in

Le cheminement vers la paix est le fondement même de l’Islam

« On vous trompe et vous vous trompez. L’Islam est une religion de laquelle on ne peut sortir sous peine de sanction », m’a-t-on dit un jour au sujet de la contrainte en islam. N’étant ni théologienne, ni savante, ni même arabophone, mais simplement une croyante ayant embrassé l’islam, j’ai souhaité répondre modestement au niveau où je place ma foi, celui du cœur et de la réflexion.

Bien plus important que toutes les connaissances que l’on pourra brandir pour argumenter telle ou telle thèse, bien plus certain est le fait que l’on ne peut ni être trompé, ni se tromper, lorsque l’on sent avec son cœur que l’on chemine vers ce qui met en paix.

Le cheminement vers la paix est le fondement même de l’Islam. Les voies qui nous sont montrées dans le Coran, les règles qui y sont édictées, ont pour finalité de fournir à l’Homme les moyens d’accomplir l’état « d’âme apaisée ». L’Homme se saisit ou pas de « ces outils », et s’en saisit au niveau de conscience qui est le sien. C’est son choix, sa liberté.

Le Coran dit : « Nous t’avons fait descendre le Livre, pour les hommes, en toute vérité. Quiconque se guide [le fait] pour son propre bien ; et quiconque s’égare, s’égare à son détriment. Tu n’es nullement responsable [de leurs propres affaires]. » [39:41] Les groupes (Az-Zumar).

L’Homme est donc de façon absolument individuelle, responsable de ses actes, actes qui n’ont de valeur que par l’intention qui les anime :  « Dieu ne vous sanctionne pas pour la frivolité dans vos serments, mais Il vous sanctionne pour les serments que vous avez l’intention d’exécuter. » [5:89] La table servie (Al-Maidah).

En ce sens, la foi en Dieu ne peut être que le fruit de la libre adhésion et non d’une contrainte extérieure à l’Homme par la société, par son entourage. En effet, quel sens auraient des actes contraints et dépourvus d’intention personnelle dans une perspective d’apaisement et d’élévation de l’âme ?

« Si ton Seigneur l’avait voulu, tous ceux qui sont sur la terre auraient cru. Est- ce à toi de contraindre les gens à devenir croyants ? » [10:99] Jonas (Yunus)

« Nulle contrainte en religion ! Car le bon chemin s’est distingué de l’égarement. Donc, quiconque mécroit au rebelle tandis qu’il croit en Dieu saisit l’anse la plus solide.. » [2:256] La vache (Al-Baqarah).

Alors, si nous sommes religieusement libres de croire ou de ne pas croire, comment comprendre le sens des « obligations » religieuses ? Et comment surtout, comprendre la notion de châtiment pour celui qui n’aurait pas cru ?

De mon modeste point de vue, il n’existe de contrainte en premier lieu, que vis-à-vis de soi. Est–on contraint vis-à-vis de Dieu ? Il est dit clairement dans le Coran :« Quiconque retourne sur ses talons ne nuira en rien à Dieu » [3:144] La famille d’Imran (Al-Imran). De quelle nature est donc cette contrainte ? Serait –elle une restriction volontaire de notre propre liberté, un formatage à penser et à se comporter d’une seule façon, qui serait la bonne ?

La nature de la contrainte religieuse est plutôt celle d’un engagement vis-à-vis de soi même. L’engagement de cheminer vers cet état libérateur de « paix de l’âme » par un profond et rigoureux travail sur soi.

Dans cette perspective, les prescriptions Coraniques (la prière, le jeûne, la zakat..) agissent comme des outils pour avancer sans s’égarer, un rappel renouvelé de notre place dans la création, de notre but : la purification de l’âme. Un cheminement qui ne peut être figé vu que tout en nous et autour de nous est en perpétuel mouvement. Un cheminement qui est donc tout le contraire d’une obéissance aveugle aux règles mais un exercice de compréhension du sens de notre vie qui prend appui précisément sur ces contraintes, ces obligations rituelles.

Publicité
Publicité
Publicité

Investie de cette façon, l’obligation apparente agit comme une « clé » : cette clé qui ouvre (fatiha) c’est le discernement. Le discernement du droit chemin d’entre les autres. C’est cela qui nous guide et nous mène vers Dieu dans un état de Paix avec soi et les autres, en harmonie avec l’ensemble de la création et non en contradiction ou en opposition. C’est un état de béatitude. C’est le sens que je donne à la Fatiha.

Mais cette clé doit être constamment en lien avec notre intime conviction de l’Unicité de Dieu et de sa Magnificence, de sa miséricorde… de tous les attributs qualifiants Dieu. C’est ce qui nous permet de modifier notre approche de l’existence. Elle engendre un regard à la fois humble et constructif sur nos expériences de vie, qui, dans cette perspective, ne sont plus « subies » mais deviennent au contraire source d’apprentissage et d’évolution par la réflexion qu’elles suscitent quant à leur sens profond.

Pour autant, si l’engagement religieux est un engagement vis-à-vis de soi, il ne peut absolument pas être individualiste. Notre parcours de foi n’a de sens que dans la relation qui nous lie à nos semblables et aimer Dieu ne peut passer que par l’amour et la compassion pour son prochain. C’est pourquoi les obligations religieuses comportent aussi une dimension « horizontale », sociale.

Ainsi la souffrance de notre prochain, dont nous sommes tenus d’être solidaires, est aussi un don de Dieu qui nous permet de nous purifier. Comme l’exprime si bien Reza Shah Kazemi « les limites qui nous séparent de tous les autres êtres sont rendues transparentes à la lumière de l’unité intrinsèque de l’humanité », unité de l’humanité qui, elle-même, est le reflet de l’unité de Dieu.

C’est donc dans cette dimension de solidarité égalitaire, de non jugement et d’amour que notre foi nous engage envers autrui. Une spiritualité qui n’est pas détachée du monde mais qui prend racine en lui pour le transcender :

« Où que vous vous tourniez, là est la face de Dieu. » [2:115] La vache (Al-Baqarah).

Comme pour tout engagement, le renier est lourd de conséquences. N’est ce pas dans ce sens qu’il faut comprendre par : « Et ceux parmi vous qui adjureront leur religion et mourront infidèles, vaines seront pour eux leurs actions dans la vie immédiate et la vie future. Voilà les gens du Feu : ils y demeureront éternellement » [2:217] La vache (Al-Baqarah).

La sanction, le châtiment contre lequel nous sommes durement mis en garde est donc à l’exacte mesure de notre responsabilité dans ce que nous œuvrons pour nous-mêmes.

Pour autant, le rappel de notre responsabilité et la menace du châtiment ne sont pas source d’accablement pour l’Homme. Le perpétuel équilibre entre le châtiment et la Miséricorde Divine dans le Coran permet de créer en l’Homme une dynamique d’évolution par laquelle il est constamment appelé à mesurer la portée de ses actes, les rectifier et les parfaire.

Une « pédagogie » de l’évolution adaptée à chaque Homme, quelles que soient ses aptitudes et ses particularités : « Dieu n’impose à aucune âme une charge supérieure à sa capacité. » [2:286] La vache (Al-Baqarah).

C’est ainsi que ce qui, en superficie, peut être pris comme une contrainte, devient, en profondeur, un puissant levier de liberté. Ceci n’est que le modeste effort de réflexion d’une personne qui puise dans son expérience de croyante et il doit être pris comme tel. Qu’Allah pardonne mon ignorance, Lui Seul Est Savant.

Publicité
Publicité
Publicité

Laisser un commentaire

Chargement…

0

Aymeric Caron dénonce vigoureusement l’apartheid israélien à la tribune de l’Assemblée nationale

Ces Maghrébins, héros de la Résistance française