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La vie de Malek Bennabi (8)

De retour à Alger, Bennabi demande à cheikh al-Okbi ses impressions sur la conférence donnée par son ami Hamouda Ben Saï. Elles sont négatives, ce qui étonne Bennabi qui connaît la valeur intellectuelle et la culture de son ami qui a « réussi le prodige de déduire du Coran les principes d’une politique de l’efficacité à laquelle n’étaient pas habitués les ternes oulamas algériens ». 

L’image d’al-Okbi en prend un sérieux coup dans son esprit. Il note dans ses Mémoires inédits : « J’avais une totale confiance en mon ami, me croyant moi-même assez digne d’être son bras droit ou son conseiller, tant je voyais chez lui d’innocence, de bonté, de loyauté et de culture, mais en moi plus de dureté, plus de perspicacité pratique. Je voyais dans cet ensemble de qualités un tout capable de faire une révolution spirituelle, intellectuelle et politique en Algérie ».  

Ils rentrent, sa femme et lui, à Paris. Il aime l’automne et c’est avec une certaine émotion qu’il assiste au dépouillement des grands arbres de leur feuillage. Ils vont passer quelques jours à Dreux, chez la mère de sa femme, Mme Mornas, où ils sont très bien reçus. Bennabi s’entend à merveille avec sa belle-mère qu’il appelle « Maman ». Là, c’est un autre visage de la France qui s’offre à lui, celui de la France rurale, d’une civilisation aux racines paysannes et au génie pratique. 

Il écrira plus tard : « Cette campagne, c’est le vrai visage de la France. Pour la première fois, j’allais connaître peu à peu les raisons qui inspirèrent à Sully sa fameuse devise : « Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ». La civilisation française est avant tout le produit de cet allaitement. Je sais aujourd’hui, après trente ans, que mon mariage avec Khadija l’a mise en contact avec l’islam et m’a mis en contact avec l’aspect le plus authentique de la civilisation de son pays » (« MTS-II »). 

Il voit comment sa belle-mère travaille du matin au soir à la tenue de sa petite ferme, de quelle manière son intérieur est rangé. Il remarque le sens de l’ordre et le goût du beau dans cette modeste famille. Il comprend de qui sa femme tient sa méticulosité, son culte de la propreté, son art de tout bien ranger dans un espace extrêmement réduit… 

Il a lu Balzac, mais maintenant ce sont des personnages comme sortis de ses romans qui s’animent sous ses yeux. Il en est ému. La sensation de déchirement qui ne le quitte plus depuis que les deux cultures ont creusé en lui leurs sillons parallèles, s’amplifie en de pareils moments. 

Enfant, on lui avait appris qu’il appartenait à « la meilleure communauté suscitée parmi les hommes » (Coran 3-106), mais ce qu’il vit depuis qu’il est venu au monde ne recoupe pas, loin s’en faut, ces affirmations. Pourquoi les pays musulmans sont-ils en majorité colonisés ? Pourquoi leur retard technique, scientifique et économique ? Pourquoi les attitudes, les comportements et les pensées des premiers sont-ils si différents ? Qu’est-ce que la civilisation ? Comment sortir de la décadence ? 

En plus de ses cours à l’ESME, Bennabi suit d’autres formations au Conservatoire national des arts et métiers (chimie industrielle, chimie tinctoriale, tissages et textiles…). Il occupe avec sa femme une petite chambre dans une ruelle du quinzième arrondissement de Paris, Porte de Versailles. Il travaille studieusement tous les jours de la semaine, veillant tard la nuit et ne sortant que le samedi après-midi pour se rendre au « Hoggar », un café appartenant à un Algérien dans le Quartier latin, ou à l’UCJG. Il tire ses ressources du modeste mandat que lui envoie chaque mois son père sur sa modeste pension. 

Les nouvelles qui viennent d’Algérie ne sont pas rassurantes en ce début de 1933. Une circulaire du Préfet d’Alger vient de charger un « Conseil consultatif » présidé par un Français non-musulman de la direction du culte musulman, et d’interdire l’accès des mosquées aux Oulamas. Messali Hadj parle du droit des Algériens de « défendre leurs mosquées les armes à la mains ». Ferhat Abbas fait paraître un article au ton ferme. Tayeb al-Okbi rédige une pétition qu’il fait tirer en un millier d’exemplaires et expédie le tout à Bennabi. 

Ce dernier rameute les étudiants et rédige à son tour une lettre ouverte qu’il signe en leur nom et envoie aux autorités métropolitaines, aux élus, aux intellectuels, bref à tout ce qui représente quelque chose en France. Cette lettre qu’on peut considérer comme son premier écrit à destination du public est publiée dans le journal francophone des Oulamas, « La Défense », que dirige Lamine Lamoudi (1891-1957) Secrétaire général de l’Association des Oulamas, et en arabe dans un journal dont il ne se souvient que du propriétaire, Ababsa (1892-1953). Par contre, il se souvient que Boumendjel lui avait demandé d’en atténuer la virulence. Le texte d’al-Okbi est distribué dans les boites à lettres. Bennabi écrit à ce dernier et demande aux Oulamas de ne pas se limiter à cette réaction

Dans les milieux arabes de Paris, le nom d’Ahmed Messali Hadj commence à être connu. Désirant relancer « l’Etoile Nord-Africaine » et rallier à ses idées les étudiants nord-africains, il contacte l’AEMNA. Une rencontre a lieu dans une chambre de l’hôtel « Hoggar » entre Messali, Radjef (1909-1989), Si Djilani (1886-1956) et Amar Imache (1895-1960), d’un côté, et 

Bennabi, Benslimane et Ben Milad, de l’autre. 

Le projet est exposé par Messali, et une seconde rencontre est programmée pour arrêter les modalités de création – en fait de relance- du premier parti nationaliste algérien. La réunion se tient quinze jours plus tard dans la chambre d’un ouvrier, rue Saint-Jacques. On décide de l’organisation d’un meeting et d’une soirée théâtrale et musicale pour marquer la première apparition officielle de la nouvelle ENA. 

Bennabi est chargé d’écrire la pièce de théâtre qui sera jouée par lui, Ben Milad et quelques autres. Il choisit pour thème « l’injustice coloniale ». L’événement doit se produire à la salle « Cadet », au siège de la loge maçonnique « Le Grand Orient ». La salle est comble. On remarque au premier rang l’imam de la mosquée de Paris. La femme de Bennabi est assise à côté de la femme de Messali dont il remarque « avec satisfaction les traits honnêtes, bons, avec un léger voile de tristesse ». 

La pièce en un seul acte est jouée comme prévu, puis vient le moment des discours : Si Djilani, Imache puis Messali se succèdent à la tribune et annoncent la naissance de la formation politique. C’est ce soir-là que Messali prononce sa fameuse phrase : « Il y a des hommes supérieurs, mais il n’y a pas de peuples supérieurs ». On pense enfin aux distractions. 

Quand la musique et la danse commencent, Bennabi se retire avec sa femme. Très vite il a détesté certains aspects dans le personnage de Messali, dont les accointances avec la Franc-maçonnerie et les Trotskistes et son goût pour les mondanités. Autant il apprécie son discours anticolonialiste et indépendantiste, autant il a horreur de sa propension au populisme. Il gardera des relations avec lui, mais distantes. 

La formation politique qui vient d’être créée se propose à travers ses statuts et son programme de poursuivre les objectifs suivants : Indépendance totale de l’Algérie, Retrait total des troupes d’occupation, Constitution d’une armée nationale, Formation d’un gouvernement national révolutionnaire, Assemblée constituante élue au suffrage universel… 

En novembre 1934, Messali Hadj, Amar Imache et Belkacem Radjef sont arrêtés et condamnés à six mois de prison pour « reconstitution de ligue dissoute ». Bennabi et les frères Ben Saï lui suggèreront, un peu plus tard, d’ouvrir à Paris une salle de cours du soir où ils pourraient donner des cours d’alphabétisation aux ouvriers algériens, à l’instar de ce qui se faisait à l’Université populaire ouverte par le parti communiste français à l’intention des prolétaires. 

Bennabi note à l’évocation de ce souvenir dans ses Mémoires inédits : « Mais voilà ! Le communisme est une doctrine qui veut se servir de l’homme et, pour cela, le cultive, le perfectionne, le rend efficace. Tandis que le nationalisme que nous avons inauguré était un empirisme sentimental qui n’entendait se servir que de la parole. Et comme il n’était nullement besoin que tout le monde parlât, on se contenterait donc d’écouter et d’applaudir le nationaliste-en-chef, lequel n’eût pas voulu, au reste, partager son privilège avec d’autres bavards. » 

En Allemagne, le Maréchal Hindenburg a appelé Hitler à la Chancellerie. Einstein émigre en Suisse. La « Fédération des élus de Constantine » est prise en main par le Dr. Ben Djelloul (1896-1986), Ferhat Abbas, le Dr. Boumali et le Dr. Saâdane. 

Au réformisme « soft » des Oulamas, au populisme de Messali, sont venus s’ajouter ceux que Bennabi appellera les « intellectomanes ». L’attelage de la « boulistique » algérienne est maintenant au complet pense Bennabi qui sera extrêmement critique envers cette composition du mouvement national faite d’une aile ouvrière, d’une autre bourgeoise et, au milieu, d’un « Islah » qui cherche l’équilibre entre les deux avant de pencher en définitive vers les « Elus », du moins jusqu’en 1939. 

Il écrit dans ses Mémoires inédits : « Le nationalisme algérien prenait ainsi sa préfiguration historique avec une aile ouvriériste prête à s’embourgeoiser à Paris et à s’acoquiner avec une partie de la gauche française, et une aile bourgeoise prête à s’encanailler avec le colonialisme. L’ « Islah » essayait de frayer son chemin entre les deux, sans se douter qu’il devra remettre un jour sa démission morale à l’aile bourgeoise et qu’il sera finalement pulvérisé par l’aile ouvriériste. » 

Il ajoute un peu plus loin : « Parmi les intellectuels algériens, je ne voyais qu’en Hamouda Ben Saï et moi-même les garanties nécessaires pour entrer, après nos études, dans l’arène politique sans nuire à la ligne islahiste qui me paraissait comme une chose qu’il ne fallait perturber à aucun prix… J’ai toujours été convaincu qu’on ne peut pas faire un ordre politique sans faire au préalable un ordre moral» (c’est moi qui souligne). 

Alors que Hamouda Ben Saï ne s’implique dans aucun de ces mouvements qu’il considère manipulés par l’administration coloniale, Bennabi reste attaché à l’Association des Oulamas à laquelle il n’appartient pas formellement mais dont il soutient fortement la thématique : renouveau de l’homme, instruction, réforme morale de la société… 

Pour lui, l’aspect « civilisation » doit primer sur l’aspect « politique », nuance que ne saisiront pas les politiciens du mouvement national. Il sera intraitable avec les uns et les autres, mais contribuera néanmoins à toutes les actions anticolonialistes de l’époque. En fait, il s’agit moins d’un antagonisme entre un homme et des courants politiques, que de l’immémoriale incompréhension entre le « philosophe » et le « politicien ».

C’est l’année de Nietzsche et de Spinoza dans la vie intellectuelle de Bennabi. Il en discute longuement avec Hamouda Ben Saï. Il lit beaucoup, comme toujours, mais ces deux philosophes vont le marquer particulièrement : « Les éclairs et les tonnerres de l’un, et les raisonnements sinueux et insinuants de l’autre m’avaient en effet beaucoup intéressé à cette époque. » note-t-il. On retrouvera plus tard le souffle du premier et les subtilités de la pensée du second dans la formulation de certaines de ses thèses.

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Il cite pêle-mêle parmi ses lectures du moment : Darwin, André Gide, Taha Hussein, Jacques Maritain, Henri Massis, une biographie du roi Ibn Séoud, ainsi que des auteurs scientifiques (Georges Claude, De Broglie…). Il s’intéresse de plus en plus à l’Arabie saoudite où il lui semble qu’un « cycle de civilisation » est en préparation. 

Sa femme et lui rassemblent tout ce qui s’écrit sur ce roi et son pays, le Hedjaz, qui commence à le tenter après Tombouctou, le Rif, le Soudan et l’Australie de sa jeunesse. Toujours l’appel du lointain, car Bennabi aspire à vivre après ses études en pays musulman. Il est venu en France pour étudier et parce qu’il n’y avait pas d’établissement équivalent en Algérie. 

Mais qu’aurait-il été sans cette plongée dans la civilisation occidentale dont la France était une des plus brillantes illustrations, non par sa politique colonialiste, mais par son héritage spirituel et technique ? 

Son amour des sciences et des techniques grandit et devient boulimique. Il se passionne pour la thermodynamique. Il passe les vacances de Pâques à Dreux où il se plaît de plus en plus, aimant la campagne, la solitude, la simplicité du mode de vie rural. En été, il rentre en Algérie où il a hâte de retrouver ses parents qui viennent d’accomplir leur pèlerinage à la Mecque. Le bateau le dépose à Annaba d’où il doit prendre un moyen de locomotion quelconque pour rejoindre Tébessa. 

Tout au long du trajet, il remarque que « la présence de la colonisation s’arrête avec les grands domaines qui s’étendent de la plaine de Bône jusqu’à Bouchegouf. A partir de Souk Ahras, c’est la petite propriété indigène qui fait apparition avec ses petites meules, ses gourbis aux toits de chaume, ses maigres troupeaux de moutons et de chèvres, ses petits sentiers muletiers. Les camionnettes Citroën sillonnent à présent toute cette campagne, élargissant les sentiers en mordant sur les champs. Le mulet et le chauffeur ont la charge de la voierie. » 

Comme toujours, ses réflexions sont de nature sociologique, mais il sait les emballer dans des tournures agréables. Il balaie du regard la nature dont il relève la variété d’une région à une autre : « Peu à peu, la végétation s’arrête. La forêt de chêne-liège succède d’abord à la plaine verdoyante de Bône et s’étend au-delà de Souk-Ahras. Elle finit en sapins rabougris, clairsemés puis solitaires à la limite de la plaine fauve de Tébessa. A partir de Clairefontaine, le paysage change totalement. Peu à peu le gourbi fait place à la tente, le sédentarisme misérable au nomadisme héréditaire. »   

Mais, comme on le sait, Bennabi fond à la vue de la nature inviolée : « Malgré ses parcours plus limités au Nord par la colonisation et ses déchets, au Sud par le désert envahissant et ses méfaits, la vie nomade a conservé sa noblesse, sa poésie. Le chameau à l’allure lente et majestueuse, comme celle du nomade lui-même, donne l’impression que la vie est faite ici pour les choses qui ne s’évaluent pas à la montre. Dans la plaine, les gens ramassent leurs petites récoltes arrachées à un sol maigre. Ils rentreront tout -à- l’heure au campement au coucher du soleil pour raconter les immémoriales histoires de la tribu des Ouled Sidi Yahia ou les prophéties de Sidi Ali Ben al-Hafsi… Je me suis toujours senti l’âme envahie d’une douce poésie chaque fois que j’ai revu, après une longue absence comme cette fois, la plaine de Tébessa, surtout en cette saison. Je comprends l’ensorcellement que subissait Isabelle Eberhardt en chevauchant entre les campements nomades des hauts plateaux, parmi les touffes de thym et d’alfa. »  

A son arrivée à Tébessa, il est reçu en fête. Il passe ses journées à la maison et n’en sort comme à son habitude que le soir pour aller retrouver ses amis. Il nage dans le bonheur. Il mesure les progrès réalisés en une année : les Tébessiens ont construit d’autres écoles, de nouvelles mosquées… Il voit à travers ces initiatives et ce compter-sur-soi une société en marche. 

On lui raconte l’histoire de Mokhtar, un alcoolique, joueur de « ray-ray » (jeu de hasard) et détrousseur notoire qui, un matin, était venu trouver les responsables d’une association de construction d’une école pour leur remettre la somme de 10.000 francs, ce qui représentait une fortune à l’époque. Depuis cette brusque métamorphose, il n’a plus consommé d’alcool ni joué, et est devenu un militant actif de l’ « Islah ». 

A la maison, Bennabi harcèle sa mère toujours et encore pour qu’elle lui raconte dans le moindre détail son pèlerinage, pour qu’elle lui décrive les Lieux saints et les sensations que l’on éprouve lorsqu’on est si près du tombeau du Prophète. En ces instants, la lumière de la chambre est presqu’éteinte. Il écoute religieusement, c’est le cas de le dire, tandis que des larmes d’émotion coulent de ses yeux. Il est envoûté, transporté, son âme n’est plus dans son corps mais plane au-dessus de la Mecque et de Médine. La mère et le fils communient dans un monde de sacralité, de pureté, de ferveur. Elle lui montre ce qu’elle a ramené pour lui et sa femme. Tiens ! Elle sait ? Il reste sans voix. Il passe trois mois d’affilée à Tébessa. 

En quittant sa mère, il ne sait pas qu’il ne la reverra jamais. Avant de partir, il fait la connaissance de cheikh Bachir al-Ibrahimi qui devait donner un cours à la mosquée. Il lui parait « le moins archaïque des oulamas. Son éloquence me charma. Mais je remarquai surtout la finesse de son esprit qui embrassait un problème social comme je ne croyais pas un alem capable de le faire… Sa parole enracinait davantage le salafisme dans mon être ». 

(A suivre)

NOTES :

1 Où l’on peut lire : « Les mosquées appartiennent à Dieu et doivent rester ouvertes à chacun de nous. L’islam appartient aux musulmans. C’est la seule chose d’ailleurs qui leur reste en Algérie. La préfecture ne s’immisce pas dans les affaires de l’Eglise et de la synagogue. Pourquoi le ferait-elle dans celles des mosquées ? S’il ne nous est plus possible de choisir nos directeurs de conscience, nous n’avons plus qu’à fermer les mosquées… » (« La voix des humbles » du 23 mars 1933).  

2 Il doit s’agir d’ « Al-Mirsad », hebdomadaire fondé en 1931 par Pierre Juglaret et dont la direction a été confiée à Mohamed Ababsa. Le journal sera suspendu en 1934 en raison de son hostilité au colonialisme. HBS écrit à son sujet : « Pierre Mohamed Chérif Juglaret (parisien converti à l’islam et marié à une algérienne) qui a vécu pauvrement à Alger comme écrivain public, a été le gérant responsable du journal « La Défense » pour lequel, comme Lamine Lamoudi, il fut poursuivi en justice. Antérieurement, il avait été le gérant responsable du journal « La voix du peuple » que fit paraître de 1933 à 1935 (dans des conditions héroïques) un garçon plein de fougue ayant une formation bilingue, mon regretté ami Ali Ben Ahmed, cousin de Malek Bennabi. En février 1933, à la suite de l’interdiction faite au cheikh Tayyeb al-Okbi de prêcher dans la Grande Mosquée d’Alger, il eut le courage, avec la foi du néophyte, de publier et de diffuser sous forme de tract une vigoureuse protestation contre cette atteinte à la liberté du culte musulman. Au cours de la guerre d’Algérie – comme Lamine Lamoudi et comme tant d’autres patriotes algériens -il fut arrêté et disparut… Le colonialisme, vindicatif et hargneux, ne lui pardonna ni ses idées, ni sa foi, ni d’avoir choisi, lui, Français jouissant des prérogatives et de la dignité du citoyen, de vivre avec une « pauvre musulmane » et de partager le sort d’une masse « indigène » misérable et sans droits. » (Cf. Hamouda Ben Saï « Au service de ma foi », Dar al-Baath, Constantine 1984)..HBS ajoute : « J’ai connu Juglaret peu de temps à Constantine, au cours de ma jeunesse. J’étais content de l’entendre ! Et j’ai même échangé quelques lettres avec lui !» 

3 Des manifestations de protestation et des grèves éclatent un peu partout en Algérie. A Constantine, Ben Badis et Ben Djelloul demandent la levée de cette mesure au cours d’un meeting auquel participent 10.000 personnes.  

4 L’histoire a retenu que la relance de l’ENA s’est faite lors de l’Assemblée générale tenue à Paris le 28 mai 1933 au 49, rue de Bretagne à Paris lors de laquelle Messali a été désigné président de l’ENA et directeur de son journal « El-Oumma ».

5 Guy Pervillé confirme cette rencontre, écrivant : « En 1933, Messali réussit à approcher l’Association des étudiants musulmans nord-africains présidée par le marocain Mohamed al-Fassi. Le 4 juin 1933, invité par celle-ci à un banquet, il célébra « l’union des intellectuels et des manuels » (op.cité).

6 Messali Hadj reprend ici un propos de Georges Clemenceau qui, opposé à la possession de colonies, a dit un jour devant le parlement français : « Il n’y a pas de droit des nations dites supérieures sur les nations inférieures. N’essayons pas de revêtir la violence du nom hypocrite de civilisation ». 

7 Dans une « Note sur la vie de Malek Bennabi », Salah Ben Saï confirme ce fait : « L’avènement du Front populaire en 1936 et la prise du pouvoir par Léon Blum et l’élément juif et franc-maçon nous donnent à tous des sujets de réflexion. Avec Bennabi et quelques amis patriotes, nous décidons de nous occuper de nos frères travailleurs en créant des cours du soir et une sorte d’université populaire. Notre projet soumis aux dirigeants de la « Glorieuse Etoile Nord-Africaine », qui a le contact avec l’élément ouvrier et des locaux disponibles, est torpillé par Messsali Hadj et ses créatures qui apportent de l’eau au moulin du colonialisme. »  

8 Il doit s’agir du livre de H.C Armstrong « Le maître de l’Arabie : Ibn Séoud », Paris 1935.

 

 

                                                 

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