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La farce de la « solution à deux Etats »

Vendue à l’étalage des épiceries occidentales depuis 1993, la “solution à deux Etats” est un produit frelaté, une escroquerie notoire. La capitulation de l’OLP a offert à l’occupant, comme sur un plateau, l’opportunité inespérée d’accélérer la colonisation. Le désarmement unilatéral de la résistance a livré la Palestine en pâture aux appétits sionistes. Catastrophe politique, le processus d’Oslo a corrompu l’élite palestinienne et plongé ce mouvement national de libération, qui faisait jadis la fierté du monde arabe, dans les affres de la division.

Avec la complicité des dirigeants du Fatah, la colonisation sioniste a pulvérisé Jérusalem-Est et la Cisjordanie, tuant dans l’œuf la possibilité concrète d’un Etat palestinien. Comment peut-on bâtir un Etat viable sur les fragments épars d’un territoire rabougri ? Truffée de colonies, la Palestine a été laminée par le rouleau compresseur de l’occupation, rayée de la carte par la conquête sioniste. La Palestine d’Oslo n’est même pas un embryon d’Etat. C’est un mensonge auquel se cramponne une Autorité palestinienne moribonde et discréditée.

C’est la faute des “extrémistes des deux camps”, dit-on parfois. Mais depuis quand le colonialisme est-il empreint de modération ? Et où a-t-on vu un peuple colonisé s’en remettre à la générosité du colonisateur pour obtenir justice ? Un artifice commode consiste à renvoyer dos-à-dos l’occupant et l’occupé, comme si une responsabilité partagée pesait sur leurs épaules. Il permet à la conscience occidentale de s’en tirer à bon compte en affirmant que tout est de la faute du Hamas et de Nétanyahou.

La réalité du conflit dépasse de loin, pourtant, ces deux protagonistes. Le sionisme n’est pas un nationalisme ordinaire, c’est une entreprise d’éradication. L’idée que deux Etats puissent coexister sur le territoire de la Palestine historique n’a aucun sens. Colonialistes lucides, les sionistes le savent bien. Icône du “processus de paix”, le premier ministre Itzhak Rabin déclara devant la Knesset, en 1995, qu’il n’était pas question de créer un Etat palestinien, pas même un embryon d’Etat, ni maintenant, ni demain.

Bien entendu, on peut faire l’autruche et rêver d’un sionisme imaginaire, mais le sionisme réellement existant a peu d’appétence pour le partage territorial avec des autochtones récalcitrants. Ce qu’il veut, c’est toute la Palestine, “une Palestine juive comme l’Angleterre est anglaise”, selon l’expression employée par le président de l’Organisation sioniste mondiale Haïm Weizmann s’adressant aux puissances occidentales en 1919.  La spoliation territoriale, l’appropriation coloniale de la Palestine n’est pas un accident du sionisme, c’est son essence même.

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Les Palestiniens le savent aussi, et ils n’ont pas attendu le fiasco du prétendu “processus de paix” pour s’en rendre compte. En septembre 1993, un “Front du refus” est né du rejet immédiat des accords d’Oslo. Réunis dans le camp de Yarmouk, en Syrie, dix mouvements palestiniens forment “l’Alliance des forces palestiniennes”. Organisations pro-syriennes, islamistes ou marxistes, elles dénoncent le marché de dupes du “processus de paix” et condamnent la politique du courant majoritaire de l’OLP. Ce qu’elles veulent, c’est la fin du sionisme et un Etat unique en Palestine.

Cette opposition à Oslo a été systématiquement occultée, notamment par les associations occidentales de soutien à la Palestine, généralement alignées sur la stratégie collaborationniste du courant majoritaire du Fatah. Cette coalition des forces d’opposition était pourtant beaucoup plus représentative de l’opinion que les futurs dirigeants de l’Autorité nationale palestinienne. Et aux élections du 25 janvier 2006 dans les Territoires, les résultats électoraux du Hamas (42,6%) et du FPLP (4,1%), clairement opposés au “processus de paix”, dépassaient largement ceux du Fatah (39,6%).

Si l’on tient compte de l’opposition tout aussi catégorique des organisations basées en Syrie et au Liban, et dont les sympathisants ne pouvaient prendre part au scrutin, il est évident que les Palestiniens étaient majoritairement hostiles à ce qu’ils percevaient avec lucidité comme une véritable supercherie. L’absence de consultation des Palestiniens de la diaspora, en tout cas, a entaché la légitimité d’un processus auquel seuls les dirigeants de l’OLP et une bourgeoisie palestinienne installée dans les territoires avaient de bonnes raisons de trouver quelque intérêt.

Pour le peuple palestinien, en revanche, les accords d’Oslo n’ont porté que des fruits pourris. Ces traités inégaux ont accentué les divisions fratricides au sein du mouvement de libération. Ils ont fourni à l’occupant un moyen de pression permanent sur les Palestiniens, désormais captifs d’institutions de pacotille. Loin de permettre l’émergence de la Palestine, Oslo l’a anesthésiée. Le mieux qu’on puisse souhaiter pour les Palestiniens, c’est qu’ils mettent fin à cette farce, qu’ils rompent toute relation avec l’occupant et reprennent le flambeau du combat pour un Etat unique et démocratique en Palestine.

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6 commentaires

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  1. Un peu facile de demander à un peuple d’aller au combat pour assouvir ses propres lubies quand on est bien assis très loin du champs de bataille .
    Il y a aussi des Palestiniens qui aimeraient ne pas toujours être poussés à la “bravoure sacrificielle” par des éléments extérieurs qui les instrumentalisent et les réduisent à leur rôle de “peuple musulman le plus opprimé de la terre par les vilains juifs”.
    Le sang palestinien n’est pas en solde pour tous ces intellectuels de la révolution de divan.

  2. Il est clair quand on regarde la carte que l’impérialisme anglais a dessiné les frontières du “foyer national juif” à établir en Palestine en 1917 de façon à en faire un poignard coupant en deux entre Méditerranée et mer Rouge les Arabes et le monde colonial pour surveiller l’accès à l’Océan indien et aux richesses énergétiques. Le sionisme n’est rien d’autre que la tentative de retournement de la masse des juifs européens stigmatisés jusque là, en agents du colonialisme anglo-américain.. A l’image des croisades qui avaient visé à transplanter en Palestine les masses de “gueux” qui menaçaient de se révolter contre les gros féodaux, les papes et les princes d’Europe. Ou à l’image des colons boers d’Afrique du sud qui ont été engagés sous l’apartheid contre les masses travailleuses noires pour éviter qu’ils ne poursuivent leur rébellion contre la puissance anglo-saxonne alors dominante. Le résultat du sionisme, c’est entre autre l’appauvrissement de la créativité de la culture juive qui avait tant apporté à la culture progressiste de l’humanité avant 1948. Au lieu d’une Rosa Luxemburg on a un Netanyahu, au lieu d’un Einstein, on a les recherches de biologistes sur le “sang juif” dans les universités d’Israël, au lieu d’un Spinoza on a les casseurs de la LDJ.

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