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Anne Frank et sa famille dénoncées par un notaire juif ? Et alors ?

Au matin du 18 janvier 2022, certains médias dont France Inter ont annoncé qu’une grande enquête internationale, menée par un ex-membre du FBI, serait arrivée à la conclusion qu’Anne Frank et sa famille auraient été dénoncées aux nazis par un notaire juif qui, en livrant à l’occupant d’autres juifs, aurait voulu sauver sa propre famille.

Depuis, c’est l’émoi, le trouble s’est installé. Et si c’était vrai ? Pour conjurer cette possibilité, des journalistes et des historiens remettent en cause à la fois la méthode – depuis quand un policier, fût-il du FBI, est-il crédible comme historien ? – mais aussi les conclusions – en est–on sûr ? Car, pensent-ils, cette hypothèse, si elle se vérifiait, alimenterait les théories antisémites fondées sur le fait que les juifs se seraient trahis entre eux. Ce faisant, ils tombent dans les rets de la logique nazie. En effet, que l’hypothèse du notaire juif délateur soit vraie ou pas ne change rien au fond de l’affaire.

Du point de vue de la vérité historique, cette information revêt quelque importance, mais politiquement, que le délateur de la famille Frank soit possiblement juif ne change rien à ce qu’a été la machine de guerre nazie dans ses différents rouages. Cela ne change rien à l’histoire de l’antisémitisme européen au XXe siècle et à sa manifestation la plus tragique dans l’histoire, à savoir le nazisme.

Ce qui reste central et qu’il ne faut pas perdre de vue, c’est ce qu’engendre la politique nazie qui, ainsi que le disaient Césaire et Arendt, mais aussi, plus récemment, Johann Chapoutot, s’inscrit dans le droit fil de la violence occidentale et du colonialisme européen.

Qu’un notaire juif ait voulu sauver sa peau et celle de ses enfants en donnant d’autres juifs aux nazis n’est peut-être pas glorieux, mais cela n’est qu’un effet du désastre politique dans lequel ce notaire s’est retrouvé confronté.

L’ensauvagement dont parle Césaire dans son Discours sur le colonialisme touche tous les sujets confrontés à l’impérialisme, au colonialisme et aux politiques raciales en général, nazisme compris. Le monde nazi est à l’image du colonialisme. La déshumanisation qu’il instaure atomise le champ de l’humain, détruit la politique, les réseaux sociaux, les solidarités, les tabous et anéantit tout idée d’espérance. Et chacun veut sauver sa peau, sauf des fous que l’on appellera héros qui tiennent bon et résistent, mais qui se comptent sur les doigts de la main.

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Il en a été ainsi dans toutes les situations similaires. C’est pourquoi cette polémique est parfaitement incompréhensible à quiconque se pique d’histoire. Cette dégringolade de l’humain au niveau zéro, que ce soit dans les camps d’extermination mais également de concentration, poussant des hommes à vendre d’autres hommes pour un quignon de pain est banale. Ces harkis qui, dans leur très grande majorité, ont trahi leurs frères algériens en combattant dans l’armée coloniale pour sauver leur village, éviter la torture ou pour sauver leur peau, n’ont-ils pas été fabriqués par le colonialisme français ?

Dans l’histoire française ceux qui ont trahi Jean Moulin, le précipitant vers sa mort via Klaus Barbie, n’étaient pas allemands mais bel et bien français. Ce qui aujourd’hui semble surprendre nombre de journalistes n’est, en effet, pas nouveau.

Hanna Arendt dans « Eichmann à Jérusalem » dénonce les Judenrat, conseils de collaboration mis en place par les nazis dans les ghettos juifs d’Europe de l’Est, formés de notables juifs avec même une police faite d’individus obéissant aux nazis. Cependant 90 % des chefs des Judenrat ont été au final exécutés ou se sont suicidés. Ainsi Adam Czerniakow, chef du Judenrat de Varsovie, finira-t-il par se donner la mort quand il a compris que ce marché serait sans limite dans l’abjection et l’abdication de soi-même.

Le notaire juif d’Amsterdam, lui, n’a peut-être pas été rattrapé par un tel cas de conscience, sans doute parce que sa responsabilité n’était qu’individuelle et que l’essentiel pour lui était de sauver ses enfants. Que les médias se focalisent sur la judéité du délateur en dit long sur la désorientation politique contemporaine et sur la dépolitisation de la question juive et de l’antisémitisme. Que le fait divers ou l’acte individuel et désespéré prenne le pas sur la réalité d’une politique d’État est atterrant.

Les responsables de la mort d’Anne Frank sont les nazis.

Noureddine Yahia
L’Union juive française pour la paix 

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2 commentaires

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  1. Effectivement, ce qui n’est hélas que l’ordinaire du genre humain suscite ici une indignation particulière, on n’est plus dans la question qui a livré Anne Frank et pourquoi, mais dans la question est-il possible que ce soit bien un notaire Juif et comment se fait-il qu’un policier se mêle d’histoire?

    Ce genre de mauvais questionnement et d’indignation mal apliquée et peut-être surjouée relève du Sionisme, qui contient forcément beaucoup de suprématisme et d’exceptionalisme.

    Voilà pourquoi il faut continuer à dénoncer l’odieuse assimilation de l’anti-sionisme à l’anti-Judaïsme, dérive qui se propose à lier les langues des gens justes et finalement à valider tout suprématisme, tout impérialisme et violentisme colonial. Continuez votre combat, il est noble et juste.

    Croissant de lune.

  2. Et alors, par le passé, j’ai entendu dire la phrase : Vos compatriotes vous ont vendu.
    Toue la police du monde a ses mouchards.

    Le semitisme est plus large que les juifs, les arabes sont semites.

    Sioniste veut dire aussi que les anciennes victimes du Nazi deviennent les nouveaux boureaux, comme les Boudhistes , les anciennes victimes de l’empire Japon, deviennent les nouveaux boureaux.

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