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Henri Alleg : la mort d’un juste

Le 17 juillet,  nous a quittés Henri Alleg, un militant internationaliste et anticolonialiste connu pour son célèbre ouvrage « La question » qui a permis de dénoncer à grande échelle la pratique infâme de la torture contre les Algériens durant la guerre de libération nationale. Né à Londres le 20 juillet 1921 de parents juifs russo-polonais[], Henri Alleg, de son vrai nom Harry Salem,  est devenu un Algérien de cœur après son installation en Algérie en 1939. Sa grande sensibilité à l’injustice  du système capitaliste et colonialiste en vigueur en Algérie l’a conduit à adhérer au Parti communiste. Ses qualités journalistiques le propulseront en 1951 au poste de directeur du quotidien communiste « Alger Républicain ».

 La répression colonialiste qui s’abat sur tous les partis nationalistes et progressistes à la suite de l’insurrection du 1er Novembre 1954 le poussera à entrer dans la clandestinité dès 1955 et son journal est interdit. Mais Henri Alleg continue son combat par la plume dans la clandestinité en faisant publier en France, dans l’Humanité notamment,  des articles qui témoignent de la brutale répression colonialiste qui sévissait alors contre le peuple algérien.

Le 12 juin 1957, Henri Alleg est arrêté  par les parachutistes français au domicile de son ami  Maurice Audin,  un mathématicien et militant communiste et anticolonialiste algérois qui fut également arrêté et lâchement assassiné sous la torture.  Henri Alleg fut séquestré et torturé par les parachutistes du général Massu durant un mois. Condamné à dix ans de prison pour « atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat », Henri Alleg sera transféré en France mais il réussira à s’évader de l’hôpital et rejoindra grâce à l’aide d’un réseau militant communiste la Tchécoslovaquie.

L’horrible expérience personnelle de la torture inspira à Henri Alleg l’ouvrage « La question ». Mais au-delà d’un récit de témoignage et de dénonciation, « La question » fut un véritable ouvrage de combat anticolonialiste puisque malgré son interdiction par les autorités françaises, il a pu être diffusé clandestinement à 150 000 exemplaires et aura contribué à dénoncer le visage hideux de la répression colonialiste en Algérie et à faire connaître la justesse du combat pour l’indépendance du peuple algérien.

Resté Algérien de cœur, il retourne en Algérie dès la signature des Accords d’Evian et l’établissement  du cessez-le-feu en mars 1962 pour continuer le combat aux côtés des forces du peuple algérien qui allaient réécrire dans des conditions difficiles une nouvelle page de l’histoire de l’Algérie pour la construction d’un Etat moderne, pour le développement et pour la démocratie sociale. Le dénouement malheureux de ces luttes, les  velléités autoritaires de la nouvelle coalition bureaucratique qui a monopolisé le pouvoir et l’incapacité des forces nationales à construire un front uni démocratique et social au-delà de faux clivages idéologiques ont été à l’origine du climat de suspicion et d’exclusion dont de nombreux militants de tous horizons, nationalistes, communistes et islamistes, feront les frais. Henri Alleg en fut de ceux-là puisqu’il a été expulsé d’Algérie au lendemain du coup d’Etat du 19 juin 1965. Mais cette expulsion ne l’a jamais empêché de continuer à porter l’Algérie dans son cœur ni à continuer à soutenir la combat de l’Algérie pour le parachèvement de son indépendance nationale et l’approfondissement de l’option démocratique-populaire dans des conditions historiques particulières.]

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Mais le combat anticolonialiste et anti-impérialiste étant un et indivisible, Henri Alleg, fidèle à ses engagements internationalistes, ne pouvait oublier les autres fronts sur lesquels d’autres peuples continuent à braver l’oppression coloniale et les tentatives de déshumanisation. Comment un militant de la trempe d’Henri Alleg pouvait-il ignorer la lutte contre l’Apartheid en Afrique du sud et la lutte du peuple palestinien contre le colonialisme sioniste ?

Pour ce militant internationaliste d’origine juive, la solidarité avec le peuple palestinien en lutte pour ses droits nationaux légitimes témoigne de la vigueur de sentiments internationalistes nobles et dignes d’être salués avec déférence et respect à un moment où dans sa crise de putréfaction, l’Empire et ses laboratoires cherchent à entraîner les peuples dans d’affreuses guerres de race et de religion qui ne feront qu’aggraver le malheur des peuples.

Même si, à notre connaissance, il n’a pas laissé des textes à ce sujet, dans le cadre d’une réunion publique consacrée à la crise algérienne dans les années 90, Henri Alleg aurait montré une sensibilité aux arguments émis par des militants algériens qui avaient rappelé à juste titre la nécessité de ne pas séparer artificiellement la dimension sociale et la dimension religieuse dans la résistance que des secteurs entiers du peuple algérien menaient contre l’alliance des généraux « éradicateurs » et de la bourgeoisie compradore dont le « républicanisme » de pacotille brandi par des médias aux ordres n’a été finalement qu’un vulgaire masque comme l’a montré la suite des évènements.

Contre la désinformation des grands médias à la solde du Capital, il faut aujourd’hui rappeler les vérités qui peuvent éclairer les jeunes générations et les prémunir contre les dangers du sectarisme et du chauvinisme.  A un moment où les grands médias ont fait l’impasse sur ce cet aspect méconnu du combat d’Henri Alleg contre le sionisme, on ne peut que saluer le rappel judicieux de l’« Association France Palestine Solidarité » : « Il (Henri Alleg) a  pour­suivi son combat anti impé­ria­liste jusqu’à sa dis­pa­rition, après son retour en France, membre du PCF et rédacteur à l’Humanité. Nous avions pu nous en rendre compte à Douai en 2006. Il par­ta­geait la lutte du peuple pales­tinien pour sa libé­ration nationale.  Dès août 2008 il avait par­ticipé à la consti­tution du Comité National de Soutien à Salah Hamouri, jeune Franco-​​Palestinien, innocent, empri­sonné en
toute illé­gi­timité par les forces d’occupation israé­liennes en Palestine. Il était membre de son comité d’honneur. Il avait ainsi contribué à sa libé­ration. Il était membre du comité de par­rainage du Tri­bunal Russel sur la Palestine. Il s’était engagé dans la campagne  un bateau français pour Gaza. »

Quand un juste disparaît, comme notre frère Henri Alleg, le meilleur hommage qu’on puisse rendre à sa mémoire est de se rappeler son combat pour toutes les causes justes qu’il aura portées dans son cœur et d’essayer de les porter à son tour même si les postures politiques méritent d’être renouvelées pour être à la hauteur des nouveaux défis posés par les nouvelles conditions historiques de la lutte actuelle contre l’Empire, ses tentacules et ses nouveaux masques idéologiques à l’échelle planétaire.

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