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Les représentations identitaires entre vérités et contres vérités d’une citoyenneté indéfinie ! (partie 1)

« Rien ne sert, en effet, de posséder les meilleures lois, même ratifiées par le corps entier des citoyens, si ces derniers ne sont pas soumis à des habitudes et à une éducation entrant dans l’esprit de la constitution. » Aristote

« Ne perdez jamais de vue ce que je vous disais en commençant : si dans une cité on n’a pas équilibré avec une juste mesure les droits, les fonctions et les devoirs, de telle sorte que les magistrats aient assez de pouvoir, le conseil des grands assez d’autorité, et le peuple assez de liberté ; on ne peut s’attendre à ce que l’ordre établi soit immuable. » Cicéron

Tour d’horizon

En ces temps troubles, les mots, les réactions, les maux et les lois s’enchaînent à un rythme effréné, entre passion et virulence, laissant peu de place à la pertinence et à l’apaisement ! Cette situation n’est pas seulement liée aux échéances électorales, mais surtout à l’absence d’une vision claire de la société de demain. Une société de droit, de solidarité ou règnent paix et justice.

Crise du lien social, crise économique, crise de l’engagement politique et crise de la créativité se succèdent et s’amplifient devant la bonne santé de la consommation brute et abrupte. Les uns considèrent à raison que notre cher pays régresse sur tous les fronts, économique, social, culturel, et surtout politique, « c’est une évidence » ! Cela est d’ailleurs corroboré par des études sérieuses sur la montée et l’aggravation de la précarité, par les statistiques catastrophiques sur le chômage et l’accès au logement et par des décisions politiques dangereuses.

La loi Perpen 2 démontre et prolonge le durcissement sécuritaire, initié par le tandem « Raffarin2 – Sarkozy ». La fièvre de légiférer à tout bout de champ est couronnée par la loi totalitaire sur l’exclusion et « pour la discrimination à l’école » dite loi contre les signes religieux à l’école (sic). Cette loi, votée par 496 députés, restera dans les annales de la république comme la mascarade de l’unanimité de la honte ! « Belle pièce de théâtre », ou comme le dit le philosophe Alain Badiou1  : « On dira que c’est moins grave. Certes. C’est moins grave. Devant feu le Tribunal de l’Histoire, nous obtiendrons les circonstances atténuantes ». Spécialiste des coiffures, il n’a joué dans l’affaire qu’un petit rôle.

Boucs émissaires.

Tous ces problèmes ont-ils un point commun dans l’esprit de nos concitoyens ? Réponse malheureusement tranchée et catégorique : oui, le point commun concerne ces « hordes barbares », appelées de manière conventionnelle « les enfants de l’immigration » !

Le Pen savait en son temps trouver les mots pour désigner en « ces enfants et leurs parents » dits « immigrés », les faiseurs de malheurs et les poseurs de problèmes sociaux, dans une France « blanche » et « paisible ». Le reste de la classe politique, au demeurant complice de ce jeu de l’extrémisme, surfe sur les sentiments et les émotions d’une population mal aimée, mal considérée, mal logée et pas assez libérée des séquelles de l’occupation ou de la colonisation. La suite, vous la connaissez, elle est condensée dans les 30 dernières années, à partir de 1974 : le regroupement familial (sic), ouf quel acquis, puis la manipulation via des associations-écrans type SOS racisme (on savait trouver les slogans mais pas les droits). Le « testing » à l’entrée des discothèques fut un succès et s’ajoute aux autres acquis de la stigmatisation « made in Julien Dray » et ses marionnettes à piles, dernières en date les NPNS, (Nouvelles Pathologies Narcissiques Sévères) ou plus poétiquement pour les libérées d’un spot publicitaire « Ni Putes, Ni Soumises » ! Et le triste spectacle de la constitution des listes électorales pour les régionales, où les quelques candidats avec un nom « arabe », arguments exotiques, ont provoqué la volte-face des dirigeants de l’UMP et les explications alambiquées des autres partis de gauche. Quelle gauche-droite ? Du gâchis !

Problème ! Pourquoi n’arrive t-on pas à respecter cette population à majorité citoyenne et porteuse de la nationalité française ? Pourquoi ces citoyens qui enrichissent fidèlement la France sont-ils méprisés dans leur choix le plus cher, leur croyance ? Pourquoi entretenir l’amalgame entre des citoyens honnêtes et terroristes ?

Nous n’avons pas la prétention de répondre définitivement en ces quelques lignes à ces questions, comme à la série de questions posées dans le dernier article « l’imaginaire de l’autre entre nos peurs et la quête de reconnaissance  ». L’objectif est de partager des éléments d’analyse, de susciter la réflexion et d’approfondir la prise de conscience pour pouvoir participer ensemble à l’élaboration de solutions durables et respectables dans le cadre d’un changement social juste et de justice.

Comprendre profondément ce que signifie pour chacun de nous « identité française », décortiquer le climat social, les agitations intellectuelles autour de la question de l’islam, démasquer la prétention des « pseudos-intellectuels » de la nouvelle génération militante de l’islamophobie, (voir à ce propos : Yves Charles Zarka, L’islam en France, hors-série de la revue Cités, publié aux PUF, 733 pages, Figaro me 10 mars), sonder le discours des politiques, les réactions des acteurs associatifs et cerner les contours d’une double identité française et musulmane compatible avec les principes de la République sont les principaux objets de cette modeste réflexion.

Les valeurs de la France entre discrimination, crispation et ouverture.

Notre postulat :

« Le plus beau titre sur la terre, est d’être Français ; c’est un titre dispensé par le ciel qu’il ne devrait être donné à personne sur la terre de pouvoir retirer. Pour moi, je voudrais qu’un Français d’origine, fût-il à sa dixième génération d’étranger, se trouvât encore Français s’il le réclamait. je voudrais s’il se présentait sur l’autre rive du Rhin, disant « je veux être Français » que les barrières s’abaissassent devant lui, et qu’il rentrât triomphant au sein de la mère commune »

Napoléon, Sainte-Hélène, Mémorial, t.2.

La France dite « profonde », une majorité de la société et sa classe politique peinent à reconnaître aux citoyens de confession musulmane les mêmes droits, la même égalité. On peut se rassurer en évoquant les six peurs2 que nous générons dans l’imaginaire de nos concitoyens mais cela restera insuffisant ! Surtout si on pousse l’analyse sur le pourquoi de cette prédisposition subjective à la peur de telle population ? Mais semble-t-il, le vrai problème est celui de la définition de l’identité française « pure souche » ; nous ne sommes pas considérés « culturellement », « socialement » et « religieusement » du même monde. Il ne s’agit pas là d’une provocation, ni d’une surenchère, mais bien de la réalité amère.

On peut se croiser dans la rue, prendre le même métro et faire ses courses dans le même centre commercial, mais ne pas appartenir au même destin social et économique. Ceci est le constat terrible de plusieurs années de travail social, sur le terrain de la précarisation généralisée et l’appauvrissement des âmes. Mais l’espoir et le combat du changement social doivent persister.

Se côtoyer et regarder le même programme télé ne veut en rien dire que nous sommes égaux. On peut être dans le même espace-temps et s’ignorer, voire se mépriser. C’est d’ailleurs ce qui arrive le plus souvent, on peut dire que c’est un « sentiment » discriminant ou, suivant la formule consacrée, « raciste ». Cela ne changera pas le fond du problème. Ne crions pas au scandale, certains parmi vous lanceront la Marseillaise en chœur : « nous sommes citoyens français et de surcroît enfants de la République qui protége nos libertés et veille scrupuleusement aux respect de nos droits ». Je l’espère (même si je suis sceptique) mais avant d’user vos cordes vocales dans des cris de désespoir, faisons un petit tour dans la presse et l’édition du mois et juste après, nous essayerons de proposer une analyse des mécanismes identitaires dans notre société française.

Quatre récentes indications.

Le monde de l’édition et de la presse est en ébullition ces derniers mois. Nous avons pris

« subjectivement » quatre références qui sont considérées par leurs auteurs comme le fruit de l’objectivité.

  1. La première est au niveau européen : réfléchir à la « dimension spirituelle et culturelle de l’Europe » est le souhait de M. Prodi, qui a chargé le philosophe Krzysztof Michalski, avec 11 autres personnalités politiques et intellectuelles de préparer un rapport sur la question des valeurs fondatrices de l’Europe.

  2. La deuxième est le cri du cœur de Philippe Beneton3 dans les colonnes du Figaro daté du 19 février dans son article L’amour des siens, qui commence par : « La France et l’Europe sont victimes d’une grande illusion : tout le monde peut vivre avec tout le monde ». Et d’ajouter plus loin, « l’antichristianisme se porte bien, mais tout point de vue sur l’islam doit s’entourer de mille précautions »…. » Cette situation inédite dans l’histoire de la France et de l’Europe, où s’opère non une simple immigration mais une grande migration et où s’installe une population dont la religion est étrangère à la tradition des pays d’accueil, ne doit être envisagée et traitée que sous l’angle des règles formelles ».

  3. La troisieme est l’émission4 sur Europe 1 avec l’écrivain Denis Tillinac sur son livre Le Dieu de nos pères, défense du catholicisme (Editions Fayard), où il considerait l’islam comme religion étrangère qui doit rester cantonnée. Sans commentaire !

  4. La quatrième est la réaction haineuse de l’économiste philosophe Guy Millière5 dans son article Cet occident tenté par le renoncement , extrait de son livre Qui a peur de l’islam  ! (éditions Michalon). Monsieur le philosophe, sans nuance aucune, prononce sa sentence : «  l’islam militant, et plus largement l’islam aujourd’hui est l’une des composantes matricielles de l’anti-humanisme. Je le pense. Je le dis. Cela doit changer. »

Ces points de vue sont très révélateurs du malaise et éclairent d’un jour nouveau le débat sur les mécanismes d’intégration des populations dites « immigrés ». On peut hurler sa colère, mais il faudrait admettre l’évidence : s’il y a un point positif dans le malheur relatif à la loi d’interdiction du voile à l’école, c’est bien l’avancée spectaculaire dans l’extériorisation des sentiments et des « intentions » des hommes politiques et des intellectuels. La verbalisation des ressentis de nos concitoyens autour de la question de l’islam nous fera certainement gagner du temps dans la compréhension et la lutte contre les discriminations.

La crise des identités et l’avenir d’un vivre ensemble ? Questions de repères !

« Lorsqu’une opinion a pris pied chez un peuple démocratique et s’est établie dans l’esprit du plus grand nombre, elle subsiste ensuite d’elle-même, et se perpétue sans efforts, parce que personne ne l’attaque. Ceux qui l’avaient d’abord repoussée comme fausse finissent par la recevoir comme générale, et ceux qui continuent à la combattre au fond de leur cœur n’en font rien voir ; ils ont bien soin de ne point s’engager dans une lutte dangereuse et inutile. » A.Tocqueville

L’identité de notre société est-elle hétérogène ou homogène ? Au regard du débat de ces derniers mois sur les signes religieux et la laïcité, la pluralité dans la société française est-elle une simple juxtaposition de communautés ou bien le ferment d’une réelle identité commune ?

Le brassage dans les marchés du dimanche a-t-il son équivalent dans l’administration publique le lundi ? Le métissage dans les écoles maternelles a-t-il son équivalent à l’ENA ? Quels sont les critères de cette identité ? Identité singulière ou identité plurielle ?

« L’identité française », entre ses valeurs humanistes et ses réflexes protectionnistes, laisse-t-elle une place au droit et à l’égalité des citoyens ?

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Ce débat a permis à beaucoup de nos concitoyen(ne)s de s’exprimer sur les ondes des stations radios, dans les pages de la presse de toutes les sensibilités, et tant mieux, même si la tendance de ces réactions verse dans le rejet des citoyens de confession musulmane, et formule une demande explicite de protection de la vraie « identité française » ! Ces réactions sont le fruit d’un double phénomène d’incompréhension entre concitoyens et d’une conception identitaire néo-coloniale. Encore une fois, la « thérapie collective » autour du voile permet de libérer les langues, avec le vœu pieux de circonscrire dans l’« espace-pensée-temps » les étrangers non communautaires, cela devient résurgent semble-t-il. Nous assistons à un sursaut de chauvinisme inégalé. Le détournement de la phrase du Général de Gaulle dans le bulletin du Front National n’est pas anodin : « La France est un pays de race blanche, de civilisation gréco-latine et de religion catholique »*.

Nous l’avons déjà dit, l’islam est considéré à tort comme une religion étrangère et les musulmans comme de vulgaires et potentiels criminels qui doivent rester sous surveillance. Comme le souligne Joêl Roman6 dans son excellent article Pour un nouveau contrat social, « L’islam est ainsi quadruplement suspecté : d’être essentiellement contraire et hostile à l’occident ; d’être archaïque dans sa religiosité ; d’être une religion importée, et de manifester ainsi le refus d’intégration de ses adeptes ; et enfin, d’être en continuité ou en contiguïté avec les terroristes qui se réclament de l’islamisme radical ».

L’Europe a une mémoire courte et sélective. Ainsi, la civilisation islamique et son rayonnement humain, scientifique, culturel et artistique, mille ans ou 800 ans en Espagne, ne sont qu’un vague souvenir réduit à une peau de chagrin. Averroès, Al Kîndî, Avicenne, Jaber ibl Hâyan, Ibn khaldoun ne sont que des simples « penseurs à bougies », devant les éternels « philosophes des lumières ».

Cette situation inédite, de blasphème à « mémoire historique », participe d’une stratégie de déstabilisation et d’humiliation qui produit l’exclusion et renforce les mécanismes discriminatoires. D’ailleurs ce n’est pas un hasard si la majorité de ces populations est parquée dans des ghettos urbains. La question du logement restera comme l’un des indicateurs les plus importants pour déterminer le respect ou pas de la dignité des citoyens.

Le plus insidieux dans la politique sociale en France est la légitimation de la discrimination par des procédés légaux ! Un exemple avec la question du logement : les communes sont obligées d’avoir un quota de 20% de logements sociaux sinon elles s’exposent à une amende, d’après la loi de « solidarité et renouvellement urbains » ! Dans la majorité des cas, les communes, dans un souci de « propreté raciale » préfèrent la facilité légale de payer une amende dérisoire que de permettre une réelle mixité sociale dans le logement et par la suite dans les écoles de leurs communes. Mieux encore, cette loi non appliquée est en passe d’être assouplie par le gouvernement actuel. Voilà un « délit » non prescrit de « communautarisme ».

Le carré de la représentation et de l’enfermement négatifs de l’Islam.

Il s’agit d’une sacrée strangulation mentale : le citoyen français moyen « comme celui européen » est sous l’emprise d’une quadruple pression dont les racines remontent loin.

  1. Un lourd passé historique et conflictuel lié au traumatisme religieux et au processus de la sécularisation.

  2. La douloureuse question sociétale, entre exclusion et chômage, s’impose au quotidien.

  3. Les images de violence récurrente sur la scène internationale, souvent dans des pays à population musulmane. La question internationale s’invite avec force dans le débat national, comme un alibi de « méfiance » vis-à-vis des citoyens de confession musulmane. L’exemple le plus frappant est celui de la « dictature de Sharon », régime répressif et colonial, mais sa critique fait « violence » à une certaine élite et classe politique qui a la manie de tout faire passer sans discernement par le filtre de « l’antisémitisme » afin d’occulter le vrai débat et pervertir les causes de la situation sociale catastrophique.
    bis L’émergence d’Al Qaida dans le champ médiatique de la terreur, depuis les monstrueux attentats du 11 septembre, a un effet de souffle sur le débat ; désormais toute valeur liée à l’islam et aux musulmans est perçue à travers le seul prisme de ce groupuscule « terroriste » dont les liens entre ses responsables et la CIA sont établis depuis longtemps. Une alliance abjecte des uns et des autres pour salir l’islam, au point qu’avoir une « cassette du coran » dans sa voiture ou/et un « recueil de hadiths » écrit en arabe chez soi est considéré comme une preuve de lien avec les extrémistes, les terroristes…. Le mépris et le mélange de genres sont ahurissants.

  4. Une abondante littérature de pamphlets, utilisant les outils les plus performants pour dénigrer l’islam et les musulmans, sans aucune nuance. On a beau dire qu’ E. Renan est d’un autre temps, ses citations agrémentent de nombreuses publications récentes. On a beau démasquer la perversité de l’orientalisme – voir à ce propos l’excellent livre du défunt Edward Said -, le machiavélisme et la course à la notoriété ne laissent plus de place à la probité intellectuelle chez nos journalistes, intellectuels, et islamo-politologues de circonstances.

Ce carré de la peur cerne et touche au plus profond les consciences, et inhibe presque toute volonté de compréhension de la part de nos concitoyens. Encore une fois, il ne s’agit pas de réitérer une hypothétique thèse de complot, mais de mettre en lumière les niveaux de blocages et valoriser les efforts de ceux de nos concitoyens qui luttent pour se libérer de ce carré du désespoir et qui continuent de nous enrichir par leurs critiques non complaisantes. La lucidité doit être de rigueur.

Nous n’allons pas poursuivre les constats et les exemples ; notre objectif est de démontrer les connexions entre le malaise social et la politique gouvernementale (qui ne souffre aucun clivage gauche-droite) au sein de notre société. Au lieu de se gargariser avec de belles formules de « vivre ensemble », auxquelles nous nous accrochons tous – comme citoyens de confession musulmane-, il faudrait déployer les efforts nécessaires et exiger de la classe politique des moyens concrétisant les intentions et une mobilisation à même d’assurer le vivre ensemble dans le cadre des valeurs que nous partageons.

Souffrance sans victimisation, le combat de tous les instants.

On croit comprendre ce dont on parle habituellement, précisément parce qu’on en parle habituellement, entre les mots et les choses il y a une telle connexion que l’on est souvent porté à prendre les uns pour les autres, quand on a des paroles dans l’oreille on croit volontiers avoir des idées dans l’esprit ». Christiane besson

Nous avons une grande responsabilité dans ce qui se passe ! Notre attitude comme citoyens, membres ou pas d’une association, n’est pas à la hauteur des enjeux, car même s’il y a eu des initiatives fort intéressantes, même si un bout de chemin a été parcouru dans la dignité, cela reste en deçà des besoins et des attentes.

Nous sommes prisonniers d’une conception réactive et émotionnelle, à l’instar de ce débat public sur « l’islamophobie » où un homme dans le public interpelle de manière « virulente » un élu local sur la nature de sa présence à ce débat. La réponse du politique a été sans détour, cinglante et exprimée sur un registre qui en dit long : « Je pensais que l’islam était une religion de paix  ! ». Sans commentaire, chercher le lien de corrélation.

En ces temps troubles, et devant le délire qui touche la classe politique en ce qui concerne l’Islam et les citoyens de confession musulmane, les démarches de réflexion et les prémisses de coordination autour des différents collectifs commencent à dissiper l’angoisse et à répondre avec des actions construites et responsables. On s’accrochait tous à une lueur d’espoir et on misait sur cette double démarche courageuse de rapprochement dans le monde associatif : d’abord en interne, entre des associations musulmanes toujours distantes et encombrées par des passifs et des calculs de je ne sais quoi, puis à l’extérieur, avec des associations de la société civile laïques ou pas.

On peut épiloguer longuement sur ce travail de rapprochement positif qui se situe bien avant les événements importants du Larzac et du FSE mais ce n’est pas l’objet de cette mise au point. Néanmoins le constat sur ce plan est très positif, grâce aux bonnes volontés des acteurs qui ont fait de ce projet une priorité. La liste des initiateurs est longue, même si seule une infime partie est médiatisée. Mais la fragilité est aussi là, fragilité double et menaçante qui dénote un manque de lucidité au moment même ou le débat au sein de la « communauté de foi » doit être exigeant et qualitatif. On assiste à quelques sorties de piste et à quelques lapsus révélateurs d’un malaise généralisé entre la base et les responsables des associations musulmanes. Pire encore entre responsables associatifs eux-mêmes dont le rôle doit être avant tout de nuancer, d’apaiser et d’orienter vers des perspectives meilleures. Mais consciemment ou inconsciemment, on rentre aujourd’hui dans une autre logique ! Les réactions autour des manifestations républicaines du mois de février ont démontré le besoin de revoir les stratégies et les communications des uns et des autres.

On ne se réjouit pas de l’erreur ou de la « supposée » erreur de ses frères ! Encore une fois, notre salut passera par la sincérité et le profond respect des uns et des autres. Et encore une fois, il faut bénir la critique constructive et bannir les basses rumeurs. La manière de critiquer en dit long sur ce qui se trame dans les consciences : « les langues sont les louches des cœurs », comme le dit l’adage soufi.

Si nous ajoutons à ces problèmes une surenchère de bruits de couloir indignes, une médisance entretenue et une non-acceptation des avis divergents et du pluralisme, la déchéance de ce que nous entreprendrons sera éminente. N’oublions pas que le partenariat interne aux associations musulmanes est aussi important, voire indispensable dans toute forme de lutte et de changement social, et il ne s’agit nullement de cautionnement de circonstance, ni de communautarisme, mais de bon sens.

A suivre…

Notes :

1 Article : Derrière la loi foulardière, la peur, Alain Badiou, Le Monde du 22 février 2004.

2 L’imaginaire de l’autre entre nos peurs et la quête de reconnaissance : Ce que provoque l’énoncé « citoyen de confession musulmane », Hakim Lablan.

3 Article : L’amour des siens, Philippe Beneton, Le Figaro du 19 février 2004.

4 Emission sur Europe 1 le vendredi 20 février 13h-14h.

5 Article : Cet occident tenté par le renoncement, Guy Millière, Le Figaro du 8 mars 2004.

6 Article : Pour un nouveau contrat social, Joêl Roman, publié dans la revue Ecarts d’identité.

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