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La Passion du Christ : le point de vue d’un musulman

Suscitant des réactions allant de l’admiration totale à la condamnation pour antisémitisme, La Passion du Christ de Mel Gibson ne laisse en effet personne indifférent. Sans être un critique cinématographique, je voudrais partager certaines réflexions que le film a suscitées en moi en tant que musulman.

Il faut d’abord dire que le regard qu’on peut avoir en tant que musulman sur le film, est très particulier dans le sens où selon la version musulmane le Christ n’a finalement été ni tué ni crucifié. Voici en effet la version coranique relatant cet événement :

« … et à cause leur parole : “Nous avons vraiment tué le Christ, Jésus, fils de Marie, le Messager de Dieu”… Or, ils ne l’ont ni tué ni crucifié ; mais ce n’était qu’un faux semblant ! Et ceux qui ont discuté sur son sujet sont vraiment dans l’incertitude : ils n’en ont aucune connaissance certaine, ils ne font que suivre des conjectures et ils ne l’ont certainement pas tué. Mais Dieu l’a élevé vers Lui. Et Dieu est Puissant et Sage. » [Coran 4 : 157 et 158]

Quoi qu’il en soit, le Coran corrobore le fait que les Pharisiens ont effectivement condamné le Christ à cette mort atroce que Gibson a mis en scène d’une façon remarquable. Mais selon une première version de l’exégète du « faux-semblant » dont parle le Coran, reprise dans l’apocryphe l’Évangile de Bernabé, la punition a été subie par Juda. L’autre version soutient que c’est plutôt un des apôtres qui s’est sacrifié à la place du Prophète.

La mise en cause de la Nature humaine et non des Juifs.

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Donc, même si au fond de moi-même je savais que, grâce à Dieu, le Christ n’a pas eu à supporter les supplices abominables dont les soldats romains semblaient jouir, j’étais non moins troublé de voir à quel point l’homme pouvait être non seulement un loup hobbesien, mais une véritable bête féroce pour son prochain. En effet, au-delà des circonstances historiques qui impliquaient des Juifs et des Romains, c’est la nature humaine, quand elle se corrompt, qui est à incriminer et non pas celle des Juifs en particulier. Les actes terribles, tels les assassinats commis au nom de l’islamisme en Algérie ou à New York, les crimes soutenus par les sionistes du sanguinaire Ariel Sharon en Palestine, ou les bombardements applaudis par les néo-conservateurs de George Bush en Irak et en Afghanistan, pour ne prendre que des exemples de l’actualité, ne sont en fin de compte le monopole d’aucune chapelle religieuse ou idéologique. L’homme est capable du meilleur comme du pire… c’est là le grand message que rappelle (ou devrait) l’œuvre de Mel Gibson.

La religiosité corrompue : une pathologie psychique

Le deuxième message révèle le rôle de cette fausse religiosité, cette religiosité corrompue, ce dogmatisme qui, prétendant détenir la vérité et défendre le sacré, commet le plus ignoble des crimes avec la conscience la plus tranquille. De même que la nature humaine, cette pathologie psychique n’est pas le privilège des seuls Juifs. L’histoire des religions, monothéistes comme polythéistes, regorge d’exemples de personnes se proclamant représentants ultimes de l’orthodoxie, mais foulant aux pieds, sans vergogne et sans gêne, les plus sacrés des enseignements des religions : le droit à la vie et la liberté de croyance. C’est d’ailleurs là un trait qu’elles partagent le plus avec les idéologies dites humanistes, ces religions des temps modernes, de gauche comme de droite.

Finalement, il serait bon pour nous, quelles que soient nos croyances, de comprendre que derrière chaque crime ignoble, il y a toujours un homme minable. Que ce dernier se cache derrière de nobles idéaux, religieux ou humanistes, ne change rien à sa bassesse.

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