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Bertrand Heilbronn, président de l’AFPS: “Le combat pour les droits du peuple palestinien est une question de droit et de justice”

Pour sa première participation au grand rituel dînatoire du CRIF, le président Macron a pris des positions fortes, à la fois sur le statut de Jérusalem et les actions de boycott contre Israël menées dans le cadre du mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Santions), qui ne pouvaient que faire réagir Bertrand Heilbronn, président de l’Association France Palestine Solidarité (AFPS).

A la tête de l’association qui, comme son nom l’indique, a vocation à soutenir le peuple palestinien dans sa lutte pour recouvrer sa souveraineté, en fédérant autour de cette grande cause, noble et urgente, toutes les personnes attachées au droit des peuples à disposer d’eux- mêmes, Bertrand Heilbronn a accepté de répondre aux questions d’Oumma.

Lors de la 33ème édition du dîner du CRIF, mercredi dernier, Emmanuel Macron s’est opposé avec la même fermeté à la décision de faire de Jérusalem la capitale d’Israël, qualifiée de « véritable erreur », et aux actions BDS qu’il juge « indignes » et souhaite voir « poursuivies et sanctionnées ». Que répondez-vous à ses prises de position fortes ?

En décembre dernier, le CRIF avait demandé au président de la République de suivre l’exemple de Trump. C’était une demande scandaleuse et surréaliste : au nom de quoi une organisation communautaire française peut-elle prendre ainsi position sur la politique de la France vis-à-vis d’un Etat tiers ? C’était la moindre des choses qu’Emmanuel Macron s’y oppose et qu’il signifie clairement au CRIF que ce n’est pas lui qui doit dicter la politique étrangère de la France.

En ce qui concerne le droit d’appeler au boycott, on se demande parfois comment les dîners du CRIF peuvent aboutir à de telles dérives. Qui a jamais parlé de boycott de produits juifs, alors qu’il s’agit du boycott de produits israéliens pour protester contre la politique d’un Etat, ou de la demande d’interdiction des produits des colonies ? L’appel au boycott pour protester pacifiquement contre la politique d’un Etat fait tout simplement partie de la liberté d’expression. Aucune loi ne l’interdit, et les quelques condamnations prononcées sont contestées devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme, dans une procédure qui est en cours (http://www.france-palestine.org/Liberte-d-expression-et-droit-d-appeler-au-boycott-procedure-en-cours-devant-la )

Est-ce que l’ère Macron est un changement dans la continuité concernant le traitement, en France, de la question israélo-palestinienne ?

La France, et avec elle tous les pays européens représentés au Conseil de sécurité de l’ONU, a pris une position très ferme contre la décision de Trump. Nous en prenons acte. Au-delà, les positions de la France sont encore bien timides : la diplomatie française hésite à tourner la page du rôle des Etats-Unis, alors qu’ils ont perdu toute crédibilité, le France n’a toujours par reconnu l’Etat de Palestine malgré les recommandations de l’Assemblée nationale et du Sénat depuis plus de trois ans… On peut souhaiter que la France prenne plus clairement position pour le droit, reconnaisse l’Etat de Palestine, envisage puis applique des sanctions contre les violations de ce droit par Israël. C’est sur ces bases qu’une initiative internationale reprendrait tout son sens. On en est encore loin mais l’avenir reste ouvert.

Que répondez-vous à ceux qui vous accusent d’importer dans l’Hexagone ce qui est communément appelé le “conflit israélo-palestinien” ?

Importer le conflit israélo-palestinien serait le transposer en une guerre de communautés en France. L’AFPS est à l’exact opposé de cette conception : notre démarche et notre combat sont fondés sur le droit, ils sont ouverts à tous indépendamment de toute démarche communautaire. Les incendiaires sont ceux qui prennent position dans ce conflit au nom d’une appartenance communautaire, et notamment le CRIF qui se comporte comme une annexe de l’ambassade d’Israël : c’est totalement irresponsable de leur part.

La critique d’Israël et de son colonialisme forcené est-elle toujours aussi muselée et assimilée insidieusement à l’antisémitisme ?

Formellement, on a le droit de s’exprimer librement en France, mais les mécanismes qui limitent la liberté d’expression sont plus subtils. Les partisans inconditionnels d’Israël diffusent la peur et l’intimidation, en accusant d’antisémitisme toutes celles et ceux qui contestent sa politique. Du coup, nombre de responsables politiques et de médias n’osent plus s’exprimer ou hésitent à nous donner la parole.

Cette forme d’intimidation a tendance à s’accroître, et les amalgames en font partie. La menace est toujours là, même si le président de la République n’a pas réitéré ses déclarations de juillet 2017 faisant le parallèle entre l’antisionisme et antisémitisme, et n’a pas donné suite aux demandes du CRIF sur une prétendue « définition » – manipulée – de l’antisémitisme.

Enfin, des agressions encore plus délibérées contre la liberté d’expression sont maintenant orchestrées par le gouvernement israélien partout dans le monde : tenter de discréditer les défenseurs des droits des Palestiniens, les mettre sur une liste noire pour leur interdire d’aller en Palestine, faire fermer des comptes Paypal… Nous n’avons aucune intention de nous laisser faire.

Observez-vous une prise de conscience dans l’opinion publique française sur la souffrance du peuple palestinien et le bien-fondé du mouvement BDS ? Y a-t-il un fossé qui se creuse à ce sujet entre la population et la classe politique ?

Nous pensons que le soutien aux droits du peuple palestinien est depuis plusieurs années majoritaire en France. Le caractère caricatural des prises de position de Trump et l’extrémisme du gouvernement israélien ne peuvent qu’accentuer cette tendance.

Beaucoup de responsables politiques se posent aussi des questions, mais la peur et l’intimidation font encore leur effet.

Pouvez-vous nous en dire plus sur les objectifs de votre grande initiative « Six principes pour une expression libre et démocratique sur la question israélo-palestinienne » ?

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Cette initiative, même si nous y avons contribué, est avant tout une initiative citoyenne lancée par ses premiers signataires : intellectuel.les, hommes et femmes politiques, syndicalistes, acteurs des médias. Les « 6principes » (https://6principes.fr) ont vocation à rassembler très largement sur des idées simples : le droit de s’exprimer, la condamnation du racisme sous toutes ses formes, le refus des amalgames, la résistance aux pressions et aux intimidations. En ce qui concerne les moyens pacifiques d’agir tels que le BDS, les signataires peuvent avoir des avis différents mais défendent le fait qu’il s’agit d’une liberté qui doit être protégée.

Par cette initiative, les signataires, dans la diversité de leurs engagements, affirment que le débat sur la question israélo-palestinienne peut être vigoureux, mais qu’il devra rester exempt de toute pression, intimidation, amalgame ou attaque personnelle.

Pour vaincre la peur et l’intimidation, il faut une démarche collective aussi large que possible : c’est le sens de cette initiative, pour laquelle les signatures restent ouvertes à toutes celles et ceux qui, dans leur fonction ou leur engagement, se reconnaissent dans ces objectifs.

La cause de Salah Hamouri, de nouveau victime de l’arbitraire israélien, vous tient particulièrement à cœur. Nous avons appris qu’il avait courageusement boycotté le tribunal israélien, suite à la prolongation de 4 mois de sa détention administrative. Comment supporte-t-il cet acharnement ? Quelles actions menez-vous pour parvenir à sa libération ?

Les prisonniers palestiniens en détention administrative le sont sur ordre du gouvernement israélien. Cet ordre est ensuite avalisé par des tribunaux, dans des audiences où les avocats n’ont pas accès aux dossiers. Les détenus administratifs palestiniens, dont Salah Hamouri, ont décidé de ne plus se plier à ce simulacre. Comme les autres prisonniers politiques palestiniens, Salah Hamouri sait que son combat est juste et c’est ce qui lui permet de garder un moral d’acier, malgré l’injustice et la gravité de ce qu’il subit et de ce que subit sa famille.

Dans le cas de Salah Hamouri, qui est citoyen français en même temps que résident palestinien de Jérusalem, la prolongation de sa détention est un camouflet pour la France. Le président de la République, qui a demandé sa libération, devrait s’en souvenir et accentuer la pression sur le gouvernement israélien… Nous ne lâchons rien. Nous continuons à exiger sa libération immédiate et à envoyer des cartes pétition au président de la République. Plus de 1700 élus lui ont écrit aujourd’hui.

Vous appelez également à la libération de la jeune Ahed Tamimi, dont la mascarade de procès, reporté à plusieurs reprises, devrait avoir lieu à huis clos aujourd’hui, dimanche 11 mars. Quelle issue entrevoyez-vous pour elle, sa mère et ses deux cousins, tous les quatre emprisonnés ?

Le tribunal militaire d’occupation n’a cessé de retarder leur procès et a récemment procédé à des arrestations massives et arbitraires dans leur famille, et parmi les autres habitants du village de Nabi Saleh. On ne peut rien attendre de positif de la part de la justice militaire israélienne. Seule la mobilisation en leur faveur, qui est forte et mondiale (la pétition pour la libération de Ahed Tamimi a dépassé 1,7 millions de signatures), peut contraindre le pouvoir israélien à les libérer dès maintenant.

Pour signer la pétition : https://secure.avaaz.org/campaign/fr/free_ahed_mor_fb1/ 

Avez-vous un message particulier à délivrer aux Oummanautes ?

L’indignation et la colère sont des réactions naturelles lorsque l’on voit ce que l’Etat d’Israël fait subir au peuple palestinien. Elles ne doivent jamais se transformer en haine de l’autre : le combat pour les droits du peuple palestinien est une question de droit et de justice.

Sur ces bases, chacune et chacun peut trouver toute sa place, avec sa propre histoire et sa propre personnalité, dans un combat qui nous rassemble tous, indépendamment de toute « appartenance » communautaire. C’est l’ambition que nous portons avec nos 100 groupes locaux (http://www.france-palestine.org/groupes ),  partout en France.

Propos recueillis par la rédaction Oumma

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12 commentaires

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  1. Il n’y aura jamais d’etat palestinien souvrain.
    1. Le privilege d’un etat souvrain est la signature d’accords internationaux entre pays.
    Or, deux mois apres la ” sollonele ” creation de l’etat palestion nous serons temoins de l’atterissage du Ministre de la defence palestinien a Teheran pour la signature ” d’accords de defence bilateraux entre la palestine et Teheran ”
    En clair, les palestinuens, souvrain dans leurs pays inviterons les iraniens a envoyer une force militaire iranienne, dans ce cas les gardiens de la revolution, pour je cite ” soutenir le peuple palestinien a defendre et rejeter les visees imperialiste de l’etat sioniste sur les lieux saints musulmans a Jerusalem.
    Resultas, six mois apres la creation de l’etat palestiniens Israel se retrouvera face a mille fanatiques iraniens armes sur les murs de Jerusalem.
    Non Sans Blague !

  2. Défendre un « droit au retour », c’est entretenir une illusion meurtrière, envoyer des enfants à la mort, éterniser un conflit qui n’a qu’un seul bénéficiaire : la droite expansionniste israélienne.
    Est-ce cela que nous voulons?
    Une seule piste pour en sortir: converger avec la gauche pacifiste israélienne.
    Ne soyons ni sionistes, ni anti-sionistes, mais post-sionistes. Lisez Schlomo Sand.

  3. Oui le coloniseront par le ventre de leurs femmes, donnant des mains et des bras à merxi corvéables pour les premières générations, pour dire à tel point les pays d’acceuil Ont été ingrats, car c’est cette génération qui a construit la France post 45,

    Puis leur enfants s’instruiront bâtissent et bâtiront la France de demain, celle du numérique et de l’enyree Dans les nouvelles technologies, Francais à part entière ils ne se laisseront pas faire, et constitueront les Élites de demain, au grand dam des craintifs de là fécondation des peuples et des civilisations seule issue du renouveau humain sur tout les continents, remplacement y aura point, cai l’humain est irremplaçable,

  4. Ce conflit est une mascarade on sait pertinemment que ce pseudo pays qu’on appelle Israël a été créée pour avoir un contrôle stratégique totale sur la région et les richesses du moyen Orient les gouvernement utilisent la religion pour noyer le poisson mais la réalité est là des millions de pertes humaines pour des milliards de dollars. La politique est utilisé pour bien diviser les peuples, les banques sont présentes pour mieux contrôler les richesses et les États au sommet de la pyramide s’occupent de bien tyranniser et spolier vos biens. L’exploitation de l’homme par l’homme voilà la devise du capitalisme une dictature intellectuelle monétaire. Quand les musulmans en auront marre de s’entretuer pour du papier peut être qu’ils retrouveront leurs honneurs qui a fait la gloire de l’islam ils s’uniront pour avancer vers un monde meilleur.

  5. L’europe n’as pas réfusé de les convertir, mais strategiquement, il fallait leur creer un foyer national pour qu’il gardent scrupulesement, cette vaste région, reconquise selon un nouveau mode de croisade, une ènieme croisade, toujours plus devastatrice, la derniere fut celle menée par le clan Bush,

  6. Manderley, les arabes et autres à Amazighes sont venus en Europe pas par plaisir, il n’y a pas pire que le déracinement mais par nécessité, immigration économique, décriée à juste titre par le commun des occidentaux, mais c’était le juste retour de manivelle historique, amorcé par crise pétrolière des années 70 ou les gouvernants du Nord ont décidé de serrer la ceinture à ceux du sud, mise en quarantaine de leur économie, appauvrissement, enfin une mise à mort des pays du tiers monde, Avec l’intervention d’un croque-mort qui est le FMI avec sa politique dévastatrice, ce qui explique qu’on n’en est là
    Maintien en place de dictateurs de tout poil, Assurant les canaux de pillage des richesses des pays du Sud, d’ailleurs le président Boumediene dans un discours historique à l’ONU avais dit si l’Occident n’accepte pas le juste partage des richesses alors émigrerons verre Le nord les peuples du sud, le coloniseront grâce au ventre de leur femmes,

  7. Le seul souci du président de l’AFPS est qu’il mène un combat d’arrière-garde qu’aujourd’hui les Palestiniens de la rue rejettent eux-mêmes: celui de 2 Etats selon la doxa très occidentale du dossier… il faut arrêter cette imposture dont on voit les affres depuis des décennies…
    ce que les autorités israéliennes ont mis en place depuis des années interdit dorénavant toute possibilité de ce projet contenu dans les Accords d’Oslo dont on dit à raison qu’ils sont morts et enterrés depuis longtemps. Persister dans ce projet est donc une perte de temps et d’énergie, en plus d’une erreur politique que le peuple palestinien paie cher, chq jour.
    Les Palestiniens le savent pertinemment et ne voient d’autre issue à cette guerre coloniale que dans la résistance armée pour renverser le cours des choses et en arriver à retrouver la Palestine historique où vivront tous ceux qui le désirent, sans Etat d’apartheid comme c’est le cas actuellement. Et ceux qui ne le supporteront pas seront priés de rentrer dans leurs pays d’origine! Toute autre position ne fait que reprendre les discours de l’occident dominant au détriment des populations civiles palestiniennes, premières concernées.

    • Pour l’extrême droite : le problème de l’Europe c’est les musulmans qui sont en Europe, à tort ou à raison , peu importe.

      Pour la gauche est la droite gauchée, le problème de l’Europe , c’est les musulmans qui sont chez eux de l’autre rive de la méditerranée , encore à tort ou à raison peu importe.

      Le problème du monde est l’ordre dicté par la première guerre dite mondiale.
      Cette guerre n’est pas encore finie.Tous les politiques le savent , mais que voulez vous, l’homme est plus carriériste q’humain.

  8. On prend les gens pour des imbéciles.
    Le conflit était entre les musulmans et le monde judao chrétien pendant la première guerre dite mondiale.
    Avec le temps , il est devenu conflit entre les sionistes et la nation dite arabe.
    Actuellement, il s’agit du droit du peuple Palestinien.

    L’état dit hébreux pour beaucoup d’observateurs et politiciens, ne dépassera pas 2027.
    Seuls les juifs originaires de la région ont un droit sur le sol,
    Les autres invention de Théodore Herzl doivent regagner l’Europe qui a renoncé à les convertir.

    • L’europe n’as pas réfusé de les convertir, mais strategiquement, il fallait leur creer un foyer national pour qu’il gardent scrupulesement, cette vaste région, reconquise selon un nouveau mode de croisade, une ènieme croisade, toujours plus devastatrice, la derniere fut celle menée par le clan Bush,

  9. Tout observateur impartial sait que le conflit créé par Tel Aviv depuis 1948 est le noeud de tous les conflits au Moyen-Orient et, par extension, vu l’importance stratégique, économique, religieuse, idéologique de cette région le noeud des conflits dans le monde. Ce qui oblige tous les peuples du monde à s’occuper de cette question. et c’est dans ce contexte que se posent les questions du BDS d’un côté du terrorisme visant surtout cette région de l’autre. Pour comprendre cela, ce texte d’un impérialiste anglais du début du XXe siècle est éloquent :
    “There are people [the Arabs] who
    control spacious territories teeming with manifest and hidden resources.
    They dominate the intersections of world routes. Their lands were the
    cradles of human civilizations and religions. These people have one faith,
    one language, one history and the same aspirations. No natural barriers can
    isolate these people from one another … if, per chance, this nation were to
    be unified into one state, it would then take the fate of the world into
    its hands and would separate Europe from the rest of the world. Taking
    these considerations seriously, a foreign body should be planted in the
    heart of this nation to prevent the convergence of its wings in such a way
    that it could exhaust its powers in never-ending wars. It could also serve
    as a springboard for the West to gain its coveted objects.”
    From the Campbell-Bannerman Report, 1907

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