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Ahmet Tuzer, l’imam rock’n’roll de Turquie

Il n’a pas fait vœu de silence et son credo « Ma musique est l’un des moyens de se rapprocher de Dieu » résonne de sa singularité, à 42 ans, Ahmet Tuzer n’est assurément pas un imam comme les autres. Prédicateur le jour, chanteur la nuit venue, l’imam rock'n’roll de Turquie ne cesse d’élargir sa notoriété, en s’attirant d’un côté les foudres des autorités religieuses de son pays, et en déclenchant de l’autre l’enthousiasme de ses fans, dont certains comptent peut-être au nombre de ses fidèles.

Passant de sa petite mosquée, située dans le village côtier de Pinarbasi, où il prêche devant près de 150 personnes, à son groupe de rock « FiRock », où il donne de la voix avec l’aisance de sa polyvalence, Ahmet Tuzer assume pleinement sa métamorphose nocturne, jugée impie pour les uns, et spectaculaire pour les autres, se disant prêt à lutter pour avoir le droit de concilier ses deux activités de prédilection en tout point compatibles à ses yeux.

Issu d’une longue lignée d’imams, ce dernier, qui a endossé ses responsabilités religieuses à l’âge de 19 ans, marche sur les traces de ses aïeux à sa manière, en jeans et cheveux mi-longs, que d’aucuns considéreront comme sortie des bons rails, et s’apprête à sortir son premier album de « rock musulman », gage d’un succès qui a couronné une tournée effectuée dans plusieurs villes turques.

Oscillant entre chants religieux et heavy métal, le groupe dont il est la rockstar mêle le mysticisme islamique et la musicalité des accords de Led Zeppelin, ou des Pink Floyd, pour répandre la bonne parole auprès des plus jeunes dans une harmonie de sons auxquels ils seront sensibles. Ainsi, la vidéo du groupe « Venez à Dieu » a fait un tabac, attirant plus de 50 000 visiteurs sur Youtube, un engouement qui n’a fait que croître avec sa diffusion sur les chaînes de télévision turques.

Mais les éminents représentants religieux qui veillent au grain en Turquie ne l’entendent pas de cette oreille, et Ahmet Tuzer, le trublion de l’imamat, détonne à ce point qu’il fait l’objet d’une enquête rigoureuse afin de déterminer si sa double casquette n’est pas un trop lourde à porter, frisant l’hérésie pour les plus conservateurs de ses détracteurs. Abdul Kadir Ozkan, un porte-parole de la Diyanet, a refusé de donner des détails sur son cas, se contentant de préciser : "Si un fonctionnaire veut apparaître à la télévision ou en concert, il doit obtenir la permission … Nous menons une enquête."

  

Loin de se laisser démonter, Ahmet Tuzer a plutôt tendance à hausser le ton, récusant les allégations qui salissent son honneur, notamment celles qui le soupçonnent de faire de juteux profits et d’exercer une mauvaise influence sur la jeunesse : "Je ne chante pas sur Satan, ni sur le sexe ou sur la violence" se défend-il. "Ce n'est pas du death metal !", s’indigne celui qui voue un culte à Freddy Mercury, l’icône gay du célèbre groupe Queen, et ne s’en cache pas, au risque d'ulcérer ses pairs, tout en indiquant qu’il ferait appel si jamais on l’obligeait à choisir entre sa vocation d’imam et sa passion pour le rock.

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Outre sa femme, une roumaine catholique convertie à l’islam, qui est sa plus proche alliée, l’imam iconoclaste, qui aime que ça déménage mais pas au point de que tout son monde s’écroule autour de lui, peut également compter sur le soutien sans failles d’un notable de sa petite bourgade de Pinarbasi, où son style inimitable ne laisse pas indifférent, la perplexité l’emportant sur tous les autres sentiments.

Yusuf Acar, 67 ans, approuve, quant à lui, sans réserve l’aventure musicale dans laquelle s’est lancée Ahmet Tuzer, étant revenu enchanté de l’un de ses récents concerts : "Nous lui souhaitons bonne chance et nous sommes fiers de lui", a-t-il déclaré à la presse, en ajoutant toutefois qu’une fois rentré chez lui, il préférait de loin le son de l’Adhan aux envolées rock’n' roll de son imam inclassable…

Le "rock musulman" interprété par un imam rock'n'roll et un rocker qui a la foi.

 

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