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France / Liban/ Moyen-Orient : vers la fin d’un partenariat clanique à relent affairiste

L’élection du socialiste François Hollande à la présidence de la République française devrait mettre un terme au partenariat clanique à relent affairiste entre la France et le Liban initié par le tandem Rafic Hariri Jacques Chirac, mais le tropisme israélien du parti socialiste de même que la présence au sein du gouvernement de Jean Marc Ayrault de philo sionistes patentés devraient exclure un recentrage substantiel de la diplomatie française à l’égard du Moyen-Orient.

Une retouche à la marge, pas un chamboulement. Tel est le premier constat qui s’impose avec l’élimination de la vie politique française de Nicolas Sarkozy.

France-Liban-Moyen Orient: Vers la fin d’un partenariat clanique à relent affairiste.

S’y superposant, l’éclipse de l’héritier du clan Hariri, Saad, au profit de Najib Mikati, le nouveau premier ministre sunnite du Liban et la venue d’un nouveau chef du clergé maronite, le patriarche Béchara Rahi, plus réservé que son prédécesseur atlantiste à l’égard des équipées coloniales des pays occidentaux dans le Monde arabe, plaident en faveur d’un tel infléchissement tant au Liban, qu’au-delà, au Moyen-Orient, dans le Golfe, avec le prolongement pétro monarchique de ce partenariat avec le duo Nicolas Sarkozy et le Qatar (1).

La répudiation de ces pratiques anciennes si préjudiciables au bon renom de la France pourrait prendre prétexte de la rotation du personnel politique dans les deux pays. Il tire surtout argument des nouvelles données régionales résultant du passif diplomatique sans pareil généré par la politique erratique de Nicolas Sarkozy dans la zone, amplifié par ce que l’historien américain Paul Kennedy désigne comme «le lent glissement des plaques géopolitiques mondiales».

Nicolas Sarkozy: un champ de ruines diplomatique (2)

Premier dirigeant français de la Vème République à présenter un bilan globalement passif sur le plan diplomatique, Nicolas Sarkozy a laissé à son successeur, à coups d’invectives, un champ de ruines, avec le naufrage du projet phare de sa mandature «l’Union Pour la Méditerranée», le sabordage de sa relation stratégique avec la Turquie, un des acteurs clés au plan régional, l’instauration de la charia talibane en Libye avec l’aide de son compère Bernard Henry Lévy, les avanies en Syrie de son partenaire pétro monarchique, le Qatar, désormais amputé de son joujou français, dessaisi au profit de l’Irak de l’initiative diplomatique arabe, faisant face, de surcroît, à une manœuvre de confinement de l’Arabie saoudite et de Bahreïn, mécontents de son comportement compulsif.

L’élimination des deux partenariats claniques du gaullisme d’entreprise au Moyen- Orient, le clan Hariri au Liban et la dynastie du Qatar, tel qu’il a été intensivement pratiqué par le tandem Hariri-Chirac à son arrivée concomitante au pouvoir dans la décennie 1990, devrait marquer un tournant diplomatique français dans la zone et mettre un terme à deux décennies de fric et de frime.

Elle ne porte pas pour autant garantie d’un rééquilibrage de l’approche française en raison des traditions philo-sionistes du parti socialiste français, quand bien même l’on prête au nouveau président socialiste l’intention de faire un geste symbolique à l’égard des anciennes possessions coloniales de la France, notamment l’Algérie en vue d’y gommer la stigmatisation sarkozyste.

De l’expédition de Suez contre Nasser, en 1956, ordonnée par Guy Mollet, aux ratonnades d’Alger par Robert Lacoste (1955-1958), au caillassage de Lionel Jospin à Bir Zeit pour avoir traité de «terroriste» le Hezbollah libanais, l’unique formation politico-militaire du Monde arabe à avoir infligé un double revers militaire à Israël (2000-2006), à l’esplanade David Ben Gourion dédiée par Khoyya Bertrand Delanoë, le Maire de Paris, au fondateur de l’armée israélienne au lendemain de l’attaque navale israélienne contre un convoi humanitaire turc en direction de Gaza…. Le registre est connu et bien tenu (3).

La filiation est lointaine et ne se dément pas, remontant au grand manitou du socialisme français, Léon Blum, qui invoquera son «trop d’amour» pour son pays «pour désavouer l’expansion de la pensée et de la civilisation française», admettant «le droit et même le devoir des races supérieures d’attirer à elles celles qui ne sont pas parvenues au même degré de culture».

Cette profession de foi surprenante est parue dans le journal «Le Populaire» en date du 17 juillet 1926, sans que ce vénérable humaniste, premier chef du gouvernement socialiste de la France moderne, artisan des premières conquêtes sociales sous le gouvernement du Front Populaire (1936), ne se doute que, lui-même, à son tour, subira, quinze ans plus tard, les lois de l’infériorité raciale de la part de ses compatriotes non coreligionnaires.

Manuel Valls, Pierre Moscovici et Laurent Fabius dans le viseur.

L’éviction de la vie politique française de Dominique Strauss Khan, un des parangons d’Israël, de même que la dérive xénophobe du gouvernement israélien matérialisée par la présence au sein du cabinet de l’ultra-droitier Avigdor Libermann, ministre des Affaires étrangères, n’ont pas pour autant réduit la vigueur du tropisme pro-israélien au sein de la hiérarchie socialiste en ce que la relève est désormais pleinement assurée par Pierre Moscovici, ancien lieutenant de DSK, et Manuel Valls, un sarkozyste de gauche, dont il a hérité de son poste à Beauvau.

Pierre Moscovici, le directeur de la campagne du candidat socialiste François Hollande, confirme cette filiation en exergue du site israélien JSSnews.com: «Si j’ai adhéré au Parti socialiste, en tant que juif français et socialiste, c’est aussi en pensant à Léon Blum».

Le ministre des Finances et de l’économie a certes pris ses distances avec la libido de son ancien mentor, sans pour autant répudier son credo. Celui qui briguait fortement le Quai d’Orsay, est en effet demeuré fidèle à la philosophie politique de DSK, au nom de la lutte contre l’archaïsme diplomatique français, au diapason du gouvernement israélien, se prononçant en faveur d’une action préventive contre l’Iran, corrélativement à une mansuétude absolue envers Israël nonobstant les violations flagrantes de l’état hébreu de la loi internationale.

Le nouveau gouvernement Ayrault comble d’aise d’ailleurs les Français d’Israël en dépit du fait que 92,00 pour cent d’entre eux ont voté pour le rival des socialistes, Nicolas Sarkozy (4).

Quant à Manuel Valls, Valls, lié de son propre aveu, «de manière éternelle à la communauté juive et à Israël », dont, de surcroît, le premier déplacement ministériel en province, le 21 Mai 2012, aura été pour un dîner avec le CRIF PACA Marseille, stigmatise le boycott d’Israël, mais non la phagocytose de la Palestine ou sa rétention des recettes d’exportation des produits de Cisjordanie. Il se place ainsi sur la même longueur que Richard Prasquier, Président du CRIF, dont la tonitruance inconditionnellement pro israélienne s’accommode mal du positionnement qui se veut «normal» du nouveau président français.

La profession de foi de l’ancien directeur de la campagne présidentielle de François Hollande, -lors du lancement du groupe d’amitié avec Israël, le nouveau lobby français pro-israélien en pleine campagne présidentielle en avril 2012, «Israël, grande nation parmi les nations»-, a retenti comme une tartarinade démagogique…En résonnance avec ses prises de position xénophobes à Evry, la ville dont il est le maire, dont il souhaitait y implanter,-selon le modèle des colonies israéliennes?- davantage de «white et de blancos» pour y diluer la population bariolée.

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Une «présidence irréprochable» présuppose un comportement à l’opposé de celui affiché par le nouveau ministre socialiste de l’Intérieur, désormais particulièrement dans le viseur des organisations anti racistes en raison de ses outrances verbales.

Elle commande, parallèlement, une prise de distance envers le traditionnel interlocuteur de l’Internationale Socialiste dans le Monde arabe, le chef druze Walid Joumblatt, dont les jongleries de saltimbanque, ont déconsidéré et le socialisme et la démocratie dont il est le porte flambeau caricatural auprès des dirigeants occidentaux, de la même manière que l’élimination du tandem Nicolas Sarkozy-Alain Juppé devrait entrainer parallèlement le dépérissement du duo oppositionnel syrien Bourhane Ghalioune Basma Kodmani, sans pour autant modifier la donne syrienne du pouvoir français.

Sans surprise, l’expulsion de l’ambassadeur de Syrie en France et la menace de la saisine de la Cour pénale Internationale, dans la foulée du massacre de Houla,-qui a fait près d‘une centaine de victimes civils, quinze jours après l’entrée en fonction de François Hollande, confirme la pesanteur anti syrienne des socialistes en ce que le nouveau titulaire du Quai d’Orsay Laurent Fabius avait cautionné de sa présence le premier congrès de l’opposition syrienne tenu à Paris, en juin 2010, sous l’égide du philo-sioniste Bernard Henry Lévy et la branche syrienne des Frères Musulmans.

Au-delà de ces considérations, la France dont François Hollande hérite n’est pas la France qu’il a connu au début de la mandature de son ancien rival. L’Egypte et la Tunisie ont basculé hors du giron français, dans le camp hostile au tourisme parasitaire du personnel politique français, la crise bancaire de 2008 qui a volatilisé près de 180 milliards d‘euros du patrimoine français du fait de placements dans de fonds douteux ainsi que la crise systémique de l’endettement européen, devraient considérablement réduire la posture exhibitionniste française.

S’y superposant, la dégradation de la notation économique de la France, la paupérisation croissante de sa population avec les tensions sociales sous-jacentes ont entrainé «un lent mais vaste glissement de ses plaques géopolitiques», selon l’expression de l’historien Paul Kennedy au point de nous faire changer d’ère.

Parmi les forces transformatrices de la géostratégie mondiale, l’historien cite cinq facteurs: la quête d’indépendance des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), l’érosion du dollar comme monnaie de référence mondiale, la paralysie du projet européen, l’ascension de l’Asie et la décrépitude des Nations unies.
Le double camouflet infligé à la France et au Qatar dans leur guerre de Syrie, par le véto combiné de la Chine et de la Russie, a constitué à cet égard e un revers significatif à l’hégémonie américaine depuis l’implosion de l’Union soviétique dans la décennie 1990.

L’hostilité de trois membres du BRICS (Inde, Afrique du Sud et Brésil) à l’unilatéralisme atlantiste, en traduisant ce nouveau rapport de forces sur le terrain, a témoigné, par contrecoup, de l’égarement de la diplomatie française sous l’impulsion d’Alain Juppé, censé être «le meilleur d’entre nous».

Un activisme contreproductif sanctionné par la déconfiture de l’opposition externe syrienne chapeautée par Paris et par le dégagement du pouvoir du duo Juppé Sarkozy, préalablement à leur homme à abattre Bachar al Assad……..avec en perspective la démission du chef nominal de l’opposition syrienne de nationalité française Bourhane Ghalioune, paravent moderniste à des groupements islamistes.

Le choix de François Hollande a constitué pour plus d’un tiers de son électorat un choix par défaut. Un vote de sanction anti-Sarkozy plutôt qu’un vote d’adhésion à sa personne. Retirer dans ce contexte les troupes d’Afghanistan pour les expédier vers la Syrie serait difficilement justifiable alors que la France, en état de faillite, fait face à une cure de rigueur.

Entonner la rengaine habituelle du parti socialiste en affichant sans retenue un philo-sionisme tapageur comparable à celui de son prédécesseur pourrait lui aliéner la sympathie de larges couches de l’opinion française, sans pour autant que la soumission au Likoud ne lui assure, en retour, de percevoir des dividendes israéliennes, comme son successeur en a fait la triste expérience.
Et plutôt que de se lancer dans une politique déclamatoire, à coups d’effets d’annonce et d’effets de manche, en vue d’abuser son peuple, François Hollande serait avisé de se donner les moyens de sa politique faute d’être réduit à la politique de ses moyens.

De s’engager, dans une zone en transition, sur la voie d’une résolution durable des problèmes lancinants qui gangrènent la relation euro-arabe, notamment la dénucléarisation du Moyen Orient, la claire délimitation des zones de prospection pétrolière dans le triangle Liban Chypre Israël, une claire reconnaissance des éléments représentatifs de la société arabe aussi bien le Hamas palestinien que le Hezbollah libanais, enfin, dernier et non le moindre, un règlement équitable du conflit israélo arabe, véritable test de crédibilité de la nouvelle diplomatique française en ce que l’affaire palestinienne est la résultante du jeu trouble des puissances occidentale dans leur découpage arbitraire de la zone, à l’origine de la désaffection croissante du Monde arabe à l’égard des Occidentaux.

En un mot d’engager un patient travail de cicatrisation des plaies béantes générées par la véhémence de celui qui a incarné mieux que tout plus que personne, la fonction de tête de pont sur le théâtre européen de l’axe israélo-américain, en sa qualité de «premier président de sang mêlé» de France, dont le zèle compensatoire en a fait le plus détesté du monde arabe dans l’histoire de la Vme République.

Références

1-Pour aller plus loin sur le partenariat clanique du tandem Hariri Chirac cf. à ce propos
-http://www.renenaba.com/chirac-hariri-l%E2%80%99implosion-du-couple-vedette-de-la-politique-moyen-orientale-de-la-decennie-1990/
Et sur la relation entre Nicolas Sarkozy et le Qatar cf. à ce propos http://www.renenaba.com/libye-le-zele-de-la-france-en-suspicion

2- Bilan de Nicolas Sarkozy sur le plan interne, selon la Fondation terre Nova (proche du Parti Socialiste). Nicolas Sarkozy est «le recordman de la hausse la plus brutale du taux de chômage depuis trente ans ». A 8,1% en 2007, le taux devrait être autour de 10% en 2012, selon les dernières prévisions de l’Insee. La baisse des moyens consacrés à la lutte contre le chômage s’est accélérée depuis 2008 (-10,5% entre 2010 et 2011 et -11,3% entre 2011 et 2012), pointe Terra Nova. Le think tank estime que certaines mesures, comme la défiscalisation des heures supplémentaires ont eu des effets néfastes sur l’emploi en période de crise. La dette publique a explosé de 600 milliards d’euros, alors que, parallèlement, les cadeaux fiscaux se sont élevés à 75 milliards d’euros et que 350.000 emplois industriels ont été détruits, générant 337.000 pauvres supplémentaires.

3- A propos du contexte de l’inauguration de l’esplanade David Ben Gourion à Paris cf lettre ouverte à Bertrand Delanoê par René Naba http://www.renenaba.com/lettre-ouverte-a-bertrand-delanoe/

4– Le gouvernement Ayrault satisfait les Français d’Israël http://jssnews.com/2012/05/16/ayrault1/

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