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Joseph Samaha n’est pas martyr…. enfin !

Joseph Samaha (1) n’était pas journaliste. C’était un penseur qui s’exprimait dans un journal. Sa pensée travaillée quasi-quotidiennement profitait incontestablement aux étudiants libanais en sciences sociales. En tout cas, beaucoup plus que les papiers jaunissant d’un bon nombre de paresseux enseignants locaux obnubilés par le titre de « Docteur ».

Joseph Samaha n’était pas chercheur, mais il combinait éloquemment la prise de position avec l’esprit scientifique. Son parcours sinué aussi bien au niveau intellectuel (du nationalisme syrien à l’empathie avec le Hezbollah en passant par le nationalisme arabe et le marxisme) qu’au niveau professionnel (d’al-Hurriyya à al-Akhbar en passant par al-Watan sans oublier les allers-retours entre as-Safir et al-Hayat) en est une belle illustration.

Car cette trajectoire riche nous montre que pour Joseph Samaha, une idée n’est valable que lorsqu’elle est falsifiable. Ce qui exige le passage à une autre idée secrétant à son tour les germes de son propre dépassement. Point de dogmatisme donc et point de souci de sauver une illusoire construction pour le compte de laquelle d’aucuns s’évertuent à travestir la réalité.

A tel point que, plus cet échafaudage brille par sa cohérence formelle plus il se vide de contenu au service d’une batterie de formules mille fois ressassées. Joseph Samaha a été férocement critiqué ces derniers temps par un nombre considérable de ses collègues.

Sa prise de position quasi-catégorique pour un des deux camps en présence sur l’arène politique libanaise en était la cause. Mais qui connaissait bien Joseph Samaha, attendait le moment inéluctable de sa distanciation qui a d’ailleurs été enclenchée les derniers jours précédant sa mort. Or celle-ci ne l’a pas interrompue.

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Bien au contraire, elle l’a cristallisée. Le fait qu’il soit mort à Londres chez Hazem Saghié, son ami personnel et son alter-ego politico-intellectuel, montre bien que l’esprit critique permanent qui les réunissait a eu son fin mot et a triomphé sur la virulente et détestable polarisation politique du moment.

Toute disparition est triste. Mais cette mort a quelque chose de rassurant : Joseph Samaha a fait pleurer toute une génération d’intellectuels libanais en lui interdisant de condamner son souvenir au terme creux de « martyr »…enfin !

Note :

(1) Joseph Samaha est décédé à Londres le 25 février 2006, terrassé par une crise cardiaque. Ancien rédacteur en chef du journal et confondateur du quotidien As Safir, il a également participé à la création du journal Al Akhbar.

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