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Respect des principes islamiques par opposition à instauration d’un Etat islamique

Reconnaître la place particulière que l’islam occupe au sein de l’Etat en Indonésie est un point essentiel pour l’avenir de la démocratie dans ce pays. La plupart des Indonésiens musulmans souhaitent que l’Etat respecte les traditions islamiques sans pour autant vouloir la création d’un régime islamique ; la frontière entre soutien et opposition à la loi islamique est par conséquent souvent floue.

De nombreux Indonésiens, notamment les musulmans non pratiquants, croient en un système de valeurs conservateurs et sont partisans de règles morales strictes qu’ils ne considèrent pas forcément comme purement religieuses, fondées sur la charia ou sur des principes islamiques. De ce fait, on peut facilement croire par erreur qu’adhérer à ces règles morales conservatrices c’est soutenir un islam politique, alors qu’il s’agit tout simplement d’avoir des valeurs morales strictes.

Il en va de même pour le rejet, de la part de nombreux musulmans indonésiens, de certaines conventions et normes sociales généralement associées aux valeurs démocratiques occidentales, notamment en ce qui concerne le pluralisme et la laïcité tels que nous l’entendons. Or cela ne fait pas non plus des Indonésiens musulmans des théocrates ou des antidémocrates.

Le débat politique se limite souvent à opposer islamistes et non-islamistes, or le problème est bien plus subtil et pour qu’il puisse y avoir une négociation démocratique, tous les partis devront reconnaître ce fait afin de parvenir à un terrain d’entente.

A ce propos, le docteur Ahmad Shboul, président de la Faculté des études arabes et islamiques à l’Université de Sydney, nous rappelle que séparer la religion de l’Etat n’équivaut pas à faire table rase de cette première dans la société. Il ajoute que même les Etats les plus laïcs du monde occidental n’ont jamais voulu faire cela.

Selon Ahmad Shboul, les tentatives américaines de laïciser la politique dans le monde arabe auraient eu un effet inverse et aurait au contraire fait progresser l’islam politique. Les Occidentaux feraient mieux de se rappeler que la société démocratique ne revêt pas qu’une seule et unique forme.

En effet, nous ferions bien de nous rappeler que même en Occident, les notions de démocratie fluctuent et changent avec le temps.

En partenariat avec le CGNews

Comme le souligne Robert W. Hefner, professeur en anthropologie et directeur de l’Institute on Culture, Religion and World Affairs (CURA) de l’Université de Boston, si autrefois la famille était perçue comme le pilier de la culture occidentale, aujourd’hui, c’est souvent la liberté individuelle qui prime sur l’unité familiale. De plus, la notion même de famille a pris un tout autre sens, du fait que pour les Américains il existe toute une variété de possibilités, comme le concubinage, le mariage civil et le mariage homosexuel.

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Malgré un consensus sur de nombreuses questions importantes, les différentes sociétés occidentales tiennent chacune à sa propre notion d’équilibre des droits individuels et des besoins de la communauté, d’égalité et de liberté, et même du rôle de la religion et de la morale au sein de la politique. A l’instar des démocraties occidentales qui ont chacune leur définition, les démocraties musulmanes ont-elles aussi leur propre pluralisme.

Le dé bat sur l’adoption d’une législation fondée sur la charia montre que les Indonésiens veulent continuer à analyser certains points importants concernant la nature même de leur démocratie. Le débat ne porte pas vraiment sur la question de savoir si la charia est une bonne ou mauvaise chose mais il s’agit plutôt d’en comprendre la vraie signification et d’en définir le lien avec l’Etat, et forcément avec la philosophie nationale du Pancasila, expression fondamentale du pluralisme indonésien, qui reprend des pensées hindoues, bouddhistes et occidentales.

En fin de compte, ce débat porte sur la définition même de la nation indonésienne et ce que signifie d’être indonésien. Nous avons tous des identités multiples. Nous pourrions nous définir comme étudiant, professeur, mari, femme, athlète ou musicien, à partir de tout un éventail d’images qui forment notre personne faite de divers éléments. Cependant pour qu’une nation puisse définir ce qu’elle est, il est essentiel qu’un des composants ancrés dans l’esprit de ses habitants soit celle de leur identité nationale.

Cependant, il ne suffit pas d’être simplement américain, allemand, indonésien ou turc. Pour sentir qu’on appartient à une nation, il faut que l’identité nationale corresponde à un sens de la communauté et il est donc nécessaire d’avoir un certain nombre de valeurs communes.

La plupart des nations sont issues d’une longue histoire et d’ un passé communs. Dans la plupart des pays d’Europe occidentale, la langue, la religion et des traditions culturelles viennent renforcer ce passé. Ainsi, Italiens et Français, pour la plupart catholiques, prirent de plus en plus conscience de leur différence et cette prise de conscience devint l’expression de leur nationalisme.

De même, les Indonésiens sont musulmans comme d’autres peuples, mais l’islam n’est qu’un élément de leur identité nationale- cela est d’autant plus vrai pour les dizaines de millions d’Indonésiens qui ne sont pas musulmans.

Le défi de l’Indonésie est de trouver une façon de faire une place pour la charia, sans que cela détruise le caractère unique de ce pays par rapport au reste du monde musulman, et sans non plus que cela ne lèse les Indonésiens non musulmans.

En partenariat avec le CGNews

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