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Le jihad, origines, interprétations, combats

Quelle est la définition du jihad ?

Littéralement, « effort, efforts ». La phrase al-jihad fi sabil Allah indique les efforts entrepris « dans la voie de Dieu », « pour Dieu » ; ces efforts peuvent comporter la guerre et le combat ou non, selon le contexte.

Sous quelle forme le mot jihad apparaît dans le Coran ?

Quand le mot jihad apparaît dans le Coran, ce qui est d’ailleurs assez rare, il ne semble pas indiquer ou prescrire le combat. Par exemple, 25 :52 (Furqan), wa-jahidhum jihadan kabiran, « et contestez avec eux (contre eux) en faisant de grands efforts » ; 22 :78 (Hajj), wa-jahidu fi llahi haqqa jihadihi, « faites des efforts pour Dieu comme il convient, selon ce qui Lui est dû ». D’ailleurs on trouve la racine arabe jhd 42 fois dans le Coran (y compris les deux exemples de jihad déjà cités) ; dans environ 10 de ces 42 cas il pourraient s’agir de combats, mais la chose n’est pas claire.

Toutefois, le Coran parle de luttes et de combats, surtout dans la huitième et la neuvième sourate, mais en utilisant d’autres mots dérivés d’autres racines, surtout hrb (faire la guerre, se battre) et qtl (se battre, tuer).

Que disent les hadîths sur le jihad ?

La doctrine ou les doctrines des hadiths sur le jihad forment un champ trop vaste pour qu’on puisse le résumer en quelques mots. De même pour les débats modernes sur les hadiths eux-mêmes. Voir, pour exemple, le chapitre 3 de mon livre et l’ouvrage d’A. Morabia, Le Djihad dans l’Islam médiéval.

Comment se sont déroulées les premières conquêtes musulmanes ?

Ces premières conquêtes ont eu lieu très rapidement, à la suite d’une série de guerres. On s’interroge toujours sur les causes de ces guerres et sur le caractère durable et définitif de ces conquêtes. Je fais une esquisse de ces débats dans le chapitre 4 de mon livre. A la fin je viens à la conclusion qu’on a mis trop d’emphase sur les facteurs strictement matériels.

Quel sens revêt la notion de martyre dans le Coran et la sunna ?

Dans le Coran, une personne qui a subi la mort en se battant pour Dieu a droit à (ou a tout simplement) une récompense particulière dans l’au-delà ; cette récompense n’est pas identifiée, au moins littéralement, avec le doctrine du martyre. Elle l’est clairement, par contre, dans la sunna, avec maints détails. Voir le chapitre 6 de mon livre.

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Qui sont les djihadistes d’aujourd’hui ?

Une question difficile. Je pense toutefois qu’une connaissance des sources « classiques » de l’islam ne pourra nous aider qu’en partie à trouver une réponse adéquate. Il faut parler aussi des sociétés actuelles et des individus confrontant la modernité ou la post-modernité, la fragmentation de l’identité, la recherche de l’authenticité, etc.

Toutes ces notions ne sont en fait qu’une question d’interprétation ?

Bien sûr, mais les interprétations comptent beaucoup, et non pas seulement pour les historiens.

Pourquoi n’avez-vous pas abordé dans votre livre, la notion de « grand jihad » ou « jihad intérieur » ?

J’en parle un peu davantage dans la version anglaise (Princeton University Press, août 2006), mais la question est difficile et vaudrait tout un autre livre. Regardez, par exemple, l’ouvrage de Morabia (déjà cité) qui décrit le consensus orientaliste d’il y a quelques décennies, selon laquelle le « grand jihad » serait tardif et dérivatif par comparaison au « petit jihad », le jihad des combats. Ou bien le livre récent de David Cook, Understanding Jihad (University of California Press, 2005), ou l’auteur s’acharne à rejeter la thèse d’un jihad pacifique à n’importe quelle époque.

Pour ma part, je pense avoir démontré que dans le jihad du Coran et de l’islam des premiers siècles, un principe de solidarité est lié de façon singulière avec un principe d’individualisme : ce qui se traduit dans une tension constante entre comportement pacifique et comportement belliqueux. Par conséquent il est important de souligner que le jihad- compris à la fois comme mot et comme notion-est pacifique dans son origine, même si les Musulmans (et les autres) l’ont souvent compris et vécu comme ayant affaire à la guerre. Ici je ne puis que référer à mon petit livre sur le jihad, ou j’essaie d’esquisser cette tension avec plus de précision.

Propos recueillis par la rédaction

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