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Communiqué

C’est dans un respect profond de l’histoire et du droit français, qu’aujourd’hui les musulmans de France tentent, dans un climat tendu et controversé, d’accomplir leurs devoirs de citoyens d’une part, et de faire reconnaître leurs droits d’autre part. Or, à l’heure où le mot « laïcité » se lit sur toutes les lèvres, le port du voile dans les milieux scolaires, dans les services publics, voire même dans l’espace privé, suscite de vives réactions de part et d’autre.

La commission Stasi, qui vient de remettre son rapport sur la laïcité, a été créée dans un contexte passionnel, à un moment où l’éducation nationale traversait une crise scolaire qui se traduisait par des professeurs en colère manifestant dans les rues et déchirant des livres, symbole même de l’éducation. Ainsi, pour rassurer l’opinion publique, le Président de la République a trouvé opportun de mettre en place une commission pour traiter d’un phénomène plutôt conjoncturel qu’autre chose : le foulard. Celui-ci qui se pose en fait, comme un faux problème puisqu’il n’est pas à l’origine de tous les fléaux de notre société, contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire. Le débat public s’est donc orienté sur des jeunes filles de confession musulmane portant le foulard à l’école, qui par ailleurs restent encore très minoritaires, afin de dissimuler dans la foulée la crise du système scolaire public en particulier, et du modèle social français d’intégration en général, tel un échappatoire politique et idéologique fortement émotionnel.
Nous déplorons que la commission Stasi n’ait fait que traduire l’état d’esprit général irrationnel qui s’est installé autour de la polémique du foulard et n’ait pas su s’extraire de ce débat « piégé », ce qui a eu pour conséquence une proposition de loi biaisée, dénuée de toute objectivité. Il est donc regrettable de constater, sans remettre en cause le sérieux de son travail, que la commission Stasi n’a fait que contribuer indirectement au débat passionnel qu’a suscité le port du foulard à l’école. De plus, la commission n’a apporté aucune réponse concrète à la question du voile.

Il est navrant de constater qu’aujourd’hui, en France, l’islam et les filles portant le voile jouent un rôle d’exutoire à un sentiment général d’impuissance sociale. Or, ce n’est ni en visant, ni en stigmatisant de façon systématique la communauté musulmane française que la situation sociale de la France pourra s’améliorer, et mettre en place une loi d’exclusion ne pourrait qu’engendrer des conséquences néfastes sur le climat social, déjà bien fragile.

Le rapport de la commission apparaît ainsi comme un « excitant-calmant », dont les effets nocifs et indésirables risquent de se manifester à l’encontre des musulmans de France, en occultant les véritables questions pour l’avenir des Français. Par ailleurs, le rapport tend à défendre une conception folklorique de l’islam en proposant de promouvoir l’Aïd el Kébir comme fête chômée et en réprimant les expressions de religiosité visibles, comme si l’islam se réduisait à la célébration d’une fête. Or, proposer des « mesurettes pédagogiques » visant à faire passer la restriction des libertés fondamentales est loin d’être la solution au problème posé.

De plus, le rapport de la commission Stasi rompt avec le principe de neutralité de l’Etat, en favorisant son intrusion dans la vie spirituelle des Français, renouant avec une certaine vision autoritaire et hyper-interventionniste centralisateur et tutélaire des consciences individuelles qui ne correspond plus aux aspirations et aux valeurs démocratiques des sociétés européennes et pluralistes de ce début de XXIe siècle. Une fois de plus, une certaine France démontre son incapacité à gérer la différence. Pourtant, plus de deux siècles d’une politique de centralisation et d’uniformisation exacerbées ne sont pas parvenus à bout d’identités culturelles régionales (corse, basque, bretonne,…). Les communautés musulmanes subissent aujourd’hui de plein fouet cette volonté d’élimination de l’altérité, mais que l’on ne s’y trompe pas, les communautés chrétiennes ou juives commencent déjà à se retrouver en difficulté. D’autres communautés (religieuses, philosophiques, linguistiques, sexuelles, culturelles,…) suivront ensuite. Face à une telle conception dictatoriale et univoque d’une laïcité intégriste se transformant en une religion de l’exclusion de l’Autre, et face à cette entreprise de déconstruction de notre identité, de notre société ainsi que d’une certaine cohésion nationale française, il paraît urgent de réagir

L’association des Jeunes Musulmans de France qui défend les principes de la laïcité et qui combat toutes formes de prosélytisme religieux, souhaite établir un vrai dialogue de fond afin de renforcer le pacte républicain.

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L’association des Jeunes Musulmans de France demande avec insistance, au Président de la République de considérer toute la dimension que revêt cette proposition de loi et de ne pas hâter une décision aux conséquences durables et qui pourraient se révéler comme désastreuses pour l’avenir de notre pays.

L’association des Jeunes Musulmans de France appelle tous les citoyens, soucieux d’un véritable “vivre ensemble” respectueux et ouvert à faire entendre leur voix et à refuser un projet visant à conditionner, et par conséquent, à rendre plus partiale, l’application du droit.

Nous appelons, enfin, tous les citoyens de ce pays à rester vigilant face à de telles dérives. La laïcité doit nous permettre de vivre ensemble et non pas de construire des murs d’incompréhension et de mépris autour d’une communauté en particulier.

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