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Précision à propos de l’article de Sébastien Boussois sur “l’Agora des indigènes”

L’article de Sébastien Boussois consacré à “l’Agora des indigènes de la République” mentionne parmi plusieurs autres une brève intervention que j’ai faite le samedi 25 juin 2005 lors du débat sur l’identité politique des “indigènes” (“Qui sommes nous  ?”). J’apprécie la tonalité de l’article, et confirme avoir abordé les points évoqués dans l’article.

Je tiens en revanche à signaler que les extraits de mon intervention qui sont cités donnent, du fait qu’ils sont isolés du reste (et notamment de la fin) de l’intervention, une idée trompeuse de mon propos : à leur lecture, je semble soutenir que le “blanc” qui s’affiche clairement aux côtés des “indigènes” en lutte se retrouve à son tour stigmatisé et traité en indigène, au point qu’il peut sans difficulté et sans équivoque s’inclure dans la formule “Nous les indigènes” .

Or, le but de mon intervention était précisément de contester cette vision, ou du moins de la nuancer fortement : je n’ai évoqué les attaques que je subis du fait de mon engagement contre l’exclusion des élèves voilées, et la “mauvaise réputation” qui m’a été faite depuis cet engagement, que pour illustrer la situation de tout “blanc” engagé dans le combat des “indigènes”, et pour souligner la différence entre ces attaques ou cette “mauvaise réputation” et celles que subissent les “indigènes indigènes” (les personnes issues de l’immigration post-coloniale et de la Traite négrière). C’est dans ce but que j’ai évoqué la possibilité que j’ai, comme tout “blanc”, de “me retirer”, momentanément ou définitivement, dès lors que la pression liée aux attaques, à la “mauvaise réputation” ou à la nécessité permanente de se justifier devient trop pénible : car précisément, et cela a été ma conclusion, les “indigènes indigènes”, eux, ne peuvent pas “se retirer” ; l’une des spécificités de la stigmatisation qu’ils subissent, c’est que, contrairement à celle que peut subir un “blanc solidaire”, elle est “sans issue” ou sans “porte de sortie” ; concrètement, cela signifie qu’un “indigène indigène” est soumis à la stigmatisation, au soupçon, à la “mauvaise réputation”, à la nécessité de se justifier ou au risque de subir une offense raciste en tout lieu et en tout temps, qu’il soit engagé dans une lutte politique ou qu’il aille s’attabler à la terrasse d’un café.

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Il porte son stigmate sur lui (son apparence physique, son patronyme…). Un “blanc”, lui, fût-il diabolisé pour ses engagements politiques, ne porte son “stigmate” que dans des espaces bien délimités (les sphères militantes, les personnes “bien informées” qui parviennent à l’identifier comme “mauvais” ou comme “menace”) et pour une durée qui peut être interrompue par lui-même (dès qu’il se “retire”, se dés-engage, il redevient “respectable”).
Telle était l’idée directrice de mon intervention, et j’ai insisté sur le fait que, pour cette raison, un “blanc”, tout en prenant sa place dans la lutte des “indigènes”, ne pouvait selon moi pas
dire “Nous les indigènes” de la même manière et dans le même sens qu’un “indigène indigène”.

P.S. Il y a également une inexactitude, mais elle est mineure car elle ne change pas le sens du propos général de mon intervention : ce n’est pas de moi-même que j’ai parlé comme d’un fils d’immigrés arméniens mais de mon père ; il s’agissait pour moi de souligner que dans le cas de l’immigration arménienne, comme de toutes les immigrations non-coloniales, la troisième génération présente sur le sol français ne subit plus de discrimination raciste.

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