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La priorité des services secrets suisses : comment Hani Ramadan sucre son café

« La Tribune de Genève » a révélé jeudi 23 février que le Service d’analyse et de prévention (SAP), le service de renseignements intérieur de la Suisse, avait infiltré pendant deux ans le Centre islamique de Genève, dirigé par Hani Ramadan, le frère aîné de Tariq Ramadan. Cette taupe devait-elle simplement espionner ou avait-elle pour mission de fabriquer des preuves contre Hani Ramadan ?

Le quotidien genevois annonce la semaine dernière qu’une « taupe fédérale infiltre le Centre islamique de Genève ». Il s’agit d’un ancien repris de justice (escroquerie, drogue, trafic d’anabolisants) qui reçoit en 2004 pour mission d’infiltrer le CIG, fondé par Saïd Ramadan en 1961, et animé depuis la mort de ce dernier, en 1995, par son fils Hani Ramadan. Cet indicateur, appointé par le service de d’analyse et de prévention (SAP), va jusqu’à se convertir le 30 avril 2004. Il reçoit comme priorité absolue d’espionner Hani Ramadan. Cette traque va jusqu’à compter le nombre de morceaux de sucre qu’il met dans son café…

Cette démarche n’a rien d’extraordinaire. En France, les Renseignements généraux « fliquent » toutes les mosquées et toutes les associations où se réunissent les musulmans. Le problème, c’est que cette taupe, prise de remords, a tout avoué à Hani Ramadan et a raconté son histoire dans « La Tribune de Genève », le principal quotidien du canton de Genève. Depuis, Jean-Luc Vez, le directeur de l’Office fédéral de la police, a confirmé l’information, précisant que cette opération était parfaitement légale, « la loi fédérale sur le maintien de la sûreté intérieure autorise l’acquisition d’informations par des informateurs », déclare-t-il dans « Le Matin Dimanche ». Le problème, c’est que le SAP a effectivement le droit d’utiliser des informateurs pour lutter contre le terrorisme, l’espionnage, et la prolifération des armes de destruction massive. Mais Hani Ramadan est-il lié, d’une façon ou d’une autre, à l’une de ces catégories ?

En clair, le frère aîné de Tariq Ramadan développe depuis très longtemps des opinions qui ne plaisent pas à tout le monde (il a notamment écrit dans « Le Monde » le 10 septembre 2002 un texte très controversé intitulé « La Charia incomprise »). Mais cela en fait-il pour autant un terroriste ou un allié des terroristes ? L’indicateur a lui-même reconnu qu’Hani Ramadan « se montrait méfiant de tous ceux qui manifestaient un langage révolutionnaire, n’hésitant pas à exclure du centre certains musulmans ». Hani Ramadan, fils de Saïd Ramadan, le gendre d’Hassan Al-Banna, le fondateur des Frères musulmans égyptiens, a toujours manifesté son hostilité au terrorisme. « Je suis suisse et je défend la réputation de mon pays », déclare-t-il.

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Depuis 1959, date de l’arrivée de Saïd Ramadan à Genève, chassé d’Egypte par Nasser, les services secrets suisses n’ont jamais cessé d’espionner le Centre islamique de Genève. Une note, que l’on peut consulter aux Archives fédérales à Berne, datant du 5 août 1966, révèle que trois des enfants de Saïd Ramadan « se sont rendus à l’étranger en vacances », Aymen et Bilal en Grande-Bretagne et Yasser à Saint-Malo, en France… On imagine la valeur stratégique d’une telle information ! Aujourd’hui encore, les services secrets suisses fantasment sur le Centre islamique de Genève, une modeste bâtisse installée rue des Eaux Vives dans la ville du bout du lac Léman.

Jacques Pitteloud, l’ancien coordinateur des services suisses, assurait que tous les comploteurs islamiques se réunissaient au deuxième étage du CIG avant de perpétrer leurs sinistres missions. Et le journaliste Richard Labévière, dans son livre « Les dollars de la terreur », assure que Hani et Tariq Ramadan ont piqué la caisse des Frères musulmans (en page 166) afin « d’instrumentaliser et de valoriser une capacité d’influence dans les milieux musulmans d’Europe pour la monnayer auprès des riches donateurs toujours prêts à financer une légitimité islamique ». Les riches donateurs étant les Saoudiens. Richard Labévière oublie de dire que Hani comme son frère Tariq sont interdits de séjour en Arabie Saoudite.

Bref, pour les services secrets suisses, et pour certains journalistes, les Ramadan sont l’incarnation du mal. Toutefois, la défection de cet indicateur (il se serait réfugié en France) pose un autre problème : avait-il seulement pour mission d’espionner Hani Ramadan, ou devait-il « le faire tomber », en introduisant au Centre islamique de Genève des documents compromettants ? Cette information doit encore être mise au conditionnel. Mais ce n’est pas un mystère que certains en Suisse (et en Europe) sont prêts à bafouer la loi pour se débarrasser du frère aîné de Tariq Ramadan. En espérant que le scandale éclaboussera le conseiller de Tony Blair pour les affaires de terrorisme.

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