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GAZA-PALESTINE : de crime en crime… une limite franchie ?

« il y a un chemin qui mène de l’humanité via la nationalité à la bestialité » écrivait Franz Grillpazer au 19e siècle. C’est le chemin que nous avons emprunté depuis la guerre des six jours ».Yeshayaou Leibovitz dans Izkor de Eyal Sivan.

Déshumaniser pour pouvoir frapper :

Le processus qui permet de frapper aujourd’hui la population de Gaza avec une telle violence est entamé depuis longtemps. Pour pouvoir frapper ainsi il faut avoir déshumanisé la cible aux yeux de sa propre population et de la communauté internationale.

Rabin disait pendant Oslo qu’il rêvait de voir Gaza engloutie dans la mer. Comme s’il ne s’agissait que d’une bande de terre vierge de tout être humain. C’est sous son gouvernement que Gaza est entourée d’ une barrière de « sécurité » électronique, inaugurant la politique d’enfermement de toute la population palestinienne des territoires occupés, en Cisjordanie aussi, par un mur dit « barrière de protection » dont la construction est aujourd’hui en voie d’achèvement .

Le retrait unilatéral de Gaza en septembre 2005 achève de nier à tout responsable politique palestinien le statut de partenaire de négociation, d’ôter à toute la population de Gaza le droit de rappeler qu’elle a vécu 38 ans d’enfer avec l’occupation militaire et de dépossession par les 8000 colons, et cela bien avant que le Hamas ne soit élu. ( Rappelons nous du sort tragique réservé au très laïque chef historique palestinien Yasser Arafat, emprisonné dans la Muqata’a jusqu’à sa très suspecte maladie mortelle.)

Janvier 2006 les élections législatives reconnues exemplaires par tous les observateurs internationaux donnent la majorité au Hamas.

Juillet août 2006, l’opération « pluie d’été » soigneusement calée sur l’invasion du Libanpermet de frapper pendant des semaines une population désarmée à l’ombre de la guerre qui occupe les écrans internationaux.

Juin 2007 les sbires de Dahlan armés par Israël tentent un coup de force contre le Hamas, pour reprendre le contrôle de Gaza, échec qui permet la dernière étape : Septembre 2007 Gaza avec son million et demi d’habitants est décrétée « entité hostile » perdant par cette définition tout statut politique et humain. “Le mouvement islamiste Hamas est une organisation terroriste qui a pris le contrôle de la bande de Gaza et en a fait une entité hostile. Cette organisation mène des activités hostiles contre l’Etat d’Israël et ses citoyens et elle est donc responsable de ces activités”.communiqué de la présidence du conseil israélien sept. 2007 et Condolezza Rice confirme aussitôt la portée internationale de cette décision : “Le Hamas est une entité hostile pour les Etats-Unis aussi”, dit-elle l ors d’une conférence de presse avec son homologue israélienne Tzipi Livni.

Elle assure cependant aussi : “Nous n’allons pas abandonner les Palestiniens innocents” dans la bande de Gaza, soulignant que ce territoire ainsi que la Cisjordanie constitueraient “le futur Etat palestinien”. Le siège de la population de Gaza est alors décrété, la privant de tout moyen de subsistance et de soins. Et cela fait 18 mois, bientôt 19.

On a ainsi habitué soigneusement de façon calculée et progressive la « communauté internationale » à oublier un million et demi d’êtres humains, hommes femmes et enfants pour ne voir dans Gaza, que des dirigeants islamistes menaçant Israël et dont il faut se débarrasser à tout prix. A tout prix ! Même si le prix c’est 100 tonnes de bombes par jour, et des dizaines de missiles, 350 morts, 1600 blessés, en 48h et ce n’est qu’un début nous disent les porte parole de l’armée et du gouvernement israéliens.

Se gagner les gouvernements néo libéraux de l’U.E :

Parallèlement, depuis 2001 le gouvernement néo conservateur américain inspire l’U.E. Son idéologie gagne l’Europe et l ’association islam = terrorisme s’y impose progressivement. Les notions de résistance nationale sont gommées par la mondialisation version étasunienne : en Irak, au Liban en Palestine, les peuples menacés envahis sont devenus des peuples terroristes. Sharon a su très tôt profiter de cette opportunité mondiale, et se placer avec sa politique dans le « camp du bien » avec l’occident, au service de l’Occident même, en lutte contre « l’axe du mal ». C’est ainsi que l’UE n’a pas suivi les recommandations de la cour de justice de la Haye demandant des sanctions sur le Mur. Elle a refusé de faire la différence entre les produits issus des colonies et les produits israéliens sur ses marchés, elle a refusé, contre le vote son parlement, de suspendre l’accord d’association avec Israël, et vient à nouveau de décider contre son Parlement d’un rehaussement de ses relations avec Israël qui fera de ce dernier un quasi membre de l’UE.

N’est ce pas là un blanc seing accordé à l’occupation et la colonisation et aujourd’hui au massacre ? Au lieu de sanctions pour exiger un comportement conforme au droit international, l’UE offre des récompenses à un Etat voyou, et son intégration progressive pour services rendus : Israël resterait ainsi conforme à ce qu’en disait son premier concepteur Hertzl un bastion avancé de la civilisation (européenne-occidentale) contre la barbarie.

Une Europe qui ne serait pas si lointaine de l’Europe coloniale du 19e siècle et de ses conceptions : Pourquoi lutter contre le mur alors que l’on en construit aux portes de l’Europe, et contre les violations des droits humains alors que l’on traite les réfugiés de la faim post coloniaux, et sans papiers dans les anciennes métropoles, comme des criminels et du bétail. Cette même Europe n’a pas hésité à punir les victimes de la politique coloniale israélienne en bloquant toute aide aux Territoires Occupés Palestiniens après le résultat des élections qui ont porté le Hamas au pouvoir. Les grands medias français : La nausée de ces jours ci n’est pas due aux excès de la période de fêtes. Il suffit d’écouter en boucle France Info, ou de regarder les chaînes de télévision pour se faire une idée de la réussite de cette stratégie de déshumanisation. Escalade des violences,

Il s’agit d’une guerre entre Israël et le Hamas, La seule gauche israélienne interrogée sur France Info se résume à ceux qui soutiennent l’offensive contre le Hamas, c’est à dire la représentante de La Paix

Maintenant Israël : Galia Golan qui déclarait tristement hier, qu’il fallait bien que s’arrêtent les tirs sur le sud d’Israël et protéger les israéliens. Et aujourd’hui Denis Charbit sur le même ton de « on tire on pleure » répète que cet affrontement était inévitable. LPM croit donc aux solutions militaires dans la région, surtout lorsqu’il s’agit du Hamas, et soigne ses états d’âme comment rester humain ( yeffe nefesh en hebreu : belle âme) et sioniste, pendant l’invasion du Liban, le massacre à Gaza ?

Difficile de se dire progressiste, de gauche, humaniste, et défendre en même temps les positions de l’extrême droite sur le terrain. LPM y pourvoit. Meretz aussi : les sionistes de gauche laïcards à la sauce israélienne cautionnent le bain de sang avec les travaillistes. La télévision française (France2) reprend ce soir quant à elle littéralement la propagande israélienne : le Hamas a fait 400 morts israéliens en 10 ans, ne respecte pas les trêves( !) il n’y a que 56 civils dans le 350 morts de cette opération militaire( !!). Les kassams et la vie infernale qu’ils imposent aux israéliens du sud sont les responsables.

Comme si la bande de Gaza n’était pas bombardée toute les nuits depuis 2 ans bientôt, comme s’il y avait une quelconque comparaison possible entre la puissance de feu de la 4e armée du monde, et celle de quelques dizaines de militants du Jihad Islamique Oserait-on comparer l’état de la ville de Sderot et celui de Rafah de Khan Younis ou de Gaza ?

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Le nombre de civils tués par les tirs israéliens sur Gaza et celui des tués dans le sud d’ Israël pendant les 10 dernières années ? Morbides guerres de chiffres et d’images ? Certes, alors que l’on montre les deux situations ou que l’on ait la décence de se taire. Mieux vaut le silence au mensonge.

Et puis on a la mémoire bien courte : Combien de militants du Fatah ont été assassinés par Israël dans les « assassinats ciblés » avant que l’on s’attaque au Hamas ? La coupure totale de Gaza instaurée par le gouvernement israélien , l’impossibilité pour les dirigeants politiques palestiniens de circuler entre Gaza et la cisjordanie, la violence incroyable exercée depuis longtemps contre Gaza n’ont-elles pas permis et favorisé la montée du Hamas ? Combien de centaines de civils palestiniens hommes femmes et enfants civils désarmés ont été arrêtés et croupissent des mois voire des années sans procès ou jugés par des tribunaux militaires d’occupation c’est à dire illégaux, dans les prisons israéliennes parmi les 11 000 prisonniers ? Combien de destructions de plantations et d’habitations dans les territoires occupés depuis 9 ans ? Combien de trêves respectées des mois durant par le Hamas et violées sciemment par les successifs gouvernements israéliens ? Combien de villes et villages palestiniens encerclés par le mur avec une seule porte d’entrée et de sortie contrôlée par les soldats, combien de femmes enceintes et de malades morts sur les checks points ? Nos principaux grands media sont devenus les valets de la pire des propagande de guerre ils entérinent jour après jour l’effacement de l’occupation de la colonisation et du découpage de la Cisjordanie peuplée aujourd’hui de 450 000 colons, et du siège infâme de Gaza. Ce soir devant la tente de protestation place de la fontaine des innocents un des slogans crié par la foule était :

« Medias montrez la vérité ! »

On se souvient d ’un autre cri de rage lors d’une autre occupation : Radio Paris ment Radio Paris est allemand.

En Israël consensus et propagande :

Le gouvernement israélien avec l’aide de ses media met le paquet sur la société civile israélienne qu’il fait vivre artificiellement dans une véritable atmosphère de guerre de survie : « Un demi million d’israéliens sous le feu » titrait dimanche le Yedioth Ahronoth – comme si la bande de Gaza n’était pas soumise à un long siège qui a détruit pour toute une génération les chances d’une vie qui vaille la peine d’être vécue. » écrit Tom Seguev dans le Haaretz 29 décembre.

Des centres d’urgence psy et de prise en charge des victimes du sud sont ouverts, on parle de transférer dans le nord la population du sud, comme on l’avait fait avec les populations du Nord vers le Sud pendant la dernière invasion du Liban. Comme s’il y avait une commune mesure entre la puissance et la fréquence des tirs du Hezbollah avec celles du Hamas.

Je me souviens de l’été dernier, un ami israélien revenant d’une visite à ses amis près de Tseelim Kibboutz voisin la bande de Gaza et qui racontait ébahi comment toute la famille se baignait dans la piscine et entendait en même temps les bombardements sur Gaza. J’ai passé en février dernier quelques jours de vacances dans le sud d’Israël avec des amis, et le beau temps aidant nous y avons cotoyé de très nombreux touristes israéliens qui ne semblaient pas plus terrorisés que nous par les Kassams.

L’atmosphère de la rue confirmée par les dernières statistiques est celle d’un consensus féroce, 83% de la population soutiendrait l’attaque meurtrière, pour sa propre protection. Le vieux consensus forgé depuis toutes les guerres : nous sommes les victimes nous devons nous défendre, auquel se rajoute le sentiment que cette fois ce ne sera pas comme en 2006 l’échec, mais que l’ on peut gagner… et pour cause. Les Palestiniens d’Israël eux, révoltés par le massacre protestent tous les jours dans leurs villes et villages et dans les grandes villes avec les anticolonialistes israéliens. Très surveillés par la police et l’armée qui procède à des arrestations de plus en plus nombreuses. Pour eux c’est aussi l’heure de vérité : jusqu’à quand les discriminations de plus en plus grandes et à présent inscrites dans les lois, jusqu’à quand la citoyenneté de seconde zone dans un Etat juif où ils sont tolérés et sous contrôle renforcé, considérés chez eux comme l’ennemi de l’intérieur.

La stratégie du pire :

Il faut tout de même se poser la question du but recherché par le gouvernement israélien au delà des intérêts électoraux de cette campagne, qui d’ailleurs pourrait s’avérer peu rentable pour Livni et Barak et finalement profiter à Netanyaou -on ne fait pas une politique de droite mieux que la droite elle même après tout.

Qu’attendent donc les dirigeants israéliens de l’opération « Plomb fondu », que le Hamas se rende à l’armée, quitte Gaza, renonce au résultat de ses élections, et permette à l’AP de reprendre les rênes ? Et après ? Cela avancerait-il des négociations de paix ? Pour le croire il faudrait que l’on ait pu enregistrer un quelconque progrès des négociations rencontres entre Abbas et Olmert depuis 13 mois. Un check point a -t-il été levé en Cisjordanie ? Une colonie démantelée ? Une promesse tenue sur Jérusalem ? Le point mort absolu, pire, la colonisation se poursuit, l’annexion de Jérusalem se parachève.

Transformer la résistance palestinienne à l’occupant en guerre civile inter palestinienne telle a été jusqu’ici la stratégie israélienne de ces dernières années et elle a fonctionné. Pendant des mois on a vu la police palestinienne formée par le général Dayton faire la chasse aux militants du Hamas, tout récemment regarder le pogrom de Hébron, les bras croisés, expliquant qu’elle n’est pas habilitée à intervenir contre les colons (comprendre qu’elle n’est habilitée qu’à frapper les militants Hamas). Mahmoud Abbas a même commencé par déclarer l’attaque israélienne sur Gaza justifiée, comme il avait précédemment encouragé Barak à durcir le siège pour faire plier Hamas.

Cependant la violence exercée sur Gaza et dans les TOP pourrait se renverser la situation et mettre en échec cette stratégie : Les Palestiniens pourraient fort se ressouder devant l’adversité et retrouver l’union nationale qui reste leur principal atout. C’est ce que la rue palestinienne exprime en ce moment même de toutes ses forces et partout.

Le monde arabo musulman bouillonne de colère contre cette agression et la complicité ou la lâcheté de ses propres dirigeants. En Europe la brutalité sans limite israélienne n’échappe pas aux opinions qui se méfient de leurs médias aussi bien que de leurs dirigeants actuels à leur propre égard. Chaque citoyen et habitant des quartiers populaires, attaqué et affaibli dans sa vie quotidienne, et dans ses droits, par des discriminations sociales grandissantes organisées par ses gouvernements associés dans l’UE, apprend à ses dépends à faire la différence entre ce qu’il vit et ce qu’on lui raconte, et ce que vivent les hommes ailleurs et la version officielle. La mondialisation a aussi son versant populaire .

La politique israélienne fondée sur la force brutale et la négation des droits fondamentaux des Palestiniens ne peut trouver écho dans nos cités et nos quartiers. Elle y éveille comme dans le monde arabo-musulman une immense colère. La seule chance de survie d’une population juive dans le Moyen Orient de demain passerait donc paradoxalement par l’imposition des normes du droit international à l’Etat voyou qui les viole toutes aujourd’hui.

Et si la communauté internationale ne parvenait pas très rapidement à imposer par des sanctions sévères le retour d’Israël à la raison, dans le rang des Etats de droit, elle ne pourrait qu’assister impuissante à un véritable déferlement de haine sur sa population et par extension sur les juifs du monde pris en otage de cette politique depuis des années maintenant. Les anticolonialistes israéliens, quelques milliers qui tentent désespérément de faire entendre raison dans leur société, appellent aujourd’hui à l’intervention internationale pour que cesse la folle escalade de la violence israélienne.

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