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Assiste-t-on à une montée de l’islamophobie en France ?

Un début d’incendie d’origine criminelle a endommagé, samedi 20 décembre, la mosquée de Saint-Priest, près de Lyon, suscitant des condamnations unanimes et la colère de la communauté musulmane, qui appelait à manifester dimanche 21 décembre pour dénoncer une « montée du racisme et de l’islamophobie ». Cette profanation est la troisième, en France, depuis le mois d’août

Vincent Geisser Chercheur à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman. CNRS-université Aix-Marseille (1)

« La survenue de cet événement doit être prise avec prudence. Nous ne sommes pas dans un contexte de pogroms où les musulmans seraient attaqués à tous les coins de rue. En revanche, nous avons affaire à des groupes extrémistes qui ont en partie reconverti leur sentiment antisémite vers les musulmans. Il s’agit probablement de groupes d’idéologie d’extrême droite, plus radicaux que le Front national. Cela dit, quel est le climat actuel en France ? Effectivement, on observe une tension à l’égard de l’islam, notamment depuis les attentats du 11 septembre 2001. Cette tension peut se manifester de différentes façons, sans qu’il y ait nécessairement un lien entre elles.

Ainsi, d’un point de vue intellectuel, on note l’avènement de discours critiques, plutôt modérés mais aussi parfois tendancieux, sur l’islam, venant de penseurs, comme celui tenu il y a quelque temps par un philosophe dans un quotidien national. D’un autre côté, on assiste à des actes de provocation, des gestes criminels menés par des groupes extrémistes. Comme si ces derniers se sentaient soutenus par la tenue de discours critiques, alors qu’il n’existe pas de réels liens entre les deux. Plus précisément, la méfiance à l’égard de l’islam n’est pas tant un refus de la religion qu’une peur des musulmans. D’un côté, le discours sur la religion est apaisé, irénique, pacifié et pacifiant, les musulmans apparaissant de plus en plus comme un objet de curiosité, pas forcément malsaine d’ailleurs. Les médias, notamment la télévision, nous livrent de plus en plus d’informations sur la philosophie, la littérature, la société, l’art et l’histoire des musulmans. De l’autre, les musulmans semblent être porteurs, dans leur vie quotidienne, de pratiques, visibles et spécifiques, qui dérangent.

D’où la nécessité, pour les autorités publiques, d’intervenir plus directement et plus rapidement pour dénoncer ces actes odieux visant à dresser une partie de la communauté contre une autre et à maintenir un ciment national. On remarquera d’ailleurs qu’aujourd’hui cette intervention se fait au plus haut niveau, en la personne du président de la République ou du premier ministre, alors qu’autrefois la prise de parole publique s’effectuait plutôt au niveau de secrétaires d’État ou de préfets. »

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Propos recueillis par Denis SERGENT

(1) Auteur de La Nouvelle Islamophobie, éd. La Découverte, 2003)

http://www.la-croix.com/article/index.jsp ?docId=2359915&rubId=786

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