection à tous les habitants de la ville. Il est donc clair qu’en ce cas son agissement fut en parfait accord apparent avec la compréhension du verset ainsi formulée : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”. Chacun sait, et là réside l’argument, que le Prophète SBSL n’agissait qu’en pleine conformité avec la Révélation. Notons que le choix du singulier « appelle  » se justifie ici parfaitement du fait que cette décision relevait seulement des prérogatives du Prophète SBSL.

Il y a donc ici une indication puissante en faveur de l’hypothèse : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”

L’on pourrait toutefois objecter que nous ne savons pas si le Prophète SBSL a agi en fonction du principe général contenu en ce verset ou si, sur injonction divine, il aurait opté pour une autre stratégie à cette occasion. Bien que cette hypothèse soit par trop spéculative, nous la prendrons en compte par souci de rationalité méthodologique. Nous noterons cependant que sourate “ al fath ” « la Victoire », S48, annonçant la prise de la Mecque est immédiatement située dans l’ordre du Coran après notre V35 (S47 ne comportant que 38 versets) et cela ne peut être le fruit du hasard. 

Poursuivons notre analyse.

4- Etude du contexte littéral  :

Cette sourate est logiquement de tonalité très générale. Les 38 versets qui la composent ne mentionnent textuellement et explicitement aucun événement repérable avec certitude. La construction est très particulière, passant alternativement d’un verset s’adressant aux croyants à un autre traitant de dénégateurs sans autres précisions.[11] 

1- Classiquement, nous l’avons dit, il nous est proposé une lecture circonstanciée de cette sourate situant le discours coranique après la bataille de Badr et en vue des préparatifs de celle de Ohod. On aboutit ainsi au V33 où il est stipulé que les véritables croyants seront ceux qui auront accepté le combat en obéissant à Dieu et à son Prophète. Dans ce contexte notre V35 dit : « ne faiblissez donc pas  » conseil à comprendre comme un encouragement à affronter l’armée Qurayshite qui préparait la guerre (Ohod). La suite : « n’appelez pas à la paix » signifie dans ce contexte d’inquiétude légitime chez les musulmans à Médine « ne cherchez pas à cette occasion à pactiser afin d’éviter ce combat sur lequel vous avez des inquiétudes alors que je vous L’ai prescrit (voir V20 et 33) ». Pour les rassurer, Dieu leur dit alors : « [Je vous garantis] que vous êtes [malgré les apparences] en position de force (ou en une position plus élevée aux yeux de Dieu] car Dieu est avec vous et il ne laissera pas perdre vos actions. » V35.

Cette lecture projetée sur des événements historiques particuliers conserve donc la compréhension « classique » : “ Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force…”. Mais, cette historisation aboutit au final à valider un sens restreint et particulier, totalement circonstancié, et qui écarterait de fait toute interprétation généralisable jusqu’au-boutiste. En effet, ce sens circonstancié peut se comprendre en sa portée générale comme signifiant : Le premier principe est de ne jamais être en position de faiblesse, le deuxième principe est qu’en certaines circonstances il est préférable d’aller au combat même si les apparences laissent à penser que l’ennemi est plus fort. On comprend parfaitement, qu’en ce cas de figure, refuser le combat ce serait capituler. Mais je ne pourrais valider cette lecture du contexte littéral et son résultat pour deux raisons :

a)- Elle manque singulièrement de preuves : rien dans le texte ne permet explicitement de prétendre qu’il s’agit là d’un discours en lien avec les préparatifs de la bataille de Ohod.

b)- Rappelons que Ohod fut un demi-succès ou une demi-défaite et, dès lors, un tel conseil aurait été pour le moins aléatoire et la prédiction de Dieu incertaine, ce qui ne se peut.

2- Conformément à l’absence d’indication temporelle de cette sourate, l’on doit donc en faire une lecture de type général. Il s’agit alors d’un discours s’adressant aux musulmans sur la nécessité de combattre dès lors qu’ils sont menacés. En effet, les premiers mots du premier verset sont : « Ceux des dénégateurs qui s’opposent à la voie de Dieu » (V1) sans autres précisions. C’est le V20 qui, prescrivant le combat,[12] permet de comprendre que l’opposition de ces dénégateurs (kâfirûn) est de nature militaire. Or, nous retrouvons exactement ces mêmes mots « Ceux des dénégateurs qui s’opposent à la voie de Dieu » au V32, puis au V34. Le propos de la sourate s’inscrit donc avec cohérence dans le cadre coranique général d’un jihâd défensif. Par conséquent, le V35 permet en ce cas une double lecture :

a)- Selon la lecture « classique » du V35  : “ Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force…”. Ceci signifierait qu’en cas d’agression militaire préalable, la réponse armée doit être menée jusqu’à la défaite des agresseurs, ce qui se comprend logiquement et n’est en rien un appel à la guerre totale.

b)- Selon l’autre signification possible : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”, la cohérence du discours n’en est pas pour autant rompue ; une fois les hostilités maîtrisées il est conseillé de rechercher une négociation de paix pour stopper le plus rapidement le conflit ; l’objectif final n’étant pas la recherche de la guerre mais de la paix.

Nous aurons donc pu observer que l’ensemble des sens dégagés par l’analyse littérale est en faveur, selon des modalités différentes, de la recherche de la paix et non pas de son refus conquérant.

5- Etude de la cohérence coranique :

Ce temps est essentiel. Outre que la raison l’impose et le nécessite, le Coran en stipule lui-même le principe : “N’examineront-ils donc pas avec discernement le Coran ? S’il provenait d’un autre que Dieu ils y retrouveraient certainement maintes contradictions. ”S4.V82. Cette injonction fonde pleinement une recherche de cohérence interne sur l’ensemble du texte coranique, et elle lui confère une importance exégétique capitale.

Or, nous lisons dans le Coran, en un même contexte d’agression possible à l’égard des musulmans : “Rassemblez contre eux vos forces…mais s’ils inclinent à la paix, alors fais de même, et place ta confiance en Dieu…” S8.V60-61.

Selon ce principe de cohérence coranique, la lecture de V35 : “ Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force…” est contradictoire avec le verset précédent.

Alors que : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…” respecte a logique interne du Coran.

Notons la symétrie de construction et de propos de ces deux versets. Dans les deux cas il est demandé d’être en position de force mais, il est clairement indiqué que l’objectif, la finalité, est la recherche de la paix.

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Cet argument de cohérence est ici hiérarchiquement fort et, combiné à une possibilité grammaticalement correcte et admise, il impose ici de comprendre et traduire notre verset 35 par : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”

Pour être juste, il a été parfaitement perçu l’incohérence résultant de la proposition classique, ainsi a-t-on décidé d’abroger le verset contradicteur (S8.V61) ! D’autres ont cru distinguer en ces deux versets des cas de figure différents, situation n’impliquant donc pas de problème de cohérence. Pour la critique : Cf. infra deuxième partie.

Synthèse :

Nous aurons donc fourni selon plusieurs niveaux d’analyse exégétique (les cinq principes précisés en note 1) des preuves et arguments cohérents et convergents. Cette démarche exégétique rigoureuse aura permis de prouver quelle compréhension, et traduction, nous devons donner à ce verset. Parallèlement, il aura été possible de dégager la seule solution possible parmi les différentes propositions que nous avons discutées. Ainsi, le sens mis en évidence : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force. Et Dieu est avec vous, et il ne laissera pas vaines vos œuvres.” est le seul qui soit compatible à la fois avec :

1) Les données grammaticales et linguistiques. 2) L’analyse contextuelle littérale. 3) La pratique du Prophète. 4) Le principe de cohérence coranique. Soit une parfaite cohésion sur l’ensemble du processus exégétique puisque nous ne disposions pas du cinquième point, les « circonstances de révélation ».

Inversement, aucune des autres propositions ne remplit ce cahier de charge. Et notamment celle considérée comme « classique » : “ Ne faiblissez pas et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force…” qui ne peut conséquemment être validée.

Nous aurons pu concrètement, éléments de comparaison et de démonstration en main, comprendre par quels mécanismes l’on peut induire le sens d’un verset du Coran en fonction de choix préétablis. En l’occurrence, cet exemple illustre tout à la fois une nécessité et une mentalité. Nécessité d’arguments coraniques, et donc théologiques, pour justifier les politiques expansionnistes califales sans cesse demandeuses. Nécessité régulière de mobiliser les musulmans au jihâd, parfois défensif, parfois offensif. Nécessité de recréer l’unité politique de la Oumma autour d’un thème fédérateur lorsque les empires et la Oumma furent menacés de l’extérieur ou de l’intérieur. Mentalité d’une vision islamo-exclusiviste. Mentalité propre à un peuple qui a connu la gloire et le triomphe. Mentalité d’un peuple qui a connu la décadence et ne put sauvegarder qu’un espoir millénariste.

Quoiqu’il en soit, ce verset, comme tant d’autres, ne pourra légitimer la volonté des hommes au nom de Dieu.

Notre démonstration pourrait donc s’arrêter là.

Cependant, pour ceux qui auraient le désir d’aller plus avant, nous ajoutons une deuxième partie dont les données instruisent et confortent notre exégèse et traduction. Notamment, nous y apporterons d’autres informations justifiant que l’on doive traduire le verbe appeler au singulier, « appelle », plutôt qu’au pluriel « appelez », ce qui en soi serait bien la seule singularité de notre traduction…

CONCLUSION.

On l’aura compris, ce n’est point de couper les alif en quatre qui nous préoccupe mais bel et bien les enjeux exégétiques. Affirmer que le Coran nous enseigne de préparer la guerre pour ne pas à avoir à accorder la paix a pu correspondre à une certaine vision du monde et de la politique. Mais, nous l’aurons démontré, cette géopolitique n’appartient pas au Message coranique. L’exégèse du Coran, on le voit, n’est en rien une discipline anodine. Chacun sait, et reconnaît, en tant que croyant, que notre Livre est fondateur et souverain. Toute exégèse du Texte est donc lourde de conséquence. 

Et nous disons ceci :

“ Le Coran, plus que notre passé, est notre avenir.”

Il y a urgence, au temps présent, à ce que nous lisions le Coran autrement que sous la houlette de nos prédécesseurs. Nous devons fournir à nouveau un tel effort exégétique, car il en va de notre devenir en ce monde nouveau. Cela ne signifie pas qu’il faille effacer avec dédain les acquis transmis par les anciens commentateurs du Coran. Il n’ y aurait là qu’une funeste influence d’une modernitude destructrice. Mais, en toute lucidité, et en toute objectivité, force est de reconnaître que le contexte historique ayant donné lieu à certaines de ces lectures est définitivement révolu. Il nous faut donc développer un esprit critique, méthodologiquement fondé, afin de dégager, non pas une exégèse en conformité avec notre réalité, mais une exégèse conforme d’avec le Coran. Cela en toute littéralité, pour la recherche du sens intemporel et universel de la Révélation, sens qui ne peut qu’être, par essence, qu’en parfaite adéquation avec notre situation actuelle.

D’aucuns prétendent « penser le Coran » en le reléguant aux oubliettes de l’Histoire, ce n’est point notre propos. D’autres laissent en suspend les difficultés dont nous avons héritées et proposent un « penser autour du Coran ». Pourrait-il y avoir d’un coté des « nouveaux penseurs de l’Islam », et de l’autre des exégètes coupés de notre réalité depuis des siècles ! Cet état de fait est schizophrénique.

Ou bien cela signifie-t-il que la pensée islamique s’autonomise et que l’exégèse doit être confiée à ceux qui, selon cette logique ne seraient donc pas considérés comme des penseurs ? Cette délégation de l’exégèse des textes par nos intellectuels nous fait courir, d’une part, le risque d’adhérer à un discours déconnecté du Coran, et, d’autre part, conséquence directe, elle programme à terme l’abandon du Coran comme fondement de la pensée islamique.

Il y a urgence, encore une fois, à ouvrir le dialogue et l’effort, l’ijtihâd, dans la plus grande fidélité au Texte et selon des exigences de rationalité et de fiabilités renforcées. Déverrouiller ce cœur dont nous parle le Coran, le cœur sémite, le siège de l’intelligence et de la sensibilité conjointes.

C’est à cette unique perspective, à notre modeste mesure, que nous nous efforçons d’appeler et de participer.

Dr Al Ajamî.

Partie II : Quelques compléments d’informations et de réflexion.

• De l’abrogation.

Al Qurtubî rappelle que ce verset, lu selon l’opinion majoritaire : “ Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix quand vous êtes en position de force…”, abroge, de l’avis de nombreux commentateurs du Coran, le verset que nous avions cité au sujet de la nécessaire cohérence du Coran : “…mais s’ils inclinent à la paix, alors fais de même, et place ta confiance en Dieu…”S8.V61. La cohérence interne du Coran, qui était menacée par une interprétation contradictoire est ainsi promptement rétablie. A ceci près, que ce même Al Qurtubî mentionne, qu’à l’inverse, d’autres ont soutenu que notre verset était abrogé, et ce par ce même V61.S8 ! Il y a en cette auto-annulation l’aveu de l’artifice total du principe abrogeant-abrogé. Sur quels critères décide-t-on du caractère abrogeant ou abrogé ? Encore une citadelle que l’on ne devrait pas approcher ? Je préciserai seulement, que si nous voulions valider le verset censé fonder le principe d’abrogation, S2.V106, ce principe, selon la lettre même de ce verset, serait une prérogative purement divine, et cela se comprend aisément. 

Cet exemple démontre en soi l’arbitraire régnant en ce domaine. Comment pourrait-il en être autrement, alors même qu’aucun verset du Coran ne stipule être l’abrogeant ou l’abrogé d’un autre, et que le Prophète, dont on serait en droit d’attendre que cette prérogative ne relève que de sa seule connaissance, n’a jamais cité en un hadîth authentifié un tel phénomène, et encore moins précisé que tel verset était abrogé ou abrogeant !

User du concept d’abrogeant-abrogé est déjà, pour nous, l’aveu d’une contradiction perçue entre l’interprétation soutenue et d’autres versets s’y opposant, l’arme fatale consistant à déclarer abrogé le verset contradicteur. Je dis bien contradicteur et non pas contradictoire. Sans vouloir d’avantage ici discuter du principe, nous dirons simplement que tout verset déclaré abrogeant ou abrogé est ainsi qualifié par les commentateurs en fonction de leurs propres interprétations et sans aucune possibilité de pouvoir prouver leurs dires par le Coran ou le Hadîth.

Pour être complet, et concernant notre verset, certains ont cherché à contourner l’obstacle de cette abrogation réversible. Ils ont donc bien voulu croire qu’entre S8.V61 et notre S47.V35 les circonstances historiques étaient différentes et que, par conséquent, ces deux versets traitaient de sujets différents. De plus, dans un cas ce serait les ennemis qui demandent la paix, et dans l’autre les musulmans qui ne doivent pas la demander. Que l’on m’explique sur quel fil de sabre se situe cette distinction aussi casuistique que déconnectée de la réalité. Comment demander la paix quand on sait que l’adversaire doit la refuser de principe ?!

• De l’argument d’autorité.

Il s’agit d’une pratique classique et traditionnelle consistant à renforcer une opinion admise par la mention itérative d’autorités de référence, un adoubement intellectuel en quelque sorte. Bien souvent, il est le refuge d’une fausse recherche, les avis des commentateurs passés remplaçant à moindre coût un investissement intellectuel personnel. Il nous faudra observer que l’argument d’autorité, méthodologiquement nul, est par contre psychologiquement d’une grande efficacité contraignante. En sa forme extrême ce procédé, qui n’a rien de scientifique, prend la forme de l’ijmâ‘a ou consensus.

Là aussi, la partialité l’emporte de principe et, en notre exemple, il a été soigneusement omis de mentionner comme nous l’avons signalé certains avis cités par Tabari, ou la remarque complémentaire de Az-Zamakhsharî, puisqu’elles sont contraires à l’opinion qui s’imposa. Cet oubli s’explique aussi du fait même de l’argument d’autorité, celui-ci incitant inconsciemment de ne pas chercher plus loin, une autocensure frisant le suicide intellectuel. 

Au sujet de ma traduction, il a été appliqué le même principe en affirmant que toute les traductions donnaient le même sens : « Ne faiblissez pas, et n’appelez pas à la paix  ». Là aussi, partialité ou insuffisance, cela alors même que nous avions cité le Professeur M. Hamidullah ayant traduit : “ Ne faiblissez pas, donc, mais appelez à la paix alors que vous avez le dessus…”. Nous aurons présentement ajouté la contribution de M.Gloton.

 

L’inexistence réelle d’un consensus, même en une temps donné, rend en soi aussi inutile que faux tout argument d’autorité tel que : « Tous les ulémas ont dit » », ou conséquence directe : « Celui qui dit le contraire n’est donc pas un savant », ou conséquence de la conséquence : « Si son avis est différent c’est donc un hérétique  »…sans autres commentaires.

• Ce verset est-il ambigu ?

Il convient à présent de pénétrer plus avant au cœur même de la problématique ; une ambiguïté « ortho-graphique » en ce verset, nous l’avions signalé, qui est le véritable support de la difficulté de compréhension. Et, pour être tout à fait précis, il conviendra d’examiner une subtilité que nous avions laissée volontairement en suspend jusqu’à présent.

Quelques connaissances d’arabe s’imposent pour aborder ce dernier sujet, nous espérons pouvoir exposer la problématique simplement : 

Mais, auparavant, faisons l’observation suivante : D’aucuns pourraient être tentés de penser que ce verset est ambiguë. En effet, nous l’avons vu, il a été proposé plusieurs interprétations que l’on pouvait réduire théoriquement à deux sens contradictoires. Nous pourrions refuser la question, attendu que nous avons démontré qu’une seule possibilité était fondée. Mais, un verset peut-il être ambigu ? Cela n’a pas, pour nous, de sens. Comment Dieu en sa dernière Révélation pourrait-il avoir communiqué un texte comportant des ambiguïtés ?! Nous renvoyons ce débat de fond, faute de pouvoir ici ouvrir ce dossier.

Cependant, notre problématique provient malgré tout à l’origine d’une « ambiguïté » du verset 35 car, comme il n’ y a pas de fumée sans feu, il n’y a pas d’interprétation sans supports. Je le répète, la présence de cette « ambiguïté » d’un type très particulier comme nous allons le constater, ne signifie en rien que le verset soit en lui-même ambigu.

Présentement, l’équivoque provient d’un problème d’écriture, de graphie orthographique plus exactement :

Relisons le segment litigieux en arabe :  فَلَا تَهِنُوا وَتَدْعُوا إِلَى السَّلْمِ , « fa tahinû wa tad‘û ilâ-s-silm ». Nous avions fait observer dans la partie grammaticale que le verbe « da‘â », « appeler  », conjugué « tad‘û », était au cœur du problème. C’est qu’en effet, lue directement sous cette forme, cette phrase ne peut en arabe se comprendre clairement. Le verbe tel qu’il apparaît dans le texte coranique « tad‘û  »,  َتَدْعُوا, a la forme graphique d’un apocopé ou d’un subjonctif à la deuxième personne du pluriel, pluriels qui dans l’écriture de l’arabe sont marqués graphiquement par un alif final. Toutefois, nous l’avons vu, ce verbe nécessitait alors d’être induit par une préposition entraînant un de ces deux modes verbaux (apocopé ou subjonctif), or cette préposition est absente du texte concernant le verbe « tad‘û  ». Autre observation, la graphie de ce verbe évoque celle du premier verbe, « tahinû », « faiblissez », تهنوا, porteur d’un alif final, ce qui laisserait à penser que « tad‘û  » est conjugué lui aussi comme « tahinû » à la deuxième personne du pluriel. Il fut par conséquent logiquement imaginé qu’une telle préposition devait être sous-entendue, ce qui est grammaticalement possible et envisageable ; d’où les diverses solutions et suppositions grammaticales ayant donné lieu à autant d’interprétations y compris opposées en sens. En ces hypothèses grammaticales l’on a majoritairement cherché à conserver le verbe appeler à la deuxième personne du pluriel « appelez » car c’est ce que semble bien témoigner la graphie coranique, َتَدْعُوا ,du fait de la présence du alif orthographique final. Ce choix relève aussi de la recherche d’une interdiction qui, à défaut d’être explicitement mentionnée, le sera alors implicitement.

Tel est donc la nature exacte de « l’ambiguïté » de ce verset.

• Pour quelles raisons ai-je choisi de traduire : «  Ne faiblissez pas, et appelle à la paix  » ?

Nous l’avons dit, il s’agit là de la seule singularité de notre traduction, mais il ne s’agit à vrai dire que d’un détail de puriste, puisque cela ne modifie en rien le sens voulu par le verset. Et même si nous rappelions que Ibn Zayd avait compris les deux verbes, « faiblir et appeler » au singulier, il nous reste à expliciter notre propre choix.

Nous aurons compris que toute la problématique, « l’ambiguïté », provient de la présence d’une simple lettre, le alif porté à la fin du verbe َتَدْعُوا. Cet alif, répétons-le, ne se prononce pas et il ne sert par convention qu’à marquer le pluriel. Or, il s’agit d’une convention d’écriture bien postérieure au Coran. Dans les plus anciens manuscrits, l’usage de la lettre alif, quelque soit sa position dans les mots, est très irrégulier et sans règles sûres. Nous savons tous que le Coran n’est pas descendu tout écrit du Ciel mais que, lorsque les premiers scribes du Prophète, notamment Zayd ibn Thâbit pour Abû Bakr et ensuite Uthmân, et ceux qui lui succédèrent, eurent à mettre par écrit le Coran, ils utilisèrent une écriture archaïque très défectueuse, notamment : pas de points diacritiques, pas de voyelles, et un usage du alif très aléatoire. L’écriture fut progressivement améliorée, les conventions précisées et fixées. Concernant le texte même du Coran, la graphie actuelle remonte à l’édition dite du roi Fouad de 1923. Cette dernière révision, qui avait entre autres objectifs de normaliser l’orthographe de la version dite Hafs, a malgré tout laissé des centaines de « particularités » de ce genre.[13] Le lecteur inattentif ne les relève généralement pas, ou les corrige par automatisme dès lors qu’il est arabophone. Toutes les éditions courantes du Coran sont établies à partir de ce travail de 1923.

Ceci étant, notre recherche nous a conduit à observer dans le Coran des anomalies relatives à l’écriture du verbe « da‘â », « دعا », « appeler » qui donne notre fameux tad‘û. Ces anomalies s’expliquent principalement du fait de l’irrégularité de ce type de verbes que l’on qualifie d’ailleurs de défectueux. Citons un exemple significatif en S70.V17 :

تَدْعُوا مَنْ أَدْبَرَ وَتَوَلَّى  qui se lit « tad‘u man adbara wa tawallâ » et se traduit : « Il appelle celui qui se détourna et se déroba » si l’on traduit le sujet du verbe qui est au V15 par « feu ou Enfer ». Ou bien on traduit aussi par : « Elle appelle celui qui se détourna et se déroba  » si on traduit le sujet (lazâ) par « flamme ». En arabe ce mot est féminin. Toutes les traductions que j’ai consultées concordent, bien que ce ne soit aucunement une preuve, et donne l’accord du verbe tad’û au singulier car, et là réside la preuve, il ne fait aucun doute que le sujet, « feu », ou « flamme »[14] est un et entraîne un accorde du verbe « appeler » au singulier. Pourtant, comme on peut le constater en ce verset, le verbe da‘â, « appeler » a graphiquement une forme plurielle « tad’û », تَدْعُوا ce qui est tout à fait fautif du point de vue des règles d’écriture normalisée mais parfaitement identique au « tad’û », تَدْعُوا de notre verset 35. Il y a donc ici une « anomalie » similaire.

Pour illustrer et confirmer que de manière générale la graphie du alif pose problème dans les transcriptions du Coran, nous pouvons rapidement citer un autre exemple relatif à la mention incorrecte d’un alif en fin de verbe. Le verbe talâ,تلى , « réciter », est en effet du même groupe que le verbe da‘â, et nous lisons :

رَبَّنَا وَابْعَثْ فِيهِمْ رَسُولًا مِنْهُمْ يَتْلُوا عَلَيْهِمْ آَيَاتِكَ وَيُعَلِّمُهُمُ الْكِتَابَ وَالْحِكْمَةَ وَيُزَكِّيهِمْ إِنَّكَ أَنْتَ الْعَزِيزُ الْحَكِيمُ

 “ Seigneur, suscite leur un Messager qui soit des leurs et qui leur récite tes versets…” S2.129.

 De fait, dans le texte arabe, le verbe « réciter » porte un alif final « يَتْلُوا » qui lui confère en apparence une forme pluriel alors, qu’à l’évidence, s’agissant du Prophète, ce verbe devrait s’écrire sous la forme de la deuxième personne du singulier « يتلو » sans alif final. La recherche pourrait multiplier les exemples de ce genre.

Il est donc logique et probable de penser que dans le verset que nous étudions nous sommes dans un cas semblable et que la graphie « تَدْعُوا » est incorrecte. Il aurait donc fallu transcrire « تدعو » sans alif final, donc à deuxième personne du singulier. Ceci justifie en partie notre traduction : « et appelle à la paix ».

Il existe de plus une confirmation complémentaire : Nous avons montré que selon le respect de la cohérence interne du Coran, les versets : “Rassemblez contre eux vos forces…mais s’ils inclinent à la paix, alors fais de même, et place ta confiance en Dieu…” S8.V60-61 avait même signification que notre V35  : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”. Si les sens en sont identiques, ces deux versets sont aussi symétriques structurellement parlant : L’on remarquera dans le premier verset tout d’abord un verbe au pluriel « Rassemblez contre eux vos forces », puis un passage au singulier « s’ils inclinent à la paix, alors fais de même ». Ceci s’explique du fait que si l’effort de guerre est collectif, justifiant un pluriel, la décision et la conclusion de la paix ne peut appartenir qu’au Prophète ou à une autorité ce qui justifie alors l’emploi du singulier. Ceci nous amène à penser qu’il en est rigoureusement de même en notre verset : « Ne faiblissez pas » au pluriel, et « appelle à la paix » au singulier, pour logiquement les même raisons.

• Une dernière réflexion.

Sans vouloir aucunement supputer sur « l’intention » de Dieu, l’on peut toutefois se poser la question suivante : Lorsqu’il s’agit d’interdire une chose -et qui plus est lorsqu’il s’agit d’interdire de rechercher la paix, chose d’importance- pourquoi décider d’une formulation qui ne soit pas totalement explicite ?  Pourquoi donc choisir de formuler cet ordre en recourant à une interdiction sous-entendue, non mentionnée dans le texte ? Pourquoi n’avoir pas fait recours à la négation explicite [] ce qui aurait levé toute ambiguïté, clarté qui s’imposait au vu de l’importance du sujet ?

Or, à l’inverse, cette supposée insuffisance apparente du verset entraîne au moins sept compréhensions différentes et, au final, deux ordres strictement contraires. L’on ne peut vouloir dire en même temps « n’appelez pas à la paix » et « appelez à la paix ». Si l’on suit ce raisonnement de simple bon sens, et si l’on admet que le discours de Dieu peut avoir sûrement des raisons qui nous échappent, l’on ne peut tout de même pas penser qu’Il introduirait Lui-même des ambiguïtés en Sa Révélation, qui plus est sur des sujets d’une aussi grande importance. Vouloir fonder une interdiction en recourant à des indications sous-entendues ne peut être que source de malentendus. L’on peut donc en conclure qu’en ce verset il ne peut y avoir de préposition sous-entendue ; Ainsi, sur l’ensemble des diverses hypothèses de compréhension proposées, une seule est issue d’une telle lecture, c’est-à-dire selon les modalités d’un discours direct grammaticalement correct et pleinement explicite : “ Ne faiblissez pas, et appelle à la paix quand vous êtes en position de force…”

Malgré tout, nous avons parfaitement conscience que cette démonstration ne pourra jamais être totalement suffisante puisque l’historicité du document, le Coran, semble porter définitivement trace de cet alif. Au final, point n’est là l’important.

Mais, d’une part, nous aurons démontré que la compréhension « classique » de ce verset ne reposait que sur un argumentaire faiblement étayé ne résistant pas à l’analyse. D’autre part, nous aurons apporté un nombre conséquent d’arguments cohérents et convergents qui justifient largement que nous retenions une autre possibilité de compréhension. Nous aurons démontré sans conteste et par de multiples voies méthodologiquement probantes que ce verset posait et confirmait des principes coraniques primordiaux :

1- La guerre n’est pas un objectif en soi, mais une nécessité lorsqu’il s’agit d’assurer la défense des musulmans.

2- La force et la puissance relèvent de l’action dissuasive.

3- Corollaire direct de ces deux principes : la paix est l’objectif premier, tout doit être mis en œuvre pour parvenir à cette noble solution.



[1] Je préciserais ici que je n’ai pas pour objectif ni méthode de torturer les versets jusqu’à ce qu’ils finissent par avouer ce que je pense. Tout comme il me parait inconcevable qu’un verset, prétendument au nom de la multiplicité des interprétations fournies, puisse signifier tout et son contraire !
Progressivement, j’explicite sur Oumma ma méthodologie exégétique en la série « Comprendre le Coran ». Mais, pour l’instant, je dirais seulement ceci : Mon présupposé est celui de la neutralité face à l’énoncé du texte. Il s’agit alors d’analyser le signifiant pour passer au signifié, en d’autres termes, lire le texte pour le comprendre. C’est cela, et uniquement cela que nous nommons exégèse, le reste est commentaires. Cette démarche objective repose principalement sur cinq axes participant tous de la littéralité :

  – La sémantique, la lexicographie, la grammaire et la syntaxe.
  – La recherche contextuelle liée aux « circonstances de révélation » authentifiées.
  – Les indications prophétiques, la Sunna authentifiée.
  – L’analyse contextuelle, c’est-à-dire l’environnement textuel où s’inscrit le verset en la sourate.
  – La cohérence du verset étudié sur l’ensemble du propos coranique.

Méthode somme toute classique, mais qui menée avec objectivité et rigueur permet d’extraire le sens voulu par un verset. Ce processus ne possède de valeur que si l’on prend soin de ne pas investir à chaque étape certains présupposés ou acquis, et si l’on ne valide les résultats qu’en fonction de leur cohérence niveau par niveau et transversalement pour l’ensemble des cinq approches suivies. Enfin, nous postulons du fait que le sens ainsi mis à jour aura toujours valeur et vocation universelles et intemporelles quelque soit le degré circonstanciel du verset. L’étude de ce verset illustrera la cohérence et la force probante de cette méthodologie.

[2]  Techniquement le verbe de cet impératif négatif est à l’apocopé, al mudâr‘i al majzûm.

[3] Apocopé mais aussi subjonctif, car on ne peut distinguer ces deux temps aux 2ème et 3ème personnes du pluriel.

[4]  « In  » est une préposition d’hypothétique entraînant le subjonctif.

[5]  L’expression  وَأَنْتُمُ الْأَعْلَوْنَ , « wa antum al a‘lawn » peut signifier soit : être en position de force, avoir le dessus, être les plus forts, mais aussi  : être en position élevée, être élevés. L’on aurait pu ici retenir le deuxième choix et traduire : “ Ne faiblissez pas, et si vous appelez à la paix, [sachez que] vous êtes plus élevés et Dieu et avec vous…”.

[6]  Je cite : « aw mansûb li idmâri in », ce qui se traduit : « Ou bien cela se comprend comme un subjonctif induit par la préposition « in » sous-entendue. Tafsîr al Kashshâf.

[7]  wa al wajhu al âkhar an-nasbu ‘alâ-ssarfi.

[8] Je cite : « lâ tad‘ufû ‘anhum wa tad‘uhum ilâ-ssulhi wa-l-musâlamati. » En cette paraphrase Tabari n’introduit pas de préposition supposée sous-entendue en disant : « lâ tad’ufû ‘anhum wa [] tad‘ûhum ilâ-s-silmi » puisqu’il a étudié ailleurs cette possibilité, Cf. point c) et note 7. En conséquence, sa présente paraphrase du verset apparaît bien comme un cas d’application de ce qu’il a nommé un subjonctif de substitution concernant la forme verbale tad’û , c’est-à-dire en ce cas sans préposition sous-entendue. Sa paraphrase signifie alors : « Ne soyez pas faible à leur égard, et vous les appelez (ou « et tu les appelle ») à la paix et à la conciliation ».  Cette paraphrase rend bien « l’archaïsme », c’est-à-dire un état ancien de la langue coranique, de cet emploi particulier qui, une fois bien compris, revient en fait à formuler un impératif faible par l’emploi d’un subjonctif sans préposition. De ce fait l’on doit traduire : « appelez à la paix » [ou « appelle à la paix]. Pour que ce point délicat soit tout à fait clair, nous préciserons que ceci peut aussi se déduire du fait que Tabari n’a en aucune façon employé en sa paraphrase l’impératif « ud‘û » ou le présent « tad‘ûna », mais a cherché par cette paraphrase à illustrer ce que pouvait signifier l’emploi très particulier de la forme verbale tad‘û en ce verset.

[9] En effet, il existe dans le texte de Tabari une confusion graphique entre tad’u hum, تدع + هم, soit la deuxième personne du singulier au présent ou à l’apocopé, et tad’û hum تدعوا + هم, « appelez-les », deuxième personne du pluriel à l’apocopé ou au subjonctif, qui toutes deux s’écrivent de la même manière تدعوهم lorsque un pronom, ici hum, هم, leur est affixé, le alif marquant le pluriel disparaissant alors orthographiquement. Donc, de part cette imprécision orthographique et du fait que Tabari mentionne l’avis de Ibn Zayd pour qui le verbe appeler est au singulier, l’on ne peut réellement savoir l’accord choisi par Tabari en cette phrase.

[10] Concernant la traduction du Professeur M. Hamidullah, il faut bien évidemment le lire en sa traduction véritable. En effet, la traduction dite communément de Hamidullah, très largement diffusée par les autorités saoudiennes, n’est pas la sienne. Elle comporte de très nombreuses différences destinées à labelliser la lecture wahhabite, ce verset en est un bon exemple. Le Professeur M. Hamidullah a par ailleurs officiellement désavoué cette traduction. Je dois signaler ici une imprécision de ma part. J’avais dit que ma traduction était aussi celle de M. Hamidullah signifiant ainsi qu’il traduisait en positif « l’appel à la paix » et non pas en négatif « ne pas appeler à la paix ». Mais, nous venons de le citer, il emploie en sa traduction « appelez à la paix », alors que j’avais personnellement traduit « appelle à la paix ». Ne consultant pas les traductions pour traduire je n’avais pas relevé, par inadvertance, la différence lors de ma citation, que l’on veuille bien m’en excuser.

M. Gloton, éminent spécialiste de la langue coranique, en son considérable ouvrage « Une approche du Coran par la grammaire et le lexique  », mentionne que l’on peut aussi traduire : “ Ne faiblissez pas, et sollicitez la paix. ”

[11]  De façon caractéristique les versets se terminent soit par le pronom kum (vous), soit par le pronom hum (eux) ou parfois (elles). Ce procédé donne à cette sourate un rythme très particulier, mais l’usage de ces pronoms et l’alternance rapide majore de fait l’impression d’un discours dépersonnalisé, général.

[12] C’est d’ailleurs de là qu’est tiré à juste titre l’autre nom de cette sourate : « Le combat ».

[13]  Signalons que certaines versions électroniques normalisent à présent nombre de ces incorrections.

[14] Précisons qu’en arabe la plupart des formes conjuguées indiquent par elles-mêmes le genre du sujet sans que l’on ait à recourir à des pronoms. Mais, toutefois, l’on ne peut distinguer au mode présent la deuxième personne du singulier masculin (tu) de la troisième personne du singulier féminin (elle) cas où le verbe s’écrivant et se prononçant alors de la même manière. Seul le contexte ou plus rarement l’ajout de pronom permet de préciser le cas.

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