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La Charte de l’Organisation de la Conférence Islamique et les droits de l’homme (partie 3 et fin)

a. La Conférence des Rois et Chefs d’Etat et de gouvernement

La Conférence des Rois et des Chefs d’Etat et de gouvernement est qualifiée, d’après l’article IV de la Charte, pour examiner « les questions d’importance primordiale pour le monde musulman ». Pouvons-nous nous référer à cet article de la Charte pour attribuer à cette Conférence la tache de veiller, d’une part, sur la protection des droits de l’homme dans les Etats islamiques, et d’autre part, dans les Etats qui comptent parmi leurs ressortissants une minorité musulmane ? Avant de répondre à cette question, il faut définir la phrase « les questions d’importance primordiale pour le monde musulman » et s’interroger pour savoir si les droits de l’homme peuvent être considérés comme des questions d’importance primordiale.

Ces questions sont, a notre avis, les questions qui permettent la réalisation effective des buts de l’O.C.I. Nous avons vu que ces buts concernent l’élimination de la discrimination raciale, la sauvegarde de la dignité de l’être humain, de l’indépendance et des droits nationaux des peuples musulmans. Dès lors, tout ce qui pourrait concerner les droits de l’homme ainsi que les violations de ces droits sont, à notre avis, des « questions d’importance primordiale pour le monde musulman » qui méritent d’être examinées par la Conférence des Rois et des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’O.C.I.

En ce qui concerne maintenant la question posée précédemment à savoir si cette Conférence est apte à examiner des questions de droits de l’homme ainsi que leurs violations, il faut tout d’abord placer le problème sous l’angle du principe de la « non-ingérence » dans les affaires intérieures d’un Etat non-membre de l’O.C.I. Il est aussi nécessaire d’envisager la « non-ingérence » dans les affaires intérieures d’un Etat non-membre de l’O.C.I. mais qui compte parmi ses ressortissants une minorité musulmane.

L’article II, paragraphe B, alinéa 2 de la Charte de l’O.C.I. énonce comme un des principes de cette Organisation « le respect du droit à l’autodétermination et la non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats Membres. » Cet alinéa ressemble de près aux articles 2 & 7 de la Charte de l’O.N.U. qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un Etat.

Le débat a été engagé dans la doctrine pour savoir si les droits de l’homme relèvent ou non des affaires essentiellement nationales de l’Etat et si en conséquence, l’O.N.U., peut intervenir chaque fois qu’une violation ou une atteinte aux droits de l’homme a été commise par un Etat membre. Avec le progrès formidable qui a été réalisé aujourd’hui dans le domaine de la communication et de l’information, le dialogue engagé entre les différentes cultures et l’intérêt dont témoignent, de plus en plus, les organismes internationaux gouvernementaux et non-gouvernementaux aux droits et libertés fondamentales ont permis de placer la question des droits de l’homme au premier rang des préoccupations de la communauté internationale. Ainsi, le principe de non-ingérence n’a pas empêché l’O.N.U. d’adopter plusieurs résolutions concernant les violations et les atteintes aux droits de l’homme, surtout si ces violations et ces atteintes « revêtent un caractère grave et systématique » ou si elles sont liées « à des situations qui mettent la paix et la sécurité internationales en danger » (8).

Les liens de solidarité, de fraternité et de l’unité qui lient les peuples musulmans constituent, à notre avis, une raison valable et majeure qui autorise la Conférence des Rois et Chefs d’Etat et de gouvernement à examiner toute question concernant les droits de l’homme dans les Etats membres et de prendre les décisions appropriées. Le principe de non-ingérence ne doit pas être un obstacle aux interventions de l’O.C.I. chaque fois que l’intégrité et la dignité de l’être humain, ainsi que ses droits élémentaires font l’objet de violations et d’atteintes.

D’autres part, l’action de l’O.C.I. concernant le respect des droits des minorités musulmans ressortissants des Etats non-membres de cette Organisation doit être envisagée dans le cadre de la coopération entre elle et ces Etats, d’une part. D’autre part, cette coopération doit être réalisée entre l’O.C.I. et les autres organisations universelles et régionales.

b. La Conférence des ministres des Affaires étrangères

L’alinéa (e) du 2e paragraphe de l’article V de la Charte de l’O.C.I. confie à cet organe principal la tâche de « prendre des décisions sur les questions d’intérêt commun, conformément aux buts et aux objectifs de la Conférence énoncés dans la présente Charte ».

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Conclusion

Il appartient à l’O.C.I., comme ce fut le cas pour d’autres organisations régionales, de jouer son rôle dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l’homme dans les Etats islamiques.

Les dispositions de sa Charte et de son préambule montrent l’importance qu’attachent les membres de cette organisation aux droits de l’homme et surtout à l’élimination de la discrimination et à la consolidation de la paix et de la sécurité mondiales fondées sur la justice.

Mais les bonnes attentions ne suffisent pas, de nos jours. Il faut des actions concrètes dans les domaines du respect des droits de l’homme et de ses libertés fondamentales. Les pas qui ont été franchis par l’adoption des déclarations des droits de l’homme en islam (9) par les organes de cette organisation ont besoin d’une application effective dans les Constitutions des Etats islamiques et dans leurs droits internes.

Notes :

(8) THIERRY (H.), COMBACAU (J.), SUR (S.), et VALLES (Ch.), Droit international public, Paris, Montchrestien, 1986, pp. 477-480.

(9) Voir notre article : « Présentation de la Déclaration du Caire sur les droits de l’homme en Islam », le Courrier du Geri. Recherches d’islamologie et de théologie musulmane, 1ère année, volume 1, n°1, octobre 1997, pp.9-31

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