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Menace de guerre contre la Corée du Nord

Après son entretien avec le nouveau président sud-coréen Moon Jae-in, le 30 juin, Donald Trump a encore durci le ton contre la Corée du Nord. « La patience stratégique avec le régime nord-coréen est terminée. Ensemble, nous faisons face à la menace du régime dangereux et brutal de Corée du Nord. Les programmes nucléaire et balistique de ce ce régime exigent une réponse déterminée », a déclaré le président américain. Pour la première fois, Washington a également annoncé des sanctions contre une banque chinoise accusée de coopérer avec Pyongyang.

Si la fonction des médias dominants est de substituer l’imaginaire à la réalité, la représentation occidentale de la Corée du Nord n’échappe pas à la règle. Vu de l’Ouest, il est vrai que Pyongyang fait figure d’accusé idéal. Cette « monarchie rouge », ce « régime ubuesque », ce « goulag asiatique » réunit les stigmates de tout ce que l’homo occidentalis est censé détester. Désigné par les grands prêtres du droit-de-l’hommisme comme l’incarnation du Mal, cet Etat honni ferait peser, selon le secrétaire d’Etat US Rex Tillerson, « la pire des menaces sur la paix mondiale ».

Mais de quelle menace s’agit-il ? Depuis son entrée fracassante dans le club des puissances nucléaires, en octobre 2006, la Corée du Nord est mise au ban des nations. Contre ce petit pays, la « communauté internationale » phagocytée par Washington a mobilisé les grands moyens. Résolutions onusiennes, sanctions économiques et manœuvres militaires se succèdent, sans relâche, pour isoler le régime fautif. Rangée par les USA dans la catégorie des « Etats voyous », la République populaire démocratique de Corée est dans la ligne de mire.

La propagande occidentale dépeint Kim Jong-un comme un tyran sanguinaire faisant joujou avec la bombe, mais cette caricature peine à masquer la réalité des rapports de force. Inutile d’être un grand expert, en effet, pour comprendre que la stratégie nucléaire nord-coréenne est purement défensive. Dissuasion du faible au fort, sa finalité est d’exposer l’agresseur à des représailles, et non de prendre l’initiative des hostilités. Les Nord-Coréens veulent échapper au sort de l’Irak et de la Libye, pulvérisés par les USA et leurs supplétifs pour avoir le bonheur de goûter les bienfaits de la démocratie importée manu militari.

Le bellicisme prêté à Pyongyang, en réalité, relève d’une inversion accusatoire dont le soi-disant « monde libre » est coutumier. Prompts à donner des leçons de morale, les USA sont les seuls à avoir utilisé l’arme nucléaire. A Hiroshima et Nagasaki, en août 1945, ils l’ont fait sans hésitation et n’en éprouvent aucun remords. Non seulement ce massacre de masse (plus de 220 000 morts) fut d’une barbarie sans nom, mais il n’avait aucune justification militaire. Le Japon était prêt à capituler, et le recours à l’arme atomique visait à intimider l’URSS, dont les troupes écrasaient l’armée japonaise en Mandchourie.

Pour la « nation exceptionnelle » à la « destinée manifeste », carboniser des centaines de milliers de femmes, d’enfants et de vieillards ne pose aucun problème sur le plan moral. Pour fêter l’anniversaire de la double explosion, les généraux US aimaient déguster en famille une pâtisserie en forme de champignon atomique. Cinq ans plus tard, les mêmes galonnés à la bonne conscience indécrottable déchaînèrent les feux de l’enfer contre les Coréens. Ces derniers échappèrent de peu à l’apocalypse nucléaire rêvée par MacArthur, mais ils subirent les effets dévastateurs d’une arme nouvelle : le napalm. Pendant la guerre de Corée, l’US Air Force fit un usage massif de cet explosif incendiaire, et la plupart des grandes villes du Nord ont été détruites.

Imagine-t-on une guerre qui anéantirait 60 millions d’Américains en les carbonisant avec des bombes incendiaires ? C’est ce que la Corée du Nord a subi entre 1950 et 1953. Déversant davantage de bombes sur la péninsule que sur le Japon entre 1942 et 1945, les généraux du Pentagone ont massacré sans état d’âme 3 millions de personnes, soit 20% de la population de ce petit pays. On se doute bien que de telles broutilles n’entacheront jamais le prestige inégalé dont jouit l’Oncle Sam dans les contrées occidentales. Mais à la lumière de cette histoire on comprend mieux, en revanche, la hargne anti-impérialiste des Nord-Coréens.

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Il n’y a pas que le passé, au demeurant, qui incite à relativiser la passion de Washington pour la paix dans le monde et l’amitié entre les peuples. Lorsque les USA jouent la vertu outragée et brandissent l’épouvantail nord-coréen, on finirait presque par oublier qu’ils détiennent 4 018 têtes nucléaires, alors que la République populaire démocratique de Corée en possède une dizaine. Les cinq essais nucléaires nord-coréens ont provoqué des torrents d’indignation en Occident, mais les USA en ont réalisé plus d’un millier. Enfin, ce n’est pas la Corée du Nord qui a pris l’initiative de nucléariser la péninsule, mais les USA en 1958.

Lorsqu’on demande ce que viennent faire des porte-avions US dans la région, la propagande répond que la Corée du Nord est un Etat-voyou qui a violé le traité de non-prolifération nucléaire. Mais un Etat souverain est libre de dénoncer un traité international, et Pyongyang a la mérite d’avoir annoncé la couleur en se retirant du TNP. De ce point de vue, sa situation est beaucoup moins scandaleuse que celle d’Israël. Car cet Etat non-signataire du TNP détient 300 têtes nucléaires avec la bénédiction des puissances occidentales, alors qu’il bombarde ses voisins et colonise des territoires qui ne lui appartiennent pas.

Les dirigeants nord-coréens ont beau user d’une rhétorique grandiloquente, ils ont les pieds sur terre. La puissance militaire de cet Etat de 25 millions d’habitants représente 2% de celle des USA, et sa seule ambition est de prévenir une agression extérieure dont la perspective n’a rien d’irréel. Réduits à l’impuissance au Moyen-Orient, les docteurs Folamour du Pentagone rêvent d’en découdre avec ce pays récalcitrant. Ils ont installé un bouclier anti-missiles en Corée du Sud, dépêché dans la région un puissant groupe aéro-naval, et largué dans la montagne afghane la méga-bombe anti-bunker « MOAB » en guise d’avertissement.

Malgré les réticences du nouveau président sud-coréen, qui s’est déclaré prêt à « renvoyer » le bouclier anti-missiles, les « neocons » de Washington envisagent ouvertement une opération militaire contre les installations nucléaires nord-coréennes. Car l’affrontement avec la Corée du Nord présenterait deux avantages. Il constituerait un puissant dérivatif à l’échec de l’impérialisme au Moyen-Orient, où il se heurte à l’axe Moscou-Téhéran-Damas-Bagdad. Et il fournirait un banc d’essai pour le bombardement des installations souterraines du complexe nucléaire nord-coréen avec la bombe « MOAB ». En cas de succès, une telle prouesse technologique priverait la Corée du Nord de son outil de dissuasion et administrerait une leçon de choses à l’Iran, cible préférée de l’administration Trump.

Pari hasardeux, bien sûr. Dans l’immédiat, cette agressivité a pour seul effet de conforter Pyongyang dans sa détermination. Farouchement attachée à sa souveraineté, fidèle à l’idéologie du « juché » (autonomie) héritée de Kim-Il-Sung, la Corée du Nord n’aime pas qu’on lui marche sur les pieds. Contrairement aux USA dont la doctrine prévoit la possibilité d’une attaque préventive, son programme nucléaire indique clairement à ceux qui voudraient l’attaquer qu’ils s’exposent à de sévères représailles. Décidée à résister à toutes les pressions, adossée au géant chinois, la République populaire démocratique de Corée est un « domino » que Washington n’est pas près de faire tomber.

(Afrique-Asie, juillet 2017, version actualisée)

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9 commentaires

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  1. Honte au journaliste capable de présenter une version aussi biaisée de la réalité. Un article de ce genre est un exemple type de propagande, bourré d’approximations, de partis pris, et sans le moindre sens de la nuance. Et le fait que la politique du moyen-orient des USA puisse être critiquée ne change rien à ce constat.
    Vous créez de la discorde et de la haine en écrivant ça. En plus de passer pour des amateurs en matière de qualité journalistique.

    • Farid
      Avez-vous seulement une idée de ce qu’est la vie en Corée du Nord?
      Avec Kim-Jung Un vous avez un système qui a broyé le peuple, sans aucun espoir à l’horizon. Avec Trump vous avez un imbécile doublé d’une vulgarité jamais vue à la Maison Blanche, mais qui sera tôt ou tard destitué de sa fonction présidentielle.

      • Mensonges sur la corée du nord Et lisez l’article corée du nord un pays très différent de ce qu’on en dit ” par Jean-Louis gouraud publié par “La Revue” Bien sûr ce n’est pas un paradis démocratique comme l’irak de Saddam ou la libye de Kadhafi mais ça n’est pas LA CARICATURE décrite par l’occident pour mieux justifier la destruction de ce pays ! Il est étonnant de voir des musulmans adhérer à cette propagande occidentale qui a déjà détruit l’irak et la libye !!!

        • @ Farid
          Il ne s’agit pas ici de gober tout et n’importe quoi, mais de faire preuve de discernement. L’islam c’est le juste milieu, et le musulman ne doit être ni laxiste, ni extrémiste dans ses propos, comportements et analyses.
          Renseignez-vous sur les Nord-coréens qui ont réussi à fuir vers le Sud.
          Et qui ont dénoncé tout ce qui ce passe en Corée du Nord… C’est édifiant!
          Les goulags coréens, où quand on y rentre, on sait que l’on n’en sortira pas vivant. La peur omniprésente dans la population, qui scrute les moindres faits et gestes, paroles, émotions ou non-émotions chez ses voisins, sa propre famille. Les enfants qui dénoncent leurs propres parents car pas assez patriotes à leurs yeux. On a un mélange de 1984 de Georges Orwell, avec Big KIM dans le rôle de Big Brother; le tout dans une atmosphère post stalinienne.
          Celui qui ne pleure pas assez, ou ne manifeste pas assez sa joie devant le big boss est suspect. Il est envoyé dans l’un des camps de concentration, comme celui de “Yodok” au centre du pays.
          Après entre US et Corée du Nord, ce n’est que du verbal. Une tentative de mise sous pression de part et d’autre.
          Mais les deux ont l’arme nucléaire. Et l’on sait que PERSONNE n’attaquera un pays possédant lui-même l’arme nucléaire. C’est ainsi que va le monde, et dans un sens heureusement !
          Le régime de Kim tombera de l’intérieur, le jour où le peuple fera sa révolte.
          Mais ce n’est pas du tout pour demain.
          Dans 30 ou 50 peut-être… Allahou ‘alam.
          Seul la faim, fait révolter les peuples !

          • C’est triste vous reprenez point par point la propagande américaine Vous me rappelez le “viagra’ de Kadhafi pour violer les femmes de son peuple et les charniers qui se sont avérés être des os de chameaux et ça ça passait en boucles aux infos dans notre pays pour faire avaler la destruction d’un pays musulman en détournant une résolution de l’onu Ou encore les armes de destruction massive de Saddam qui ont détruit non seulement un pays L’IRAK mais aussi le COEUR DU MONDE ARABE Ces crimes commis par des “démocraties” avec la complicité des arabes sunnites nantis ont causé plus de dégâts que vos soi-disantes dictatures Je salue ce dirigeant nord-coréen qui a LUI apporté son soutien total au peuple palestinien et qui ne finance pas les armes qui entretiennent les guerres de ce monde Chacun ses idéaux mon cher abd !!!

  2. Je vous remercie infiniment pour toutes ces précieuses informations. Il est clair qu’en occident nous détenons une très mauvaise image de la Corée du nord, et ce, sans vraiment savoir pourquoi. Votre article nous permet de nous faire rendre compte de notre manque d’esprit critique et de recherche de véracité. Il est d’une évidence que les États-Unis ont le monopole sur le monde, en faisant passer leurs propre ennemis comme étant une menace pour le monde entier.

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